Assaut

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New-Seattle, Quartier 9.6, Entrepôt Scimmie, 4 mai 2314




Amarante ne s'intéressait guère au stock mis à disposition par les Scimmie. Elle vérifia pour la énième fois son propre arsenal. Sous la cape, elle supportait difficilement le fin gilet en graphène et le fil de mise à la terre qui battait contre ses jambes lorsqu'elle courrait. Dans son dos, le daïshō noir, lustré pour l'occasion.

Elle n'avait pas voulut risqué sa paire de lames préférées mais espérait tout de même que celle-ci ne serait pas trop abîmée. La suture tira sous son sein alors qu'elle jetait un coup d'œil à son équipe. Elle grimaça et Coquelicot piqua un fard en croyant que la désapprobation lui était adressée.

Red observait lui aussi l'équipe de la jeune femme. Après tout il avait choisit de se joindre à son équipe, la plus petite, pour mener l'assaut frontal. Dark s'était gardée le privilège de les prendre à revers. Feu et Sang auraient les flancs puisqu'ils disposaient des plus grandes équipes. Grenat et Carmin appuieraient Red pour la percée. Amarante ne savait pas quoi en penser. Elle ne dirigerait pas sa propre équipe mais ça lui laissait aussi un prétexte pour ne s'occuper que d'elle-même.

Elle revint à son inventaire, sur ses hanches, deux ceintures lestées chacune d'une dizaine de stylets. Sur ses flancs, deux couteaux de chasse. Elle remit celui de gauche à la verticale pour qu'il ne la gène pas. Et enfin, à sa ceinture, un casque intégral. Elle ne l'avait encore utilisé qu'à l'entraînement mais Red avait été inflexible sur ce point : il refusait de perdre un homme par manque de précaution. Ou une femme, avait il ajouté en voyant le regard mesquin de la caporale.

Son équipe revint vers elle. Bismarck était déjà chargé en armes blanches au départ du quartier général mais il avait l'air d'un char d'assaut avec l'artillerie qu'il avait pris en plus. Il hocha la tête pour répondre à une question aussi muette que lui : le chargement n'était pas trop lourd pour qu'il se meuve.

Rose avait une sourire carnassier en tapotant la mitrailleuse portative qu'elle s'était dégotée. Un katana un peu plus long que celui de sa capitaine était en travers de son dos et elle s'était débarrassée de son couteau tactique pour emporter un maximum de batterie pour sa nouvelle acquisition.

Fraise, malgré sa petite taille, ne surprenait pas avec son bouclier anti-émeute car elle était trapue. Deux tonfas étaient passés au travers de sa ceinture, rappelant qu'elle aussi était ambidextre. Amarante remarqua qu'elle avait ingénieusement calé une courte épée à double tranchant dans le bouclier.

Coquelicot, après une plus longue hésitation, avait opté pour une armure plus épaisse et disposant visiblement d'un brouilleur optique. Elle s'était aussi équipée avec un fusil de portée moyenne. Elle serait donc la couverture locale. Amarante n'était pas surprise et Red semblait satisfait lui aussi par la polyvalence de l'équipe.

***

Les équipes étaient en place. Mais, pour éviter que les communications soient interceptées, ils attendaient tous le coucher de soleil. La trentenaire n'en pouvait plus et visiblement elle n'était pas la seule à piétiner. Mais Red était inflexible. Il préférait alterner entre jeter des coups d'œil discret au coin de la rue et leur répéter encore une fois l'ordre de bataille pour l'assaut.

Comme s'il n'était pas évident que ceux chargés d'un bouclier avancent en première ligne. Elle reconsidéra la phrase. Après tout, c'est vrai que Carmin serait assez idiot pour passer devant les protecteurs une fois que la fureur du combat l'aurait envahit. Le sol s'obscurcit plus rapidement. Elle enfila son casque et vit ses congénères faire de même avec autant de dégoût.

