CHAPITRE 12 : FUMER TUE

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EVA

Flashback de la fuite, quelques jours auparavant

Fuir. Voilà le mot qui ne cessait de résonner dans ma tête depuis qu'on était sortis de cette boîte, Alessio et moi. Lui était sobre, moi aussi. Je voulais à tout prix conserver toute ma clairvoyance et ma lucidité pour mettre au point un plan solide, sur lequel je pouvais me reposer. Voilà pourquoi je n'avais pas bu.

Il s'agit sans-doute de la première fois où je sors sobre d'une boîte, sans chanter des chansons de Disney en titubant, accrochée aux bras de Rossella, qui, quant à elle, résiste toujours à l'alcool et reste toujours sobre pour me porter au retour.

Ces souvenirs me font sourire.  Je rive mes yeux sur les maisons calmes qui passent par la fenêtre de la Lamborghini d'Alessio, qui roule depuis maintenant une bonne vingtaine de minutes.

Alessio, quant à lui, pue la clope à plein nez, mais tient le volant, sur la route du retour, les yeux rivés sur les courbes des rues, illuminées par des lampadaires à lumière jaunâtre. Il ne dit rien, et j'admire une telle concentration après une soirée mouvementée ; certes il n'a pas bu, mais les strip-tease et les clubs vip auraient du l'embrouiller dans ses idées. Il reste néanmoins d'un calme presque illusoire, les traits encore frais et les yeux encore pétillants.                                          Un tel professionnalisme, c'est admirable, il faut le reconnaître.

Cette soirée était très agréable. J'ai pu très vite retrouver un de mes contacts, Andrea Poticinali, un allié très friand de ce type de boîtes. Je l'ai remarqué avec une belle strip-teaseuse par son tatouage des plus originaux ; une grande rose noire sur le bras gauche. J'ai finis devant son champ de vision, afin qu'il me voit. Lui m'a reconnue immédiatement, s'est levé, abandonnant les mains de sa belle, et m'a rejoins, d'un pas assez détendu. Il savait très bien ce que je faisais là, et pourquoi j'étais seule, sans-doute parce que Enzo avait informé toute la clique qu'il fallait me retrouver et me permettre de m'enfuir. Nous avons échangés des brefs regards, et j'ai engagé la conversation, pressée.

Je lui ai demandé de venir me chercher en bagnole à trois heures du matin tapantes dans la rue Vinci, à côté de la villa de Demetrio, sans personne et sans prévenir qui que ce soit, de me fournir un billet de cinquante balles, un téléphone, et de me déposer au motel le plus proche, et ce dès ce soir.

Étrangement, il n'a rien dit. Il a laissé planer le silence une bonne dizaine de secondes avant de me dire qu'il allait le faire que si je valorisais sa petite organisation au près d'Enzo, et ce jusqu'à que la mort les sépare. Je sentais qu'il était très sérieux, et j'acceptais sans rien dire.

C'était sans doute le pacte le plus rapide de toute mon existence. Et je me suis dépêchée de le laisser avant qu'Alessio ne s'en aperçoive, emportée par la musique dans laquelle je baignais depuis le début de la soirée. Même si l'autre avait refusé, je pouvais toujours trouver une autre solution, mais ce mec là était une valeur sûre.

Je sors de mes souvenirs et entends qu'on me parle. J'aperçois le gigantesque portail de la villa de Demetrio devant moi, les grands palmiers, au loin la plage privée, et sens les yeux d'Alessio sur moi.

— Eva ?

— Hm ?

— On est arrivés. Descends.

Je détache ma ceinture, ouvre la portière et sors, posant mes pieds sur les graviers du sol. Je sors doucement parce que je vois qu'il est tendu. Nous pénétrons le bâtiment, moi d'abord, et lui derrière. Les gardes nous saluent, et je regagne aussitôt ma chambre, refusant de manger quoique ce soit, prétextant << être fatiguée >>. Il n'a rien dit, sauf un petit << bonne nuit >>, s'est posé sur le canapé et a allumé la télé, un bol de chocapic à la main droite, la télécommande à l'autre main.

EVAWhere stories live. Discover now