Chapitre 34

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Le vendredi soir, nous arrivons à Paimpont juste à temps pour le dîner. La ville n'est pas aussi simple d'accès que Saint-Malo. Après un voyage en TGV jusqu'à Rennes, nous avons dû enchaîner un trajet en TER, puis en bus. S'en est suivie une petite marche à travers la forêt, car le village des fées est situé à l'écart de l'agglomération humaine.

Je suis soulagé en voyant enfin les premières habitations. Nous passons tant de temps chez Grand-mère que la maison de Paimpont est un peu notre deuxième foyer. Nous y avons même deux chambres qui nous sont réservées, une pour Morgane et moi, et une autre, plus grande, que Maman partage avec mes deux autres sœurs.

Je prends une grande inspiration en entrant dans le village, accueilli par une odeur d'épices, de fleurs séchées et de mousse fraîche. Même si je n'y suis pas toujours très à mon aise, j'adore cet endroit qui est, avec le lycée, l'un des seuls où nous pouvons être nous-mêmes, car seules des fées habitent ici et des ensorcellements nous protègent des regards indiscrets des humains.

Les maisons en bois s'élèvent çà et là, sans ordre apparent, en harmonie au milieu de chênes plusieurs fois centenaires. Leurs structures sont constituées de troncs d'arbres et de fines branches entrelacées qui donnent l'impression que les habitations ont poussé naturellement du sol. Des plantes grimpantes serpentent autour des cadres des fenêtres et les dernières lueurs du soleil couchant font briller les vitres. Les toits sont recouverts de chaume doré agrémenté de touffes de mousse vert vif. Des fleurs sauvages poussent dans les endroits les plus ensoleillés.

Chaque maison dispose de son propre jardinet. Tous sont remplis de plantes aux couleurs vives de tailles trop imposantes pour avoir poussé sans un soupçon de magie. Sur ma droite, un pommier croule sous une montagne de grosses pommes rouges.

Nous passons devant plusieurs boutiques proposant des objets magiques, des potions ou des créations artisanales. Peut-être que je serai moi aussi capable d'en fabriquer à la fin de mes études. Si je survis jusque-là. Nous apercevons dans l'une d'entre elles Maéline le Goedec en train de faire quelques emplettes. Elle m'ignore et adresse un signe de tête assez sec avec Morgane.

Les murmures de la nature résonnent avec les bavardages qui s'échappent des habitations. Le sol est recouvert d'un tapis de feuilles d'or, d'ambre et de rubis tombées des arbres qui bruissent sous nos pas.

Une ambiance de fête perpétuelle règne comme d'habitude sur les lieux, car mes semblables adorent l'agitation. Deux petites fées nous bousculent en gloussant. L'une d'entre elles déploie ses ailes de libellule et continue sa course dans les airs.

Morgane hoche la tête avec approbation.

— Une rapide, celle-ci, commente-t-elle. Presque autant que moi à son âge.

La maison de Grand-mère est située sur la place centrale et est la plus grande et la plus décorée des environs. Son entrée est protégé par un porche en bois sculpté soutenu par des colonnes ornées d'entrelacs de feuilles et de fleurs. Une vigne vierge s'enroule autour des poutres de soutien.

Mélusine, qui devait nous avoir guetté depuis la fenêtre, sort comme une bombe.

— Vivien ! Morgane !

Maman la suit de près et nous atteint la première. Elle nous serre longuement dans ses bras, comme si elle ne nous avait pas vus depuis des années.

— Comme vous m'avez manqué, mes petits ! renifle-t-elle. C'est moi, ou tu as pris un centimètre, Vivien ?

Je roule des yeux.

— C'est toi. Je ne peux pas avoir grandi si vite en quelques jours.

Même si j'aimerais bien. Si seulement je pouvais un jour dépasser Morgane, même d'un millimètre ou deux ! Et puis, ce serait plus simple pour embrasser Auguste.

Le lycée des Surnaturels (bxb)Kde žijí příběhy. Začni objevovat