Red entra dans la rue qui donnait sur le portail avec les autres armés d'un bouclier. Il avait une place de choix au centre pour diriger l'assaut. Il avait pu trouver un bouclier assez grand pour le cacher malgré sa carrure et avait même prit le luxe de passer une bombe de peinture rouge vif pour s'annoncer. Ce qui était stupide puisque l'ennemi ne les connaissait pas.

Alors que les autres se plaçaient derrière lui et que les sentinelles tigres commençaient à remarquer le mouvement, il hurla pour lancer la charge et dû crier plusieurs fois pour que les autres respectent la ligne en trottant. Les premiers tirs commencèrent à vibrer sur les boucliers et une ogive les surprit mais tomba plusieurs mètres derrière eux. Elle fit trébucher deux ou trois hommes mais n'ébranla pas leur conviction, bien au contraire.

Une seconde ogive fractura la chaussée, devant eux cette fois-ci. La première ligne se scinda pour contourner le petit cratère et Amarante sentit sa côte grésiller et l'affichage sur son casque se brouilla un instant lui confirmant son utilité. Elle grimaça et se prépara à dégainer alors que les murs n'était plus qu'à 60 mètres.

Les tirs se mirent à passer au-dessus des boucliers et soudain la porte explosa, secouant au passage les sentinelles et leurs renforts. Un second tir acheva de chasser les battants de leurs gonds dans un concert de grincements métalliques. La brèche était ouverte et les hommes sur le mur tombèrent tout à coup comme des mouches alors que Coquelicot et ses pairs posaient le genou à terre.

***

Une fois la porte franchie, la caporale vit comme un quartier mais en plus petit, et mieux entretenu. Des rues se croisaient et le complexe semblait pouvoir abriter plusieurs milliers de personnes aisément. Mais il était presque vide. Les gardes sur le mur luttait contre la dernière ligne, les arrières à découvert.

Mais les combattants n'eurent pas le temps d'en profiter. Les protecteurs firent de leur mieux pour intercepter la charge frontale mais ils n'étaient pas assez nombreux. Fort heureusement, les tigres étaient bien moins équipés et les rouges se réjouirent d'être en sous-nombre évident pour rééquilibrer l'affrontement. Amarante dégaina enfin et s'assura qu'aucun allié n'était trop proche avant d'engager le combat.

Ils avaient rapidement été encerclés et les coups pleuvaient sur eux, brouillant parfois l'affichage sur leur casque. Amarante dut admettre encore une fois l'efficacité de son casque lorsqu'il lui évita de frapper Bismarck qui s'était approché derrière elle. Le cercle se déformait à mesure que les forces armées de l'Héxaédron se déchaînaient pour faire des percées et que les artilleurs fauchaient les tigres.

Des hommes mieux équipés commençaient à arriver. Amarante dut reculer plusieurs fois pour éviter d'être isolée et certains hommes au sol durent être achevés pour éviter les coups bas. Les deux lames projetaient de concert le sang des morts sur les victimes à venir et la femme dut contenir son excitation pour ne pas risquer la vie de ses coéquipiers.

Il y avait encore assez d'adversaires pour se déchaîner plus tard. À vrai dire, Amarante suspectait Lierre de s'être lourdement trompée sur les effectifs. À sa surprise, elle espéra que Dark ne lui en tiendrait pas rigueur. Puis, elle se comprit : si Dark pardonnait cette erreur, il y aurait plus de combats. Et sinon, Lierre serait sûrement renvoyée et la voir serait plus difficile.

Le casque bourdonna et son crâne avec. Quelques secondes d'inattention et un tigre avait percé sa garde lui tirant sur le casque à bout portant. Bismarck ne le rata pas lorsqu'il lui infligea un coup avec un fusil comme s'il avait été une batte. Sans qu'elle eut à le demander, il la souleva brusquement par le haut de la cape pour la remettre sur pied.

Elle inspira profondément, prit une posture plus défensive et se remit au travail.

Les Achroniques - 2314, tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant