Prince et Dragon - Tome 1 : Ixen [EDITE sélection neovel]

Œuf symbolique - partie 3 (VERSION 2)

Le point positif à notre virée en haute montagne fut que la découverte de cet œuf souffla toute tristesse et curiosité à enquêter au prince. Nous regagnâmes sa chambre d'hôte plus vite que nous ne l'avions quittée malgré le dédale de couloirs.

— J'espère que les nobles ne vont pas discuter auprès d'oreilles averties de notre escapade, souffla Erich alors que je refermai la porte des appartements derrière lui. Et surtout, que nous avions les bras chargés.

— Nous aurions moins attiré l'attention si vous m'aviez laissé porter l'œuf.

— Je n'en doute point au nombre de fois où tu as trébuché sur une branche. Nous serions rentrés les mains vides !

Je roulai des yeux tandis qu'il déposait son paquetage sur le lit.

— Dépêche-toi de l'entretenir avec ta magie ! ajouta-t-il en rebroussant chemin.

Je l'observai, perdu, alors qu'il m'agrippa par le bras. Il me tira vers le lit avant que j'eus le temps de comprendre ce qui m'arrivait.

— Doucement, couinai-je de ma voix encore flûtée. Ce n'est pas en me secouant comme un pommier que j'irai plus vite.

— Et si je te menace de te jeter par la fenêtre ?

— L'œuf n'est pas à quelques minutes ! soufflai-je en levant les bras au ciel. Les griffons sont les rares oiseaux dont les œufs peuvent éclore sans la chaleur de leur mère.

Erich m'observa d'un regard avide de connaissances alors que je sortais l'embryon empaqueté de son turban.

— Les griffons choisissent des nids en haut de promontoires isolés, car les rayons du soleil suffisent à entretenir leur couvée. Les mères ne sont pas des couveuses, mais des chasseuses.

Sous le regard dubitatif d'Erich, je calai l'œuf sur son bureau, dans la tiède enveloppe des rayons du soleil. Son menton pincé entre ses doigts, le prince me fixait sans dire mot.

— Personne n'entre dans votre chambre, le rassurai-je. Hormis votre sœur, mais je doute qu'elle revienne.

Son corps s'agita comme s'il reprenait soudain vie.

— Je ne m'inquiétai pas de cela. Mais comment allons-nous l'exposer au soleil durant le voyage, si père ne doit pas le voir ?

— Vous n'avez rien compris, soupirai-je. Le soleil sert à réchauffer l'œuf, pas à lui dorer la coquille ! Pour l'instant, nous allons le laisser là, chauffé par le soleil, et demain, je l'envelopperai de magie si la chaleur d'un sac se trouve insuffisante.

— Ne me parle pas sur ce ton ! grogna Erich d'un air sombre. Je n'y connais rien en éclosion d'œufs.

J'évitai de justesse un j'avais remarqué de percer d'entre mes lèvres. Le prince était si usant par moment ! Et ce ne fut pas en restant cloîtré dans sa chambre à contempler son œuf qu'il devint plus agréable.

L'heure du dîner venu, il se cacha sans honte derrière le désir de son père à ne plus le voir jusqu'au départ pour que je lui monte le souper. Je lui volai une portion de son repas et le dévorai bruyamment dans un coin de la chambre sans qu'il le remarquât, trop absorbé par sa trouvaille.

Et la nuit ne fut malheureusement guère plus reposante. De peur que son œuf ne meure de froid sans la lumière du jour, cette tête de mule jugea nécessaire de me réveiller un nombre incalculable de fois au beau milieu de la nuit pour que je m'assure de sa bonne température.

Le jour du départ, je me réveillai avec des cernes longs comme ma main. Erich, quant à lui, était par je ne savais quel miracle aussi frais qu'un poisson tout juste pêché ! Sa forme était si bonne qu'il ne se priva pas de me secouer les puces alors que je traînais derrière lui dans les corridors du château.