o ... Chapitre huit ... o

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"Stasis" - BarbWalters

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Planète Hinode,

J'ai bien dû avouer que regarder l'elfe manger avec des baguettes était tout de même drôle. Il avait presque dix-sept mille ans et sa pratique laissait à désirer. Certes Hinode n'était pas une planète comme les autres, reculée, protégée, délicate et paisible, mais tout de même en cent soixante-neuf siècles... Il discutait avec mon père de tout et de rien comme si le temps ne s'était pas écoulé. Mon père était ainsi, à ne jamais juger les gens qu'il rencontrait, les prenant comme ils étaient, c'était l'aspect que je préférais chez lui. Ma mère demeurait silencieuse, regardant le nouveau venu du coin de l'œil. Je savais bien qu'elle se retenait, mais elle était trop aimable et bien élevée pour dire quoi que ce soit. Elle s'était levée, passant une main sur le bras de mon père comme pour lui faire passer un message silencieux. Elle venait de s'enfuir, mais la connaissant, elle n'aurait certainement pas pu retenir ses larmes, ou encore, ces réprimandes, alors que la conversation allait dévier sur le sujet qui nous fâchait tous. Mon père lui fit un doux sourire et elle partit en nous laissant tous les trois avec le saké qui délie les langues.

Après un soupir, un long silence, un visage gêné et un verre de plus, c'est mon père qui attaqua le premier.

- Alors comme ça ma fille va devenir ton Archive, lança-t-il en posant son verre.

L'elfe détourna le regard comme répugné par ses mots et c'est ainsi que j'ai compris que lui aussi était loin d'être ravi.

- Je ne voulais pas d'Archive ... J'aurai largement préféré la mort.

- Tu n'as pas à te justifier Legolas, c'est comme ça c'est tout. Nous connaissons tous les enjeux de l'archivage, ses bienfaits, tout comme ses aspects négatifs.

Tout en écoutant mon père, il passa une main sur son visage, semblant mal à l'aise au-delà du possible... Je l'avais trouvé incroyablement émotif pour un elfe à cet instant et quelque part ça me rassurait sans même vouloir me l'avouer.

- Je ne sais pas quoi te dire Lucien... Je suis désolé...

- Nous ne pouvons pas déroger à la règle, tu le sais très bien. Tu n'as pas le choix, tu es le fils du roi Thranduil.

- Oui et ce titre n'a jamais été plus dur à porter que ces derniers mois.

- Pourquoi ne souhaitais-tu pas d'Archive ? demanda mon père.

Il sembla hésitant, mais la question m'importait à moi aussi.

- Je veux juste être en paix... J'ai assez vécu... J'ai vu tant de morts, tant de guerres. Je suis fatigué de me battre et même de vivre. Si le Grand Mal m'a appelé c'est que mon heure est venue.

- Ta mémoire est importante, tu le sais très bien...

L'elfe sembla le jauger un instant, fronçant les sourcils à sa remarque sans que je ne sache pourquoi. Mon père poussa un soupir en prenant un Xième verre.

- Laureline, que penses-tu de tout ça ?

J'ai rougi un instant, mais il n'avait pas tort, c'était à moi de parler... Je voyais bien où il voulait en venir. Mon père avait toujours été sage et là, il souhaitait juste nous faire avouer, l'un après l'autre, ce que l'on était incapable de se dire... Pas bête le vieux... J'ai posé mes yeux sur l'Amiral en essayant de trouver le courage en lisant les traits fuyant.

- J'ai peur de perdre celle que je suis aujourd'hui, dis-je.

- Que veux-tu dire ? demanda mon père.

- J'ai peur de devenir quelqu'un d'autre... Que mon esprit ne passe pas dans mon nouveau corps, de perdre ma personnalité, mon essence... De perdre mon âme...

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