Fuir.

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Il m'a brisé le cœur. Je me pense stupide. Stupide de croire désormais que je pourrais trouver l'apaisement auprès de celui qui m'a blessé.

J'ai l'impression, petite âme que je suis, éternellement prise par un désespoir immense, d'être face à lui. Lui, gigantesque montagne que ni le sel de mes larmes, ni le souffle de mes soupirs, n'érode. Je me tiens face à lui, en joignant les mains et tenant à l'intérieur mon cœur. Mon cœur blessé, lézardé d'un côté droit ou gauche, ensanglanté. Mon cœur qu'il a écrasé entre ses mains d'Hercule, qu'il a lacéré de mignonnes petites entailles, qu'il a regardé se crever, saigner, puis agoniser. J'ai l'impression de tenir ce cœur entre mes mains et de lui présenter. Je me vois les joues rouges, le nez dégoulinant de larmes et le regard injecté de sang. Je me vois la poitrine vibrante sous l'écho de mes pleurs, les épaules tressautantes emportées par l'onde de mes sanglots et les jambes chevrotantes sous le poids de mon propre malaise. Je me vois face à lui, le visage déformé par une tristesse devenue démence, la peau mouillée et flétrie comme une pomme sèche. Je me vois face à lui, présentant dans mes mains ce cœur qu'il a blessé et lui demandant, dans un souffle qui n'est à peine ma respiration, dans un murmure qui n'est à peine ma voix, dans un écho solennel qui n'est à peine audible, lui suppliant d'accepter de guérir mon cœur.

Seulement, comment pourrait-il et comment pourrais-je croire ? Quelle sotte, quelle erreur, quelle bêtise ! Comment croire que celui qui vous a blessé peut vous guérir ? Suis-je un être ridicule, idiot, incapable de raisonner ? Les gens fuient, courent et cherchent asile en approchant du danger, moi ! moi, je crois trouver un refuge auprès du danger. J'ai l'air d'un agneau embrassant un loup puis, se plaignant de s'être fait mordre. Je dois apprendre à fuir. A fuir de lui.

Cœur briséOù les histoires vivent. Découvrez maintenant