Chapitre 13.1

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{Grace-Bebe Rexha}

Je conduis bien plus vite que j'en ai l'habitude, Ruby ne semble pas vraiment rassurée, personne ne parle dans la voiture depuis que l'on a quitté la maison il y a dix minutes. 

Je la vois remuer sur son siège du coin de l'œil. Enfin j'aperçois leur résidence. A peine à l'arrêt, Connor descend rapidement après un mince salut étouffé par l'alcool qu'il a ingurgité, je vois que Ruby ne semble pas vouloir bouger.

-C'était vraiment cool comme soirée...

-Cool, je sais pas si c'est le mot que j'aurais employé

Je suis assez sèche dans mes paroles mais je n'y peux rien, une fois énervée même ceux qui n'ont rien fait en prennent plein la tête avec moi. Il faut que j'essaie de me calmer, de canaliser cette foutue colère.

-Je suis désolée, j'ai totalement déconné...

-Ecoute June, c'était vraiment sympa, on s'en fout de ce petit incident. Et puis entre nous, je pense que je lui aurais déjà arraché les cheveux un par un à Madelyn si j'avais eu autant d'audace que toi.

-Ouai mais j'ai pété un câble, ça ne me ressemble absolument pas mais c'est juste que je suis un peu sur les nerfs en ce moment.

Le silence s'installe, elle réfléchit puis entoure ses bras autour de moi.

-Vraiment merci de nous avoir emmenés, et surtout n'oublie pas que tu peux me parler à tout moment pour quoi que ce soit.

-Merci, c'est le seul mot que je parviens à laisser échapper de mes lèvres.

Je suis rentrée dans ma chambre une heure après, j'ai pris une douche très longue. L'eau était comme infiltrée jusque dans chacun de mes muscles. Je suis maintenant allongée sur mon lit, enfouie sous ma couette, comme si elle pouvait me protéger de tout ce que je vis et suis. 

Je sors mon téléphone sans faire attention aux quelques notifications reçues, "1h42", je le repose ensuite. Il m'est impossible de dormir, mes mots sont enfermés en moi, mon crayon doit les aider à les faire sortir. 

Voilà donc ma délivrance habituelle, un de mes derniers recours, je pioche sous mon lit, plutôt au hasard. Je tombe enfin sur la reliure abîmée que j'ai tant l'habitude de toucher.

Mes larmes commencent à couler, j'observe la pluie qui s'abat sur la fenêtre, le paradoxe me fait sourire. L'eau qui coule de mes yeux se transforme en encre, l'origine de tout ce que j'écris. 

Les phrases et tournures sortent rapidement, la noirceur dans laquelle je me trouve me permet au moins un aboutissement. Je ne sais même pas vraiment pourquoi j'écris, personne ne lira jamais ces stupidités de toute façon. 

J'ai perdu la notion du temps, la vie m'en donne tellement mais je n'ai rien à en faire. Je ne me reconnais plus, qui est cette June devenue violente, et sur les nerfs. Personne ne me voit comme ça mais moi je le sais, ça a toujours été moi, rien que mon véritable visage caché aux yeux du monde.

Les heures sont passées, je ne suis plus qu'un corps vide allongé dans le noir, toujours terrorisée par les lueurs de mon passé. Chaque petit morceau de mon âme restant se perd dans l'obscure noirceur de la nuit. 

Mes yeux se ferment enfin, tentant de me détacher de l'avenir, je m'endors dans l'espoir de trouver mes réponses à l'intérieur de ce monde onirique bien sombre.

✬✬✬

Après un début d'après-midi à travailler, je décide d'appeler ma tante enfin, j'ai vraiment besoin d'entendre sa voix. Une, deux, trois sonneries et elle répond enfin.

-Je pensais que tu m'avais oubliée ma chérie.

-Je suis vraiment désolée, j'ai beaucoup de euh... travail entre les cours et tout mais j'aurais dû t'appeler bien plus tôt.

-Ben voyons beaucoup de travail, n'oublie pas que j'ai été étudiante et que je sais où on passe ses soirées June, tant que tu bosses à côté, je te fais confiance.

Je fais les cent pas dans ma chambre, incapable de rester sur place lorsque je passe un coup de téléphone.

-Je pense que je vais rentrer pour le weekend prochain, ça ne te dérange pas, j'ai besoin de deux bons jours de repos et je ne voudrais pas que tu passes trop de temps seule.

-Je ne passe pas toute mes soirées devant le canapé en pyjama, je sors aussi jeune fille, ne me fais pas passer pour plus vieille que je ne le suis déjà.

J'adore Suzie pour ça, elle est toujours restée adolescente dans sa tête, je suis presque sûre qu'elle sort plus que moi.

-Bon dis-moi sinon, qu'est ce que tu fais en ce samedi ensoleillé June? Et ne me dis pas que tu restes enfermée toute la journée à travailler.

-J'ai vraiment du boulot, entre mes cours de psycho et le devoir du trimestre en littérature, je n'ai pas le temps de sortir aujourd'hui.

Le devoir que je suis d'ailleurs censée faire avec Abruti mais je n'ai aucune envie de le voir et encore moins de bosser avec lui. Je le poursuivrai lundi, le délai est assez long mais je déteste me faire rattraper par le temps.

-Ne te surcharge pas trop, tu vas y arriver de toute façon je crois en toi.

-Merci, ça me touche, bon je vais te laisser et retourner au travail, je voulais juste avoir des nouvelles et te demander pour le weekend prochain.

-Super chérie, bosse bien et je t'attends vendredi à la maison, je préparerai un bon repas pour le soir et on se fera une soirée devant un film, sans oublier les pop-corns.

Ce genre de soirée regorge tellement de souvenirs, si agréables pour moi mais en même temps ils me rappellent ce que je voulais oublier.

-Je t'aime Suzie.

-Moi aussi ma June chérie.

Et je raccroche non sans peine, je pourrais lui parler des heures mais avec sa manie de tout comprendre sur tout elle parviendrait à voir que ma vie n'est pas si belle que je veux la faire paraître.

Je me remets immédiatement au travail, après avoir récupéré mon stylo qui avait encore roulé sous mon bureau. J'ouvre mon ordinateur. Une page blanche s'affiche et elle le reste quelques minutes. "Trois grandes théories sociales: La théorie béhavioriste", ma réflexion se prolonge encore, les mots paraissent bloqués. 

Je tape quelques lignes que je m'empresse d'effacer l'instant d'après. Les idées ne sont pas très loin, il me manque néanmoins quelque chose. Un détail m'avait échappé, je n'ai pas ma bulle habituelle de travail, mon univers, ma musique. 

Elle me coupe de tout et me lie surtout avec ce que je veux alors je parviens à écrire pendant ce qui semblerait être des heures.

Soudain une vibration incessante et surtout d'origine inconnue se fait ressentir. Avec mon casque sur les oreilles et ma musique qui enivrait complètement tous mes sens, je n'avais pas entendu mon téléphone sonner. Je presse le bouton pour qu'il s'allume et je vois apparaître un message arrivé quelques secondes auparavant.




Don't look at my past [Terminé]Where stories live. Discover now