Chapitre 6 : Ce n'est pas si grave

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— Du coup... où est-ce que t'as dormi la nuit dernière ? Je t'attendais pour jouer à DotA avec toi la nuit dernière, mais tu ne t'es pas connecté.

Donc en fait, tu savais que je n'étais pas chez moi avant même de me voir ce matin ? Alors pourquoi ce bâtard s'est-il senti obligé de détailler point par point tout ce qui était différent ?

Je soupire et lance à Keng un regard las. Il veut vraiment savoir ce qu'il se passé. Ohm est là lui-aussi, hoche la tête en soutien.

— Ouais, je n'étais pas chez moi la nuit dernière.

— Wow, wow, wow ! Alors chez quelle meuf t'étais ?

Ce putain de Ohm. Toujours en train de dire n'importe quoi. Si j'avais été avec une fille, est-ce que j'aurais l'air aussi miséreux que ça ?

— De quoi tu parles ? J'ai été coincé chez Phun, de la classe 1, toute la nuit.

Et il n'en faut pas plus à Ohm pour soudain s'éloigner de moi pour aller se laisser tomber sur sa chaise. Keng s'approche, lève mes bras, me tapote le dos pour vérifier si je vais bien.

— Donc c'est avec un mec que tu l'as perdue. Je m'en doutais. Comment c'était ? T'as eu mal, comme c'était ta première fois ? Il paraît que Phun en a une grosse.

Il est incroyablement vif dès lors qu'on parle de choses complètement tordues. Et d'ailleurs, Phun en a vraiment une si grosse que ça ? Mais à quoi je pense, moi !

— Allez vous faire foutre ! Je devais juste lui parler d'un truc. Mais il était tard alors j'ai dormi là-bas. C'est tout !

Ohm est finalement revenu s'asseoir près de moi. J'en ai eu ma dose avec ce bâtard.

— Depuis quand t'es proche de Phun ? Je croyais que vous vous connaissiez à peine.

— C'est à cause de ce foutu Nigaud. C'est à cause de lui que j'ai dû me rapprocher de Phun. Ah oui. Et je me suis occupé des 20 000 qu'il nous manquait pour le club.

— Ne me dis pas que t'as vendu ton cul à Phun !

Vlan ! Je me suis éclaté la main, mais tant pis. Il me court sur le haricot !

— Aie ! Pourquoi t'as fait ça ?

Et il a le culot de me demander pourquoi.

— J'ai vu que tu continuais à cracher des ânneries, je t'aidais simplement. On aurait dit que tu avais des difficultés à respirer avec toute la merde que t'avais dans la bouche. Pourquoi tu sors toujours des histoires de cul bizarres ?

Je continue à l'incendier tandis que je jette un œil à ma montre. Il reste encore beaucoup (trop) de temps avant que la classe ne commence. Combien de temps vais-je encore devoir supporter ces imbéciles ?

Un téléphone sonne. Ohm utilise la même chanson comme sonnerie depuis trois mois (je commence à en avoir la nausée). Mais pour une fois, j'apprécie qu'elle sonne la fin de ce match. Soupir. Je suis soulagé de n'avoir pas à continuer de supporter leurs petites réflexions. Je lui adresse une grimace moqueuse avant de sortir mes devoirs pour vérifier que j'ai fait tout ce qui était demandé. Mais lorsque je relève la tête, il me rend ma grimace.

— C'est ta mère.

Putain ! Ma mère ?

Je fronce les sourcils tandis que je regarde l'écran du téléphone. Je fais les yeux ronds. Quel idiot, celui-là.

— Dis-lui que je ne suis pas là.

— Quoi ? Mais c'est ta petite amie. Tu joues le beau gosse inaccessible ? Y'a un problème avec Yuri ?

Eh bien... Je ne l'aime de cette manière, qu'est-ce que je suis censé faire ? En plus, je ne suis pas doué avec les filles, surtout avec celles qui sont insistantes comme elle.

Je ne réponds pas vraiment à Ohm. Il hausse les épaules pour bien montrer qu'il n'en a que faire avant de décrocher. Je lui tapote deux fois sur l'épaule pour lui confirmer le plan. Il me repousse comme pour me dire qu'il avait déjà compris.

— Allo ? Noh... il n'est pas là. Je ne l'ai pas vu encore.

Bien. Très bien.

— Oh... Haha ! T'es intelligente, une seconde !

Quoi ?

— Ta mère a deviné notre petit manège.

Il couvre le téléphone avec sa main tandis qu'il me chuchote quelque chose que je n'avais pas du tout envie d'entendre. Je ne comprends pas. Je ne comprends comment. Comment les filles font pour toujours tout comprendre ?

Finalement, je laisse échapper un gros soupir avant d'accepter de saisir le téléphone d'Ohm.

— Ouais ? Ça va ?

— Comment ça se fait que je n'aie pas réussi à te joindre, Noh ?

J'entends des bavardages en fond sonore qui se mêlent avec sa voix radieuse. Elle est probablement à l'école. Je l'imagine avec un grand sourire étalé sur le visage.

— J'avais plus de batterie.

— Et comment ça se fait que tu n'étais pas connecté la nuit dernière ?

— J'ai passé la nuit chez un ami. Tu avais besoin de quelque chose Yuri ?

Est-ce qu'elle pourrait un jour cesser de tourner autour du pot ?

— Oh ! Hahaha.

Son rire sonne totalement faux. Je me mets à transpirer en dépit de la climatisation de la classe qui crache de toutes ses forces.

— Tu veux qu'on aille manger un morceau ensemble ce soir ?

Je le savais...

— J'ai une réunion au club ce soir, je ne partirai pas avant tard.

— C'est pas grave. Je t'attendrai à Siam. Au Baanying, comme d'habitude.

Elle décide de tout toute seule. C'est tout elle, ça. Malheureusement, je suis du genre qui ne sait pas dire non aux gens. Et tout particulièrement à Yuri. (Cependant, je n'y suis pas davantage parvenu avec Phun, n'est-ce pas ?)

— Il est possible que je n'arrive que très tard.

C'est le mieux que je puisse faire...

— Pas de problème. Je ne suis pas pressée. On se voit tout à l'heure, alors !

Elle me dit ça avec un ton tout enjoué avant de raccrocher. En réalité, Yuri est vraiment une fille adorable. Elle n'est pas difficile. Elle n'est pas grognon. Elle n'a pas toujours besoin que les choses aillent exactement comme elle les décide. Son seul problème, c'est qu'elle a tendance à tout décider de son côté. Désormais, je suis théoriquement son « petit ami » même si je ne me souviens pas exactement avoir donné un jour mon assentiment. Et avant même d'avoir eu le temps de le réaliser, j'étais devenu le « petit ami » de Yuri.

Mais d'une certaine manière, ce n'était pas comme si j'étais perdant. Yuri est plutôt mignonne. Son père est japonais, de ce fait elle est à moitié japonaise. Elle a le teint pâle, des traits éclatants et de grands yeux. (Oh... et ses canines ressortent un peu). Elle est très bavarde et littéralement infatigable. Parfois, je me dis qu'elle est aussi pleine de vie qu'absolument épuisante.

Je vais probablement devoir aller la voir. Nous ne nous sommes pas vus depuis une semaine. Je ne voudrais pas que les gens m'accusent de ne pas prendre soin de ma petite amie.


* * *


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[Traduction] LovesickWhere stories live. Discover now