Bataille pour la Cité Impériale-Sang et Deuil

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Sang et Deuil
Elle n'eut aucun mal à trouver ce fameux hôpital. Tout près du manoir abandonné, il s'agissait d'un ancien monastère, abandonné depuis des décennies. Ses ailes décrépies entouraient une vaste cour intérieure au pavé usé et rongé par la végétation. Des portions importantes du toit s'étaient depuis longtemps effondrées, emportant parfois plusieurs étages. Par endroit, figuiers, abricotiers et pruniers poussaient librement entre les étages. 

Dès qu'elle eut passé la porte, les gémissements assaillirent la jeune fille, bien trop nombreux.

— De l'eau, entendit-elle non loin.

— Oui... Reposez-vous... ça va aller...

Les voix se succédaient, toutes insupportables. Elle refusa de croiser le regard des blessés lorsqu'elle déposa Heisha au sol, inconsciente. Deux prêtresses intervinrent aussitôt.

— Oh ! Ça va, le cœur ne semble pas touché ! Une chance... Yuki, trouves de l'onguent de Tekali... ça doit commencer à s'infecter... VITE !

Meidosha ne l'écoutait qu'à peine. Des centaines de voix tambourinaient dans son crâne fatigué... et ce concert de sanglots et de pleurs. Elle n'en pouvait plus de les entendre. Ça lui était insupportable. Et pourtant, elle se sentait obligée de les écouter, d'entendre leur souffrance, de les partager. « Oh, non... » « S'il vous plaît madame, juste un peu d'eau » « non... » « Je vous en prie, de l'eau... » « Il est parti »... Tant de cris du cœur qui se mélangeaient dans cet endroit honni des dieux. Une jeune fille éclata en sanglot, reposant la main désormais froide de l'homme qui devait être son père. Une prêtresse le recouvrit d'une couverture terne et froide. Au fond d'elle-même, Meidosha se savait responsable de tout cela.

— Elle s'en remettra vite, prononça la voix douce, sans joie, de la prêtresse nommée Yuki.

Meidosha ne comprit pas tout de suite, son regard ancré à la silhouette que l'on devinait encore sous le voile gris.

— Dame ?

— Oh, Leisha soit bénie ! C'est elle, c'est bien elle !

Retenant ses sanglots, Meidosha avança parmi les blessés. Elle se sentait souillée, non pas de leur regard, mais du fait qu'elle ne les méritait pas.

— Dame Meidosha, émergea une voix plus âpre encore que les autres.

La jeune fille lui lança un regard triste. C'était un homme de faible carrure, presque un vieillard. Sa poitrine et son front tachés de sang ne laissaient pas le moindre doute. Il était à l'article de la mort, et il n'y avait rien qu'elle ne puisse faire. Il le savait.

— Dame... Vous êtes le soleil de mon crépuscule.

Sa voix devint chevrotante.

— Ma femme a été emprisonnée par les tojani, ça parce qu'un de mes fils a refusé de torturer un prisonnier suspecté d'être sympathisant Hu Wei... Mes quatre fils ont été emmenés à leur armée... Je n'ose imaginer ce qu'ils ont fait de mes filles.

Il sanglota.

— Mon fils aîné est mort lorsqu'ils l'ont forcé à tester la solidité d'un pont dans le Lao Pian... Il voulait être tailleur, comme moi... Il était même très doué. Ces tojani (Il prononça ce nom avec une profonde révulsion, comme s'il n'était que souillure sur ses lèvres.) ils doivent être anéantis...

D'autres voix approuvèrent.

— Mes trois enfants ont aussi été emportés...

— Mon époux... Tué devant sa boutique pour ne pas avoir salué un capitaine tojani.

Fleur de PrunierOù les histoires vivent. Découvrez maintenant