La petite larve fébrile . 13

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Paye-moi une caisse . 13

" Parce que tu m'auras quitté une fois que tu auras de la thune "















« Je me suis réveillé à 03 h 02 aujourd'hui. Je le sais parce que j'ai tout de suite regardé mon portable, par réflexe et il était exactement 03 h 02.

Les paupières lourdes presque autant que ma tête qui transporte des dizaines de milliers de réflexions, j'ai pensé à me rendormir, mais là, mon cerveau m'a chuchoté qu'il voulait qu'on parle un peu.

Alors j'ai essayé de lui faire comprendre que j'étais lessivé pis que chaque matin, c'était la même chanson, il me réveillait pour discuter et à la longue, j'allais vraiment finir par définitivement vriller à l'écouter me radoter les mêmes merdes à propos de nous. Je crois qu'il ne m'a pas entendu ou qu'il a simplement refusé de m'écouter parce qu'après ça, il s'est mis à parler trop vite, trop fort et en boucle. Je crois qu'il stresse, mais je n'en suis pas certain parce qu'il ne le dit jamais vraiment. Je crois qu'il flippe un peu plus que les autres jours et moi, je suis impuissant.

À part l'écouter et me sentir comme pris en otage alors que je rêve de dormir, je ne peux pas vraiment l'aider, mais surtout parce que même moi, je n'y comprends rien. Un charabia ou chaque fin de phrases fait résonner au fond de moi en écho, ses terreurs devant des tas de choses qu'il trouve incohérent autour de nous.

04 h 00

La fatigue est là, mais je sens que ma nuit est décidément finie puisque le sommeil vient de s'en aller, excédé d'attendre que mon cerveau arrête de tourner aussi vite puis qu'il se taise enfin. Moi, je n'ai pas le luxe de m'enfuir quand il est comme ça alors je subis en sachant que j'aurai vraiment du dormir un peu ces derniers temps, voire même ces dernières années.

Je tourne la tête et dans la pénombre, je devine combien la nuit de Benjamin doit être douce et je me surprends à envier la sérénité qui émane de son sommeil.

J'envie ceux qui dorment la nuit parce que moi, je reste éveillé à compter des moutons à l'infini. Interdit de m'évader et les rares fois où je réussis à fermer les yeux, les cauchemars me suivent jusque dans mon sommeil. Je suis un gardien de phare et mon cerveau est l'esprit coincé dans ce putain d'endroit puis qui ne parvient pas à rejoindre l'au-delà. Juste un gardien et je voudrais pouvoir un peu dormir, juste un peu avant de reprendre mon poste.

Les conversations nocturnes avec mon cerveau, je les vois comme ces disputes de couples interminables ou l'un se tait tandis que l'autre déverse toute sa frustration avec la triste conscience que rien ne va changer en définitif.

Un peu comme nos disputes avec Fred quand on était ensemble.

Tiens !

Maintenant, il me parle de Fred.

Dans le fond, mon cerveau n'en a rien à faire de savoir si je l'aimais ou non. Mon cerveau me reproche de ne pas avoir été stratégique et avoir sciemment choisi de fuir le confort d'être aimé pour une errance amoureuse sans issue. Et à qu'à cause de mes conneries avec Fred, maintenant, il se sent en insécurité sans une personne qui nous aime comme ce garçon l'a fait.

Alors à la manière d'un gosse qui se fait sermonner, je le laisse s'étendre dans ses élucubrations. Peut-être qu'il a raison et en fin de compte, je ne suis qu'une merde qui a raté sa vie en beauté. Je crois en toute humilité que s'il fallait rendre le prix de la plus grosse déception de ce siècle, je serai en lice et je pourrais même le gagner.

Une libellule sur un roseau.Where stories live. Discover now