Chapitre 16

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Uruha avait appelé Aoi la veille et l'avait prévenu qu'il retournait dans son ancien appartement pour permettre à Ruki de rentrer chez lui. Aoi avait essayé de le raisonner, de lui dire d'attendre encore un peu et que les choses s'arrangeraient. Mais Uruha en avait décidé ainsi ; Ruki méritait d'être au moins tranquille dans son chez-soi. C'était Uruha le soi-disant fautif, non pas Ruki. Il était donc logique que cela se passe de cette façon.
Uruha avait tout laissé chez Ruki, prenant juste le nécessaire pour quelques jours, espérant que s'il devait retourner chez Ruki ce ne serait que pour s'y réinstaller définitivement, et non pas venir chercher toutes ses affaires personnelles.

Le guitariste entra dans son appartement : il était vide. Seuls son lit et quelques misérables meubles étaient encore là, tout ce que Ruki avait notamment déjà chez lui.
Il faisait un froid élégiaque ; le chauffage étant coupé depuis plus d'une semaine. Il grelottait et observa son appartement. Il ne l'avait pas vendu pour nourrir l'impression qu'il vivait toujours seul et ainsi cacher sa relation avec Ruki.
L'appartement semblait totalement mort aux yeux d'Uruha.

Comme moi.

Un sentiment de néant le prit au plus profond de son esprit, ressassant tous ces instants qu'ils avaient passés ensemble avec Ruki, dans cet appartement, si heureux, si béats.
Puis il regarda le mur de sa chambre au fond du petit couloir en face de l'entrée et serra les poings, repensant à toutes les fois où Reita l'avait plaqué contre ce mur de lamentations pour lui faire mal. Il aurait d'ailleurs préféré qu'il le frappe à nouveau plutôt que de l'embrasser.

Tu as tellement bien réussi ton coup.

Le chaos s'agrandissait dans sa conscience, lui faisant affreusement mal. Il détestait cet endroit ; depuis que Ruki l'avait embrassé pour la première fois chez lui, il n'avait plus jamais supporté rentré ici. Il voulait constamment être chez son amour, jamais chez lui, afin d'échapper à Reita le plus possible, et de goûter au bonheur d'être avec son amant, même si ces moments semblaient toujours éphémères, brisés, saccagés, salis par l'horrible et démoniaque présence de Reita. Lui qui avait bêtement espéré qu'en vivant chez Ruki, il aurait enfin le droit de croire au bonheur opulent et non fugace...
Ses doigts étaient glacés, tournant au violet, tenant faiblement son sac ; il n'osait pas bouger. Il ne voulait pas croire qu'il était de nouveau ici, dans son appartement, en enfer.

Il entendit la porte grincer derrière lui. Dieu seul sait qu'il était paralysé comme une statue de pierre. L'heure avait sonné. Le malheur revint s'abattre sur lui. Et finalement, il se retourna doucement. Ses os craquelèrent. Ses yeux s'agrandir de stupeur en distinguant la silhouette élancée de Reita. Le démon.

« Qu'est-ce que tu fais ici...? balbutia-t-il.
- Tu n'étais pas chez Ruki ; j'en ai déduis que tu étais revenu ici. »

Reita contempla l'appartement vide avant d'ajouter :

« J'aime bien cet endroit.
- Tu as réussi ce que tu voulais ? Tu peux me lâcher maintenant ! »

Reita hocha la tête de droite à gauche puis s'approcha d'Uruha.

« J'en n'ai pas fini avec TOI, insista-t-il.
- Qu'est-ce que tu veux de plus ?! Tu m'as détruit, tu as détruit tout ce que j'avais construit avec Ruki, n'est-ce pas suffisant ?! s'emporta Uruha, dépité.
- Bien sûr que non ce n'est pas suffisant. Certes je suis heureux que Ruki ait enfin ouvert les yeux sur toi...
- Ouvert les yeux sur moi ?! le coupa Uruha, ouvert les yeux sur quoi ? C'est toi le taré ! Tout est de TA faute !
- Si tu étais si digne de confiance, pourquoi Ruki ne t'a pas déjà pardonné ?
- Je... »

Il fut pris, encore une fois, au dépourvu. Reita connaissait par cœur la moindre de ses traitres faiblesses.

C'est faux. Ruki sait que je n'aime que lui !

Vivre ou Survivre ?Where stories live. Discover now