Prince et Dragon - Tome 1 : Ixen [EDITE sélection neovel]

Ombres féroces - partie 3 (VERSION 2)

Andras hurla son nom, alors que le jeune homme se protégeait de ses bras nus. L'animal à la tête de loup y planta ses crocs dans une gerbe de sang, avant que je n'aie le temps de réagir.

L'angle de vue était mauvais si loin du sommet !

Je ne pouvais user de ma magie destructrice sans risquer de blesser Erich et Andras. Et ces satanées vouivres qui filèrent la queue entre les pattes... sans la contrainte de leur chevaucheur, elles étaient toujours aussi lâches que dans mes souvenirs !

— Erich ! grondai-je. Ta hache !

D'un claquement de doigts, je ne trouvai d'autre solution que d'armer mon protégé. La lame de sa hache lourde apparut à un pas de lui et s'enfonça dans la terre.

Surprise, la créature canine recula d'un bond. J'en profitai pour envelopper le corps d'Erich dans son armure en écailles de dragon. Elle avait coulé avec notre vieux navire, mais rien que je ne pouvais invoquer de quelques mots en ancien langage.

Avec l'aisance d'un bretteur expérimenté, Erich réagit au quart de tour. Il empoigna la hampe de sa hache et traça de sa lame une ligne mortelle vers la bête qui attaquait à nouveau. Fort de vouloir défendre le jeune garçon, il décapita son adversaire d'un simple coup. Je trouvai sa barbarie un poil exagérée en présence de l'enfant... mais je compris rapidement son empressement alors que deux autres bêtes le menaçaient.

— Bon sang ! grogna le guerrier askazien. Que font ces barghests si proches de la ville ?

Il était en effet rare que ces créatures aussi effrayantes que colossales, aux traits de sombres canidés fantomatiques, percent à travers les rondes des gardes de Rodürz. Et leur alimentation à base de cadavres encore emplis de magie rendait leur présence d'autant plus déroutante. Ces barghests n'avaient aucune raison de se trouver là... et encore moins d'attaquer des humains dépourvus de pouvoir.

— Vous êtes magicien ! s'exclama soudain Gluiz qui m'agrippa par le col. Vous ne pouvez pas les aider davantage ?

Sa brusquerie tira des grimaces aux guerriers qui nous entouraient. Comme je le pensais, ils doutaient de ma nature depuis l'intervention d'Ahédan, mais, d'un autre côté, ils craignaient que le père d'Andras ne provoquât la colère d'un dragon à me secouer de la sorte.

— Nous sommes trop loin, avouai-je. Ma magie risque de blesser votre fils autant que ces barghests.

Je me dégageai de ses mains et arrangeai mon col.

— Et Erich n'a pas besoin de plus d'aide que ses armes pour se débarrasser de ces enquiquineurs.

Je croyais en mes mots, bien qu'au fond de mon âme, je ressentais une once d'inquiétude. Erich ne risquait rien sous mes écailles, mais la moindre erreur de sa part pouvait blesser Andras. Bien qu'aussi imposant qu'un bœuf, un barghest pouvait vite se faufiler auprès du garçon et le tuer d'un coup de croc.

— Juste une écaille.

Je sursautai alors que ces étranges mots résonnaient dans ma tête. D'un coup d'œil, je vérifiai les alentours... mais personne ne parlait. Tous restaient concentrés sur les barghests qui encerclaient nos amis au sommet de la falaise.

— Nous sommes affamés ! clama à nouveau cette voix difforme qui remuait mon âme. Par pitié, maître des dragons ! Juste une écaille pour nous nourrir !

Ces voix...

Elles appartenaient aux barghests ! Leur timbre sonnait aussi torturé que leurs corps brumeux. Malheureusement, je semblais le seul à les percevoir.