Prince et Dragon - Tome 1 : Ixen [EDITE sélection neovel]

Dispute - partie 2 (VERSION 2)

IXEN

Je me réveillai d'un bond.

Mes yeux découvrirent le visage d'une vieille femme au-dessus de moi, tandis que je hurlai le nom du prince.

— Calmez-vous, m'intima la dame qui m'empêcha de me redresser de ses mains calleuses sur mes épaules.

— Où est Erich ? insistai-je, affolé.

Où est mon fragment d'âme ?!

D'un rapide coup d'œil, je découvris l'intérieur d'une petite cabane en bois. De nombreux bouquets de fleurs séchées et d'épices pendaient au-dessus d'une cheminée au cendres froides, non loin de mon lit de fortune, tandis que des herbes aromatiques, d'après leur forte odeur, envahissaient une maigre table ronde proche de l'entrée.

— Le prince est dehors, m'assura la dame avec douceur. Il a terrassé le géant.

Hébété, je fixai la vieille femme d'un air ridicule. Elle me sourit et s'adossa à sa chaise de bois.

— Vous avez dormi plusieurs heures, ajouta-t-elle. Des chevaliers sont venus en renforts il y a peu. Ils aident le prince à charger le cadavre du géant sur un chariot pour l'emmener à Dahlia. Ils auraient tout de même pu arriver avant que le prince combatte ce monstre seul !

Je ne dis mot à ce sujet, conscient que mêler cette vieille guérisseuse à la politique des nobles n'apporterait rien de bon. Et il y avait bien plus urgent !

— Je dois voir Erich, tranchai-je en me redressant.

La dame soupira, mais ne me retint pas. Elle m'invita tout de même à avancer avec prudence. Je n'avais aucune séquelle physique, pourtant mon corps fiévreux lui avait causé plus de soucis qu'un malade. Cette enveloppe humaine avait décidément bien du mal...

J'aurais pu mourir de surmenage, réalisai-je dans un frisson. Moi, le plus puissant fils du créateur, mourir par manque de magie... quelle ironie.

Dehors, le village était en effervescence. Trois paires de chevaux tiraient le corps du géant vers un large chariot, sous les regards attentifs de leurs chevaliers. Des villageois s'assuraient de caler convenablement les roues, qui crièrent toute leur peine de grincements lugubres quand ils chargèrent la tête du monstre. Malgré la taille hors norme du chariot, je doutais qu'il soit assez large et solide pour transporter un géant.

— Ixen ! clama soudain une voix à ma droite.

Je reconnus sans mal celle du prince qu'il m'offrait déjà une accolade amicale.

— Je suis soulagé de te voir sain et sauf, avouai-je quand il me relâcha.

— Et moi donc ! La soigneuse du village était inquiète de ton état. Ne refais jamais pareille folie !

Un maigre sourire étira mes lèvres.

— Et c'est un prince ayant affronté un géant des montagnes qui me dit cela.

— J'aurais été plus rassuré si tu avais été à mes côtés, m'avoua-t-il sans honte. Ton armure m'a néanmoins bien protégé. J'ai reçu un mauvais coup, mais je n'en garderai que quelques bleus. Sans elle, l'issue du combat m'aurait été fatale.

— J'espère seulement que Minard ne s'amusera pas à te coincer dans d'autres missions suicides.

Et j'étais des plus sincère ! Que se soit pour sa propre vie comme pour celle de mon fragment coincé en lui.

L'air grave, Erich soupira. Il croisa les bras et observa ses chevaliers à l'arrière. À l'aide de cordes, ils essayaient désespérément de tirer le cadavre du géant sur le chariot. Une paire de chevaux leur venait en aide, mais la chair crasseuse du monstre bourrait contre les rebords. Des boules de graisse se formaient, que de pauvres paysans tentaient d'aplatir du bout de leurs râteaux.