Chapitre 6 : "Nothing more contagious than laughter"

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Jérôme empoigna une énorme mèche de cheveux d'Annie et tira sa tête en arrière, pointant son arme sur elle.

- Quelle jolie petite gorge nous avons là... prête à être étouffée... ou prête à éclater de rire !

- Tire espèce de taré, répondit-elle difficilement, en essayant de se placer de sorte à moins sentir la pression douloureuse sur son crâne.

Jérôme rit à gorge déployée comme un fou rigolerait en voyant sa propre blessure.

- Elle n'a pas peur ! S'écria-t-il. Intéressant...

Il tira un peu plus ses cheveux en arrière et se colla à elle intimement, comme deux amants le feraient avant l'amour.

- De quoi as-tu peur alors, Beauté ? Des araignées ? Des souris, peut-être ?

Il approcha ses lèvres de sa peau chaude, et souffla dessus :

- Non, laisse moi deviner... tu as peur des hommes ?

- J'ai peur de rien, espèce de salop.

- Ah non, ne m'insulte pas ! C'est toujours pareil avec les filles ! Se plaignit-il en se détachant soudainement d'elle. On les bouge un peu, et elles nous insultent ! Mais qu'elles rient ou qu'elles pleurent, elles finissent toujours au même endroit, de leur plein gré ou de force. Tu sais où elles finissent, les filles ? Demanda-t-il à Annie.

Du sang coulant sur le coin de sa bouche, la poitrine tambourinante, les cheveux en bataille et les jambes tremblantes sous le poids de la peur, elle n'avait pas la force de répondre.

- Elles finissent à la morgue ! Dit-il en criant presque, dans un élan de folie et de rire qui ne semblait jamais le quitter. Mais je ne peux pas te tuer pour l'instant, tu sais, tu es la seule chose pour laquelle les flics dehors ne nous ont pas encore fait exploser.

Il se détourna et claqua son dos contre le mur en se laissant glisser sur le sol. Les mains entre les genoux, on aurait pu croire que c'était un enfant, s'il ne tenait pas l'arme, et qu'il n'avait pas eu ce rictus angoissant.

- Assieds-toi, dit-il.

Annie ne bougea pas. Il leva l'arme vers elle :

- Assieds-toi.

Elle ferma ses yeux furtivement et se laissa tomber sur le sol rugueux. Elle avait eu de la chance, durant tout son séjour dans la rue. Elle avait volé, s'était même battue, rien ne lui était arrivé. Elle pensa à Cat quelques secondes, et regarda discrètement autour d'elle pour essayer de dénicher son ombre, mais il n'y avait rien.

- Tu trouves pas ça bizarre la vie, toi ? Dit Jérôme en coupant le fil de ses pensées.

Elle ne répondit pas.

- La vie est bizarre. Il y a toi, y a moi. Toi, t'as rien demandé, et pourtant t'es là. Moi, je suis là, en train de te demander ce que tu penses de la vie, et tu ne peux pas y penser, parce que tu penses seulement à ta survie. Voire à ta mort. Je te fais peur, hein ? Apparemment, je suis un psychopathe ou un schizophrène, sans empathie. Mais ils ne sont pas trop surs. T'en pense quoi, toi ?

- Tu es peut-être les deux, osa-t-elle répondre.

Jérôme rigola maladivement, posa sa tête contre le mur et la tourna vers elle.

- T'as vraiment peur de rien, toi ! Tu me plais ! J'hésiterais presque à te tuer, dit-il en montant négligemment son arme vers elle.

Le silence se fit alors. Annie sentait son cœur palpiter dans sa poitrine, et l'adrénaline commençait à se dissiper. Les larmes étaient sur le point de s'écouler des yeux rougis de la jeune femme. Elle renifla une fois, sans pouvoir se retenir.

Le Temps de la Nuit (Jerome Valeska) Where stories live. Discover now