Chapitre 24

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Je suis réveillé le lundi matin par le vacarme de la pluie qui frappe avec détermination contre la fenêtre de notre chambre.

Ploc ploc.

J'entrouvre les rideaux d'un geste sec. Les gouttes s'abattent contre la vitre sur laquelle elles glissent à toute allure. Le ciel que l'on aperçoit à peine est d'un gris sombre qui ne laisse pas la moindre place au bleu. L'été semble s'en être allé pour de bon, emporté par ce déluge.

J'entends un grognement sur ma droite.

— Fichu temps, marmonne Jérémie depuis son lit, le visage renfrogné. Déjà que j'ai horreur des lundis...

Mon colocataire semble s'être à nouveau passé de sa baignade quotidienne, peut-être parce que la douche qui nous attend dehors ne la rend pas nécessaire.

— Tu n'aimes pas la pluie ? Je pensais que les tritons raffolaient de l'humidité.

Jérémie repousse sa couverture en ronchonnant.

— Nous raffolons de l'eau, pas de l'humidité. Personne n'aime la pluie.

Je balance les manuels dont j'aurai besoin dans mon sac.

— Ma sœur Mélusine si. Elle est liée à l'eau et la moindre goutte la surexcite. Elle saute comme une cinglée dans toutes les flaques qu'elle voit. Mieux vaut ne pas être à côté d'elle dans ces moments-là.

Je frissonne rien qu'à cette idée.

Jérémie ouvre la porte du bâtiment et nous passons la tête pour examiner la situation. La pluie d'ici n'a rien à voir avec celle de Saint-Malo. En Bretagne, il pleut tout le temps, certes, mais d'une façon beaucoup plus diffuse. Ces gouttes-là sont énormes et mettent de l'eau partout en s'écrasant lourdement sur le sol.

— Dans ces jours-là, mieux vaut rester au lit, grommelle mon coloc, décidément de mauvais poil, sans doute parce qu'il n'a pas eu sa trempette quotidienne.

Nous courrons pour traverser la cour. Lorsque nous atteignons le gymnase dans lequel nous pouvons nous mettre à l'abri, j'ai les chaussettes trempées et Jérémie a le visage couvert d'écailles vertes. Les tritons prennent leur forme aquatique au contact de l'eau. Oh, certes, il faudrait plus que quelques gouttes pour qu'il se transforme intégralement, et heureusement, car je ne sais pas comment mon colocataire s'y serait pris s'il s'était soudain transformé à moitié en gros poisson au beau milieu de la cour du lycée. J'aurais sans doute dû le traîner pour le jeter dans la première flaque un tant soit peu profonde venue.

C'est la première fois que j'entre dans le gymnase qui est le bâtiment le plus moderne du lycée, avec sa structure alliant le verre et le métal. Une odeur de chlore flotte dans les airs à cause de la présence de la piscine olympique intérieure utilisée par les tritons.

— Tu suis quel cours de sport ? je lui demande en épongeant ma veste.

Jérémie fait la grimace.

— La nage synchronisée, finit-il par lâcher avec peu d'enthousiasme. Comme tous les tritons.

— Ça n'a pas l'air de t'enthousiasmer...

Il pousse un profond soupir.

— Je suis nul en nage synchronisée, admet-il. Je ne suis pas gracieux du tout. Et je n'arrive jamais à lever les bras en même temps que tout le monde. Je passe mon temps à me faire enguirlander parce que je ne suis pas le rythme.

Je ressens soudain un élan de sympathie pour lui. Après tout, il faut se serrer les coudes, entre nuls.

— Si ça peut te consoler, je lui dis, je serai certainement aussi le moins bon de mon cours d'endurance.

Le lycée des Surnaturels (bxb)Where stories live. Discover now