VI. Stupide utopie

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Kazuko

Après cela nous avançons dans les couloirs du musée, découvrant l'exposition désertée par les héros préférant danser dans la salle principale. Ce sont des peintures d'un autre temps représentant pour la plupart des paysages. Le bruit de nos pas glissant sur le parquet lustré résonne dans les halls vides. Nous nous arrêtons devant chaque tableau comme pour en percer les mystères inviolables. Nous ne parlons pas, profitant d'un silence parfois troublé par la musique lointaine.

Au bout d'un moment, j'essaie de prendre sa main avec toute la subtilité dont je suis capable. Mon coeur bat à tout rompre, je crains qu'il s'écarte. Il entrelace ses doigts aux miens alors que nous contemplons une oeuvre représentant des montagnes couronnées de brume. Je me détends, soulagée d'avoir été prise en compte. Il n'a pas enlevé son masque, prudent. Tout son être dégage une sérénité communicative. Je pose la tête contre son épaule, apaisée.

- Tu es fatiguée ? suppose-t-il.

- Non, juste heureuse.

Je me rends aussitôt compte de ce que je viens de dire. Un vilain et un héros ne devraient pas se tenir aussi proches l'un de l'autre. Encore moins admirer une exposition d'art ensemble.

- C'est mal, murmurai-je. Ce que nous faisons va à l'encontre de la loi.

- Alors viens avec moi.

Je lève la tête, surprise. Il me regarde déjà. La question me brûle les lèvres, je ne peux m'empêcher de la lancer.

- Pour aller où ? demandai-je.

- À la LOV, répond-il.

Un élan de panique me prend au coeur, je secoue vigoureusement la tête.

- Je ne peux pas faire ça ! m'exclamai-je. Ce n'est pas bien du tout !

Il me jette un coup d'oeil perçant, je me tais.

- Pardon, je ne voulais pas t'offenser, m'excusai-je. Mais c'est impossible, je ne peux pas trahir ma promesse.

- Quelle promesse ? s'intéresse-t-il.

Je souris doucement.

- Une amie m'a fait promettre de ne jamais laisser tomber mes rêves. C'est à ce moment que j'ai réalisé que l'héroïsme serait ma vocation. Je dois soulager la souffrance des autres, puisque c'est la seule chose dont je suis capable, ajoutai-je pour moi-même.

S'abaissant à ma hauteur après avoir ôté son masque noir, il me dévisage intensément.

- Et qui s'occupera de ta douleur, si tu prends tout sur toi ?

Je reste silencieuse un instant, stupéfaite. Puis je souris, attendrie.

- Je ne souffre pas, alors je peux bien...

- Ce monde est trop cruel pour que tu sois aussi gentille, petite souris, me coupe-t-il de sa voix rauque.

Nos visages sont proches, je sens son souffle sur mes lèvres. De petits feux d'artifice explosent dans mon ventre et ma poitrine, mon entre-jambe s'humidifie rien qu'à sa proximité. Ce sentiment est irrationnel, viscéral et totalement incontrôlable. Je n'arrive pas à détourner les yeux de ses lèvres, repensant à notre étreinte de la veille. Il ne m'a pas embrassée. Et j'aimerais qu'il le fasse.

- Tu... Tu peux... bégayai-je.

Il incline la tête pour me signifier que j'ai toute son attention, m'encourageant à continuer. Les battements de mon coeur accélèrent tant et si bien que j'ai l'impression qu'il va jaillir de ma poitrine. Il me prend par la taille, regagnant son sourire narquois.

Chute d'étoile {Dabi x OC}Where stories live. Discover now