Let The Past Go // K.S.

CHAPITRE 11

KEN

Ça fait trois jours que Nina n'a pas quitté son ordinateur. Elle carbure au thé, mais elle ne dort plus. Quand on rentre elle ne dort pas, quand je suis pris d'insomnie, elle ne dort pas non plus, quand on se lève elle ne dort pas. Il est cinq heure du mat' et elle parle à son téléphone.

Nina : J'ai trouvé, Yohan. Je t'envoie tout ça. J'arrive cet après-midi.

Elle raccroche, et ferme son ordi dix minutes plus tard.

Moi : Ça va Nina ?

Elle me regarde et sourit. Elle a des cernes qui lui creusent le visage.

Moi : T'as pas dormi depuis combien de temps ?

Nina : C'était pour la bonne cause que je ne dormais pas, moi. Et toi ? T'as pas dormi depuis combien de temps ?

Moi : T'as pas répondu à ma question.

Elle soupire.

Nina : Trois jours.

Moi : Trente-six heures.

Nina : J'ai l'impression d'avoir du sable dans les yeux.

Elle se lève lentement en s'appuyant sur le balcon. Ces jambes flageolent et elle tombe à genoux.

Nina : Je sens plus mes jambes.

Moi : T'es restée trop longtemps assise. Aller viens je vais t'aider.

Je sais qu'elle veut pas qu'on la touche, mais je vais pas la laisser ramper jusqu'à son lit. Quand je passe mon bras le sien, elle se tend et ne peut retenir une grimace.

Moi : Ça te fait quoi quand quelqu'un te touche ?

Nina : Avant, c'était carrément une douleur, c'était insupportable. Maintenant... je sais pas... je panique, c'est tout.

Moi : Tu m'expliqueras pourquoi un jour ?

Nina : J'espère pas. Même ma sœur ne sait pas tout.

Moi : Tu n'as pas de raison de t'inquiéter. Je ne veux pas te faire de mal.

Nina : C'est bien ça le problème. Ils ne veulent pas te faire de mal, mais ils t'en font quand même et c'est jamais leur faute.

Moi : Mais de quoi tu parles ?

Nina : Des hommes en général.

Moi : C'est pas parce qu'un homme t'a fait du mal que tous les hommes t'en feront, Nina. Tu peux pas généraliser comme ça, on est pas tous les mêmes. Je ne sais pas ce que cet homme t'a fait, mais je sais que ça t'a traumatisée au point que tu refuses que des mains d'hommes te touchent. Mais tu comprends pas ce que ça veut dire ? Ça veut dire que le seul homme qui a pu te toucher, c'est celui qui t'a fait du mal. Et tu es prisonnière de ça.

Nina : Tu ne sais rien de ce que j'ai subi.

Elle s'assoit sur son lit et je suis debout devant elle.

Moi : Pas la peine d'être voyant pour le deviner. Tu ne supportes pas qu'on te touche, t'as été traumatisée. Tu as donc sûrement été agressée physiquement. A quel point ? J'en sais rien. Combien de temps, je ne sais pas non plus . Mais ce qui est sûr c'est que tu es prisonnière de cet homme. Parce que tu le laisses gagner en refusant que d'autres hommes passent après lui.

Nina : Qu'est-ce que tu es en train de dire ? Que je devrais baiser des hommes pour ne pas le laisser gagner ?

Moi : Non, je me suis mal exprimé, je...

Nina : J'ai très bien compris Ken, c'est bon. Casse-toi, maintenant, je suis fatiguée. J'ai passé trois jours à essayer de trouver des preuves pour faire couler l'homme qui m'a détruite.

Moi : Je voulais pas tu le comprennes comme ça, c'est pas ça que j'essayais de te dire, Nina.

Nina : Casse-toi, je dors.

Elle essuie ses yeux. Elle s'allonge sous sa couette et plonge sa tête dans son oreiller. Je m'assois sur le bord de son lit et passe la main sur son dos.

Nina : Ta main Ken putain.

Moi : J'ai raison et tu le sais. T'es prisonnière de ce mec.

Nina : Tu sais rien, donc tu peux pas comprendre et encore moins juger.

Moi : Bonne nuit Nina.

Je sors de sa chambre et vais dans la mienne. Je m'allonge dans mon lit et fixe la plafond. Que cache-t-elle ? Qu'a-t-elle subi ? Son visage cerné baigné de larmes et de souffrances hante mon esprit et m'empêche de trouver le sommeil.

Qui est Nina Thomson ?