Chapitre 6

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«Le pré est vénéneux mais joli en automne

Les vaches y paissant

Lentement s'empoisonnent

Le colchique couleur de cerne et de lilas

Y fleurit tes yeux sont comme cette fleur-là

Violâtres comme leur cerne et comme cet automne

Et ma vie pour tes yeux lentement s'empoisonne»

                                                                                    Guillaume APOLLINAIRE, Extrait "Les Colchiques"

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Mes rêves de sables fins et d'océans ont vite fini à la casse. J'ai passé mon week-end à réviser et Ollie m'a suivi dans mon malheur. Me voilà donc d'une humeur exécrable devant le bâtiment d'économie avec cinq minutes de retard. Je sais pertinemment que je vais retrouver Kyle en cours. Je prie donc Isis, Anubis, Osiris et tous leurs amis pour ne pas être à côté de Kyle cette fois-ci sauf qu'apparemment ils n'en n'ont rien à foutre. L'amphi est bondé et la seule place de libre est à côté lui. Le destin joue clairement contre moi. Je sens sa présence lorsque je m'installe.

-Salut.

Son regard posé sur moi me coupe le souffle. Mon cerveau est clairement en manque d'oxygène. Ses lèvres s'étirent en un rictus complaisant lorsqu'il remarque la réaction évidente que j'ai en sa présence. J'ai l'air d'une ado qui vient de passer la puberté.

-Comment vas-tu Gabby ?

Mon corps tout entier se crispe lorsque j'entends le surnom qu'il me donne. Les deux seules personnes qui m'appelaient Gabby sont Nathan et elle. Mon âme perdue.

-Je t'interdis de m'appeler comme ça.

Je le foudroie du regard. J'essaie de fermer ce chapitre de ma vie et ce mec a le don d'appuyer là où il ne faut pas. Lorsque je sens sa main sur ma cuisse, je me pétrifie instantanément, la chaleur de sa paume passe à travers mon jean. L'effet n'est pas aussi puissant que le contact que nous avons eu à la laverie, mais assez pour que je ressente quelque chose. D'habitude quand les gens me touchent, ça ne me fait ni chaud ni froid, mais avec lui, c'est différent. Pourquoi est-ce que c'est tombé sur lui ?

Il s'approche un peu plus de moi et je sens son souffle chaud contre mon oreille.

-Tu préférerais bébé ?

Si seulement je pouvais enlever le sourire plaqué sur son visage. Il imagine déjà que je serais dans son lit en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire. Il veut jouer, on va jouer. Je lui lance mon sourire le plus subjectif et glisse à mon tour ma main sur sa cuisse. Je ne me laisse pas décontenancer lorsque je sens ses muscles fermes à travers son jean. Je remonte un peu plus ma main et me penche en avant, je remercie le ciel de ne pas avoir mis un décolleté plongeant aujourd'hui.

-J'adorerais.

-Ah oui ?

Il est totalement surpris de ma réaction. Il pensait sans doute que ça serait plus difficile. S'il savait. Je retire ma main et la sienne d'un mouvement brusque.

-Je préférais encore devoir manger des chatons jusqu'à la fin de ma vie. Ne me dis pas que ce numéro marche avec des filles.

J'éclate de rire et le laisse abasourdi. Son ego doit sûrement voler en éclats à l'heure qu'il est. Alors que je me remets correctement à ma place, je vois cinquante visages tournés vers nous. J'avais complètement oublié où l'on était durant ces quelques secondes. Le professeur est arrivé entre temps. Il nous observe avant de prendre la parole.

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