Amira - partie 1 (VERSION 2)

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Sous un ciel azuré, lavé des nuages menaçant de la veille, la pointe de la Chevelure de Phénix se dessina de ses pics rocheux qui surgissaient des eaux. Leurs flancs brisaient les vagues en d'imposants panaches salés qui faisaient la joie de nos vouivres. Elles s'amusaient à doucher leurs écailles de leurs embruns, quand elles ne frôlaient pas les falaises, au grand dam d'Erich qui n'avait de cesse de s'imaginer écrasé contre un arbre ou un roc.

Bien que loin de moi, je lus sur son visage tout son soulagement quand nous aperçûmes enfin l'amas rocheux qui avait eu raison de notre caraque. La poupe du navire apparaissait encore au-dessus de la mer, son corps sûrement coincé contre la roche. Une chance en soit, car cela signifiait que la cabine de Nessa n'avait pas coulé. La probabilité de l'y retrouver inconsciente ne se résumait pas à une simple folie !

J'en informai Erich d'un cri et ordonnai à ma vouivre de piquer vers la falaise. Pourvue de solides griffes aux coudes de ses ailes, elle n'eut aucun mal à s'agripper telle une chauve-souris contre la paroi rocheuse. Celle du prince en fit de même, son cavalier bien moins à l'aise que moi sur sa selle. Le ventre avachi contre le cuir, ses bras s'enroulaient avec force autour du cou de l'animal.

— Prends appui sur tes étriers au lieu d'étrangler ta vouivre, lui conseillai-je en tentant de dissimuler mon sourire moqueur. Les liens qui les relient à la selle sont bien plus solides que ceux sur un cheval.

Il glissa un coup d'œil à mes pieds, mais la peur du vide l'empêchait de m'imiter. Bien que les jambes droites contre les flancs de sa vouivre, il ne trouva pas le courage de lâcher le cou de l'animal. Mais l'essentiel restait qu'il ne le serrait plus au point de l'étrangler. Elle put descendre doucement le long de la falaise au rythme d'une respiration dégagée.

À un maigre mètre du navire, je sautai de ma selle et me réceptionnai tant bien que mal sur la coque arquée. Je devais être prudent. Les eaux salées l'avaient rendue des plus glissante, sans compter les nombreux trous et échardes qui jalonnaient les planches.

Un bruit de chute à l'arrière me fit sursauter.

Je me retournai d'un bond, et découvris Erich, étalé à un bras de moi sur le bois.

— Tu sauras remonter sur ta vouivre ? le taquinai-je alors qu'il se relevait, honteux.

— Je dois avouer que pour quelqu'un qui bouge peu, tu es plutôt habile avec ces bestioles.

Ce constat laissait sur son visage une mimique déroutante. Comme un étrange mélange de gêne, mais aussi d'émerveillement devant toutes ces nouveautés que lui offrait Askaz.

— Ne traînons pas et voyons si ma sœur est toujours dans sa cabine, trancha-t-il en me dépassant.

Remonter le long de la poupe pour se glisser dans l'habitacle construit sous la dunette ne fut pas une mince affaire. Le navire penchait sévèrement en avant et son bois, arrosé tantôt par les pluies de la veille, tantôt par les vagues salées de la mer, restait fort traître. Mais nous parvînmes néanmoins à rejoindre la cabine de la princesse en un seul morceau.

— Nessa ! gronda Erich alors qu'il bataillait avec la porte d'entrée.

Personne ne répondit.

Il continua de forcer sur la poignée.

Encore et encore.

Quand elle céda finalement et s'arracha de la porte. Désemparé, Erich fixa la tige de bois coincée entre ses doigts, avant de la jeter au loin.

— Fichue camelote ! grogna-t-il en donnant un violent coup de pied contre le bois.

Il grinça, mais resta à son poste. Plus têtu que raisonnable, le jeune homme n'abandonna pas. Il frappa la porte à s'en rougir les poings et abîmer ses chaussures, mais s'arrêta comme son pied traversa les planches.

Prince et Dragon - Tome 1 : Ixen [EDITE sélection neovel]حيث تعيش القصص. اكتشف الآن