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Angèle danse depuis deux bonnes heures. Selim a abandonné pour sympathiser avec des organisateurs. Pendant ce temps, elle voit Coline et Isidore rejoindre des bandes d'amis du feu de camp. Anatole, de son côté, est en train de pécho la blonde repérée tout à l'heure.

La brune a tiré sur son joint plusieurs fois, mais trouvant l'herbe de mauvaise qualité, s'est rapidement ravisée pour en rouler un autre avec de l'herbe empruntée à une meuf à côté d'elle sur la piste de dance. Elle est plutôt défoncée et aimerait que Selim retourne à ses côtés. Surtout qu'elle vient d'enfiler des shots de vodka avec les boîtes de tic-tac sur un coup de tête.

Elle le cherche dans la foule sur l'herbe. Il est assis en train de discuter avec des filles. Angèle grimace. Le chenapan.

— Angèle ?

Selim ne sourit pas du tout quand elle s'assoit à côté de lui. Elle voit un peu flou, bancal, mais ça va, parce qu'elle entend sa voix. Elle adore sa voix, vraiment.

— J'adore ta voix.

Des organisatrices gloussent et Selim fronce les sourcils. Enfin, elle espère qu'il ne fronce pas les sourcils, elle ne veut pas le fâcher.

— Danse avec moi ! demande-t-elle en lui attrapant la main.

Même paumée, elle sent son pouls accéléré. Il ne la repousse pas, il ne la lâche pas.

— J'ai pas envie, Angèle.

Elle s'énerve. Il l'a appelé par son prénom devant ces filles. Elle veut son surnom.

— Vilain Selim. Tu dragues des blondes qui fument pas et je me retrouve toute seule.

Elle a envie de pleurer.

— Tu vas pas pleurer ? Sérieux Ange.

Et puis elle éclate de rire, nerveusement pour aucune raison. De peur, de stress, d'amour.

— Mec, je suis défoncée.

Mais Selim ne rit pas du tout et elle sent qu'elle l'a fâché. Alors elle se relève et part vers ses autres amis. Mais une main la rattrape. Et c'est Selim. Enfin, elle espère que c'est Selim.

— T'es incorrigible Ange, soupire sa voix.

Et elle l'entraîne dans la danse. Lentement, en tirant une autre taffe. Il prend le joint et le piétine par terre. Et elle danse, contre lui, en essayant de faire les mouvements les plus cohérents possibles. D'un autre côté, elle se rend compte que ce n'est pas du tout cohérent ce qu'elle ressent pour lui.

— Je suis désolée, lâche-t-elle soudainement.

Elle a envie de pleurer bizarrement.

— Pourquoi ?

Tout déborde. Elle retourne un peu sur Terre, croise son regard pour de vrai.

— Parce que je suis pas assez bien pour remplacer Coline, pour te faire oublier le cancer de ton père. Que je suis pas assez forte... pour être ton amie. Parce que j'aimerais... tellement... tellement... Oh putain Selim. Tellement...

Et puis elle s'arrête. Une autre idée jaillit encore, et elle se sent vulnérable dans ses bras. Mais sa tête est tellement confuse et pétillante d'énergie étrange.

Elle lâche, en nouant leurs doigts, sans penser aux conséquences parce qu'elle n'est pas dans l'état de réfléchir sur quoi que ce soit :

— J'aimerais tellement que tu m'embrasses, Selim.

FlûteWhere stories live. Discover now