13. Prise au Dépourvu

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Viens, épaisse nuit, enveloppe-moi des plus sombres fumées de l'Enfer.

William Shakespeare, Macbeth, 1623


- Ne t'en fais pas, tout va s'arranger, me chuchota Matt. Viens et montre-moi ton doigt, me demanda-t-il. Alors, je me relevais et m'assis devant lui en lui tendant ma main droite.

- Tu as beaucoup mal ?

- Non pas trop, avouais-je.

Il fit un petit sourire.

- Tout va bien dans ce cas. Mais on va quand même te mettre un pansement, me souriait-il.

J'hochai la tête et le suivit dans la salle d'eau. Il ouvrit un tiroir et en sortit une petite trousse rouge. Il fouilla rapidement dedans.

- C'est bon ! Je l'ai ! s'exclama-t-il, heureux.

Avant de me poser ce pansement, il mit un peu d'alcool sur un coton. Rapidement, il appliqua le liquide sur ma plaie. Un cri s'échappa de ma bouche.

Je me réveille en sursaut. Je n'aurai pas dû m'endormir. Et si une autre créature était venue ? Je me retourne dans tous les sens. Il n'y a rien. Je suis rassurée, mais tout de même. Cela est une vraie preuve d'inconscience ! Je prends ma tête entre mes mains. Seulement, je m'arrête rapidement. Mon bras droit me fait mal. Je lui jette un coup d'œil. Une longue ligne s'étant à l'intérieur de mon bras, de mon coude au bas de ma paume. Je grimace. J'en garderai sûrement une cicatrise. Super souvenir ! Je ris, sarcastique.

M'appuyant sur mon bras gauche, je me mets debout. Je me dirige vers mon sac. Un relent de dégoût m'envahit lorsque je vois le corps sans vie de la créature. Je m'en occuperais après. J'attrape mon sac et l'amène près de la rivière. Il va bien falloir que je me lave et que je mette de nouveaux habits. Ma robe est vraiment dans un sale état. J'ouvre délicatement la poche extérieure de mon baluchon. J'en sors un mouchoir de tissu. L'ouvrant, je déballe un savon. Je le fais tenir sur un rocher de la rivière, sur la rive.

Je me baisse pour défaire mes scandales. Je retire ensuite ma robe, puis mes sous-vêtements. Je sais, cela est bête mais avant de faire cela, j'ai regardé autour de moi. Comme si une personne encore vivante n'aurait rien de mieux à faire de m'espionner, nue. Je prends une inspiration et plonge. Je contracte la mâchoire pour ne pas crier lorsque mon genou meurtri et mon bras entaillé rentrent en contact avec l'eau. J'essaie tant bien que mal de camoufler les différentes grimaces qui s'ensuivent sur mon visage. Mes battements de cœur s'accélèrent. Je prends de grandes inspirations en me répétant de me calmer. Ce n'est rien. Il faut que je surmonte cela. Ce n'est pas grand-chose. Tout va bien. J'ai connu pire. Tout se passera bien. Je ne prendrai plus de risques inutiles. Tout va pour le mieux.

Petit à petit, la douleur se refoule. Je ferme les yeux, me concentrant sur mon pouls. Il ralentit. Je soulève mes paupières et prends alors possession du boc de savon. Inutile de me passer du savon sur ma blessure, j'ai du désinfectant dans mon sac. Je me savonne le corps tant bien que mal. Malheureusement, je n'arrive pas à bien me savonner les cheveux avec une seule main. Tant pis. Je me les laverai demain, ma blessure ira déjà mieux. Je remets le savon sur un rocher au soleil. Il faudra qu'il sèche pour que je puisse le remballer. Puis, je me rince dans cette eau claire. A ce moment, une question stupide me traverse l'esprit. Est-ce des gens de Westen pourront voir le savon traverser le rivière ? Je lève les yeux au ciel. Et avec cela c'est bien moi qui dis que les femmes sont autant intelligentes que les hommes.

Après avoir barboté dans la rivière, je m'étends sur les galets chauds. Seul à cet endroit le soleil peut jeter ses rayons sans obstacle. Aucune branche n'est sur la rive pour m'empêcher de sécher durant la troisième journée estivale de cette année. C'est une sensation si étrange d'être à demi-allongée, nue, en pleine forêt. Je me sens vulnérable. Je me sens juvénile, alors qu'il n'y pas lieu d'être. Le terme le plus exact serait que je ne me sens pas à ma place. J'ai envie de me recroquevier sur moi-même et de venir cacher ma tête entre mes genoux. Pourtant, quoi de plus pittoresque qu'un corps nu ? La nature humaine voudrait que je me sente à l'aise, étant nue dans l'immensité d'une forêt. Mais, nous avons évolué dans le mauvais comme dans le bon. Maintenant, nous préférons cacher notre corps aux yeux des autres. Nous portons des tissus comme deuxième peau, elle, exhibée aux regards extérieurs.

Malgré le fait que j'aimerai pouvoir assumer mon corps et ne pas avoir à le cacher par de multiples vêtements différents, je suis très mal alaise dans cette tenue. Actuellement, il ne reste que peu de gouttes d'eau sur moi. Seules les pointes de mes cheveux sont encore trempées. Je me lève pour apporter mon sac. Après être venue me rasseoir, j'en extrais le désinfectant et mon baume. Je plie mon genou gauche pour tendre la peau - ou ce qu'il en reste, j'ironise. J'asperge la plaie d'eau. Je préfère ne pas désinfecter celle-ci, il ne reste plus beaucoup de désinfectant. Ma blessure n'a pas été causée par une créature, soit il y a beaucoup moins de risques qu'elle s'infecte.

N'ayant point de tissu propre avec lequel essuyer ma plaie, je laisse sécher. Oui, je pourrais le faire avec mon débardeur en coton, mais je n'ai pas envie de déjà le tâcher de sang. En attendant, j'désinfecte aussi mon bras droit. La blessure est plus profonde que ce que je croyais. Rien de bien grave, mais rien de superficiel. Je me mords la lèvre pour ne pas gémir sous la brûlure. Respire. Je souffle lentement. Mon articulation est à peine humide. J'attrape le baume cicatrisant et soulève le couvercle. Une pâte épaisse et verdâtre repose dans l'emballage. J'en prends un peu sur mon doigt et l'étale sur mon genou en grimaçant. Je n'en dépose que très peu pour qu'elle pénètre vite et qu'elle ne colle pas à mon pantalon.

J'attends quelques instants avant d'agripper mes vêtements propres. J'enfile mon sous-vêtement. Je n'ai jamais aimé les soutien-gorge. Ils sont toujours trop serrés quand votre thorax s'agite vigoureusement dû à un effort physique.

Je mets mon pantalon en cuir souple, puis mon fin débardeur. Cela fait du bien d'être propre. Je me chausse. Bien, maintenant il faut que je finisse de soigner mon bras. Je m'installe près du baume encore déballé. J'inspire un coup puis j'étale généreusement cette crème sur le long de ma plaie. Mes yeux s'écarquillent brusquement sur le coup de la douleur. Je ne sens plus que ce membre-là. J'ai l'impression de sentir mon cœur battre dans cet organe endommagé. Rapidement, la douleur s'atténue grâce au baume. Je souris. Je ne sais pas quel est l'homme qui a inventé cela mais il est sacrément fort. Intérieurement, je le remercie mille fois.

GuerrièreDonde viven las historias. Descúbrelo ahora