Chapitre 3-1

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Pira


Avec le retour au calme, l'académie baignait dans une ambiance tendue. L'absence d'Arutha et l'arrivée imminente de la flotte menée par Luvo laissaient planer une ombre sinistre sur Pira. Même le départ de l'empereur et de ses fils, même l'extermination des Errants, n'arrivaient pas à dissiper le sentiment inquiétant qui serrait le coeur de chacun.

Gardes et Piriens avaient travaillé côte à côte toute la journée, déblayant les carcasses et les entassant sur la place. Une monstrueuse colonne de fumée s'élevait dans le ciel. Des centaines de corps brûlaient, leurs chairs carbonisées devenant cendres sous l'action des Syyrs du mouvement. L'odeur de la mort hantait le plateau entier. Le charnier attirait déjà mouches et charognards en tout genre. Il faudrait encore de nombreux jours avant que le centre-ville de Pira ne reprenne vie.

Les équipes se relayaient, mais le travail était monumental. Tandis que ceux qui le pouvaient regagnaient leurs quartiers pour profiter du répit qu'ils avaient encore, Elio suivit Astre jusqu'à la prairie qui bordait l'académie. L'apprentie marchait de long en large en son milieu, perdue dans ses pensées. Achéon et Palie se tenaient en retrait à quelques mètres de là. Le chef de la garde les rejoignit, laissant son roi seul avec l'apprentie.

Elio observa Lianne quelques secondes, constatant combien les épreuves de ces derniers jours l'avaient changée. Elle avait mûri. Il souffla et se dirigea vers elle. Arrivé à son niveau, il s'assit dans l'herbe, puis ferma les yeux en se laissant aller en arrière. Cela n'était pas le comportement d'un roi, mais l'homme était las, fatigué et, après cette journée interminable, il voulait apprécier la caresse du soleil ne serait-ce qu'un instant. Les Dieux seuls savaient s'il pourrait le refaire avant longtemps.

Choquée, Lianne s'arrêta net et porta toute son attention sur le souverain. D'une main, il lui fit signe de s'asseoir à ses côtés, et la jeune femme obtempéra avec circonspection. L'herbe fraîche offrait un contraste saisissant avec la chaleur de cette fin d'après-midi. Un long soupir lui échappa avant qu'elle pût s'en empêcher et elle abaissa sa main pour caresser le tapis verdoyant.

— Tu ne peux pas partir après lui, Lianne.
— Je sais.

Sa réponse fut plus sèche qu'elle n'en avait l'intention. Elle eut un regard contrit vers le roi. Elle avait dû admettre qu'elle ne pourrait pas quitter Pira, du moins pas sans réfléchir. Après les menaces proférées par l'empereur, il aurait été égoïste de faire courir un tel risque à la population. Cependant, même si elle l'avait accepté, le sentiment d'impuissance qu'elle ressentait était difficile à supporter, et lui donnait l'impression d'être comme un lion en cage.

— Je ne peux rien faire pour l'aider, s'excusa-t-elle, et sa voix exprimait le déchirement qu'elle ressentait.

Sous sa veste, le corps d'Hairi remua légèrement. Sa caresse, douce et chaude, l'apaisa un peu.

— Mais je peux le faire, admit Elio. Cependant, il faudra t'armer de patience.

Le roi soupira sous le regard de Lianne. Il savait les difficultés supplémentaires que cela représenterait, cependant après tout ce qu'Arutha avait fait pour eux, il ne pouvait se résoudre à le laisser aux mains de l'empereur.

— Avant toute chose, je vais devoir m'assurer de conserver la couronne de mon père. Ensuite, je ferai ce qu'il faut pour sortir Arutha des griffes de l'empire.

Il souffla, avant de poursuivre, regardant Lianne dans les yeux.

— Me soutiendras-tu ?

La jeune femme lui rendit son regard. Elle inclina respectueusement la tête.

— Que puis-je faire pour vous ? demanda-t-elle.

Soulagé, Elio se détendit légèrement. Il massa sa nuque raidie par la fatigue.

— Continue ce que tu faisais : chasse les Errants, protège Eruvia... Garde Caliera secrète jusqu'à ce que je te le dise.

Lianne répondit au regard en coin du roi par une grimace amère.

— Je l'avais compris, maugréa-t-elle.

Elle n'en était pas ravie, mais l'agacement qu'elle avait ressenti auparavant s'était dissipé. Elle savait que les enjeux étaient plus grands qu'elle.

— Quant au reste, continua Elio, à partir de maintenant, tu es dorénavant pupille du roi, et sous ma protection. Si quiconque te donne du fil à retordre, utilise mon nom.

La jeune femme haussa les sourcils en recevant le fin bracelet argenté que lui tendit le monarque.

— Voici ton ID. Elle aurait dû t'être remise à ta première mission hors de Pira, mais je veux que tu puisses l'utiliser en cas de besoin. Syla t'expliquera en détail comment faire.

Syla... Lubéon et Gaal accompagneraient donc Elio. Ce qui voulait dire que Lullana serait certainement du voyage. Astre ne quitterait pas son roi, donc Espérion partirait aussi. Elle sentit sa poitrine s'alourdir et chassa ce sentiment en se concentrant sur les paroles du jeune monarque.

— ...Tu n'auras de comptes à rendre qu'à moi. Dans quelques temps, je t'enverrai des personnes... Tu auras alors une décision à prendre.

Sous ses directives, elle referma le bracelet de métal sur son poignet, et le vit clignoter deux fois. Il ne pourrait plus s'ouvrir à présent. Elio se leva, laissant Lianne réfléchir à ses paroles, puis fit signe à Astre avant de se diriger vers ses appartements. Il vit avec étonnement Achéon et Palie accompagner le chef de la garde, et s'arrêta pour les attendre. Arrivé à leur hauteur, Achéon parla sans détour.

— Comptez-vous les suivre ?



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Les Errants ont été repoussés, mais Luvo arrive...

Comment va faire Elio à ton avis ?

Psssst : j'en profite pour rappeler que tu lis ici le manuscrit brut, encore non corrigé par un professionnel. Merci pour ta compréhension s'il reste des erreurs. N'hésite pas à me les signaler, que je puisse les corriger ! 😉


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[Sous contrat d'édition] Les Syyrs - Tome 3 - La révélation de l'OracleWhere stories live. Discover now