Chapitre 14 : Tout mon possible

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C'était comme si ma vie était un épisode rediffusé d'une quelconque série : car me revoici encore ici, quand bien même j'étais venu hier.

Siam, la place principale de Bangkok, grouille actuellement d'étudiants et d'hommes d'affaire divers et variés. Pour être honnête, la chose que je hais le plus juste après les serpents, c'est me balader à Siam, à cause de la foule.

Et vraiment, si cela n'avait pas été aussi important, je n'y aurais mis les pieds pour rien au monde. Pourtant, j'ai dit au revoir à Phun il y a environ une demi-heure, avant de le suivre discrètement.

Je rumine silencieusement tandis que je suis Phun à la trace. Ce dernier n'est pas très loin de là où je suis. Je passe mon temps à l'éviter afin qu'il ne me voie pas. Et puisque je le file, je vois au passage toutes les filles qui se retournent sur son chemin, avant de faire volte-face pour glousser entre amies. C'est assez drôle, quelque part. Je n'aurais jamais pensé que les gens le voyaient aussi séduisant si je n'avais pas été amené à le suivre ainsi.

Je poursuis mon petit jeu jusqu'à ce qu'il arrive à l'endroit où il est censé la retrouver.

Mais il semble qu'Aim n'est pas encore arrivée. Je regarde Phun entrer dans le tout nouveau Starbucks juste à côté du Pachino. Je le vois distinctement s'asseoir juste derrière le mur de verre (même si techniquement, tous leurs murs sont faits en verre). Je décide donc de prétendre déambuler dans le coin pour garder un œil sur Phun. Il ne peut me voir : il me tourne le dos.

Voir ainsi Phun s'asseoir à lire alors qu'il attend Aim me met en rogne. Cette femme force mon ami (qui est malade) à sortir pour la voir, et elle a le culot de se pointer en retard ? C'est tellement frustrant...

Je continue à faire des aller-retours tant de fois que l'un des vendeurs d'un magasin commence à me regarder d'un drôle d'air. Je me dirige donc vers un café où je prends un verre. Lorsque je reviens, Phun est toujours assis au même endroit. Quel est le projet exactement ? Il a rendez-vous avec sa petite amie ou il cherche un nouveau coin pour bouquiner ?

Une demi-heure plus tard, Aim arrive enfin au Starbucks, toujours vêtue de son uniforme scolaire. Heureusement, sa peau est tellement claire que je la remarque juste à temps pour éviter qu'elle me voie. J'entre dans un magasin pour me mêler aux acheteurs (le vendeur doit véritablement être à cran à force de me voir aller et venir devant sa boutique pour finalement entrer). D'autant plus que je sais que mon short bleu roi se voit tout autant que sa peau. Les filles sont incroyablement rapides pour remarquer les shorts bleus.

Je prétends regarder les vêtements dans le magasin (de vêtements féminins...) tandis que je leur jette de temps à autres un coup d'œil. Vu de loin, ils ont l'air assez joyeux. Mais je me souviens qu'au moment où Phun a quitté sa maison, sa fièvre venait de revenir.

Et c'est ce pour quoi je suis aussi inquiet.

J'attends patiemment que ces deux-là finissent leurs cafés et leurs petits gâteaux. Il aura fallu attendre un sacré moment avant qu'ils se décident à partir. Les suivre est plus simple que seulement les surveiller : au moins, je n'aurais plus de vendeur qui me regarde bizarrement sur le dos. Je continue à les suivre sur la passerelle. Je me souviens alors qu'Aim voulait acheter des chaussures.

Mais dès lors que je sors de la passerelle, je suis arrêté par la foule compacte qui circule sur la place. Il y a tant de personnes ici que je commence à me demander comment Phun va s'en sortir. Beaucoup de femmes s'arrêtent faire quelques emplètes avant de rentrer. Le chemin pour marcher est déjà extrêmement étroit. Je garde un œil anxieux sur Phun. Non seulement il est toujours malade, mais il porte le sac d'école d'Aim et un autre sac en plus. Je me retiens vraiment de lui mettre une claque à le voir faire à ce point le gentleman dans son état.

Je les regarde, et Aim ne cesse d'entrer et de sortir, magasin après magasin. Mais il ne semble pas qu'elle ait acheté la moindre paire de chaussures, ou quoi que ce soit d'ailleurs. Putain ! C'est si difficile que ça d'acheter des godasses ? Elle cherche les chaussures de Cendrillon ou quoi ? Pourquoi elle n'a pas réfléchi cinq minutes au type de chaussure, ou au type de magasin avant d'emmener Phun ? J'espère qu'elle s'amuse bien, à le trimbaler comme ça.

Je dois l'admettre : la situation commence vraiment à me faire chier. Je continue de ronger mon frein tandis que je les suis pendant encore longtemps, si longtemps que je commence à ne plus sentir mes pieds. Pour couronner le tout, il commence à être vraiment tard : le ciel est devenu violacé.

Et enfin, nous arrivons tous les trois dans le meilleur coin de Siam : là où il y a le plus de monde. Pourquoi est-ce qu'il y a autant de monde ? Un magasin offre des trucs ? Je vais en ramener un peu pour Ma. Mais je doute que quelqu'un comme Aim daigne seulement regarder quelque chose qui vienne d'ici.

Comme je le pensais, ils déambulent simplement, sans but particulier (et j'ai failli les perdre un bon nombre de fois). Du premier au troisième étage, ils sont entrés dans pas moins de vingt-neuf magasins. Et ils repartent sans avoir rien acheté : je ne vois que le sac d'école et l'autre sac dans les mains de Phun. (Comment fait-il pour résister ?)

Phun est à l'agonie et t'es même pas foutue de t'en rendre compte, Aim ?


* * *


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[Traduction] LovesickWhere stories live. Discover now