Piège-La Confiance

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La Confiance

Meidosha regarda autour d'elle, il ne restait du camp qu'un champ de morts et d'agonisants. Le mot "victoire" ne fut prononcé qu'à mi-mot. C'était son clan qui s'étalait là, sans vie, au sol. Elle regarda Dengao, l'armure baignée de sang. Un seul signe de confiance et voilà ce qui lui en avait coûté.

Le torse déchiré, Hanghun refusa un temps les soins qu'on lui proposa, ordonnant à ce que l'on s'occupe en priorité des hommes inconscients. Son bras désarticulé pendait mollement tandis que sa gorge saignait abondamment. Quelques instants plus tard, il s'effondra à son tour.

Heisha vint la première soutenir Meidosha. Il n'y avait rien, pas le moindre camp là où Makiedo leur avait dit d'aller. C'était bien un piège, convint la jeune femme, seule Makiedo savait suffisamment à l'avance que le camp serait dégarni, et qui restait. La jeune fille n'osa pas parler de la discussion de la veille. Inutile, tout le monde en était désormais certain.

La journée s'écoula, les morts furent inhumés, les blessés placés aux soins du prêtre de Yansha. Sur les vingt soldats qui avaient combattus, plus de la moitié était tombé, et tous les autres étaient blessés. Dengao, lui, grièvement blessé, luttait contre sa fin.

— Vous m'avez appelée, prononça faiblement Meidosha en écartant les tentures menant à la tente de commandement. Par chance, celle-ci avait survécu à l'incendie, sauvant la majorité des documents de la résistance kojo.

Le vieux chef reposait sur une natte couverte d'étoffes de lijo. Kosora était assis, silencieux à son chevet, un linge humide en main. Sur le visage du prêtre, Meidosha comprit la gravité de la situation. Au début, Meidosha crut le vieux guerrier endormi. Ses yeux frémirent, elle sut qu'elle s'était trompée. Dengao était très faible, son corps régulièrement secoué de spasmes.

Il toussa, crachant une gerbe vermeille sur les linges humides de sang. Sa voix était rauque, et chaque mot semblait être une torture, mais il insista ;

— Meidosha, fille de kojo...

Il cracha de nouveau, une part de sa vie sembla lui échapper dans un violent spasme.)

—Les esprits me rappellent auprès d'eux... Je sais que mon devoir est accompli...

Il peinait à parler distinctement et mobilisa ses dernières forces en quelques paroles.

—Ils me chuchotent... tu es celle que nous attendions, tu es celle qu'ils voulaient, et pour cela, tu es notre dernière chance. S'ils veulent te détruire, c'est que tu es celle qui peut les faire tomber... Fille de Yongchi...

Sa tête bascula contre le sol, abandonnée de ses forces. Meidosha tomba à genoux et tenta de redresser le visage du vieil homme. Celui-ci releva en un nouvel effort, presque surhumain, sa main tremblante, caressant la joue de la jeune fille.

— Tu as le visage de ta mère... Le plus beau visage qui puisse être... Et les yeux de ton père... Soit comme eux, capable du meilleur. Je n'aurais jamais cru... Tu...

Il peinait de plus en plus à retenir la vie qui s'écoulait entre ses lèvres entrouvertes, Meidosha lui lança un regard triste, lui accordant par cela le pardon qu'il n'aurait jamais à demander.

—Tous ces papiers, lis les. Tu es... Tu es seigneur des Kojo.

Il cracha son sang, sa main retomba lourdement contre le sol. Un souffle rauque passa entre ses lèvres, le dernier. Meidosha resta là, silencieuse, ne sachant que penser, n'osant relever le regard pour croiser celui de Kosora. Les minutes s'écoulèrent, minutes où elle espéra que tout cela n'était qu'un cauchemar, puis une main chaleureuse se posa sur son épaule osseuse. Puis une autre, elle leva enfin les yeux, c'était Heisha et Kosora.

Fleur de PrunierOù les histoires vivent. Découvrez maintenant