Chapitre 36

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20 juin 2030, Quiberon

La vieille Peugeot filait doucement sur la route qui longeait la côte de la presqu'île de Quiberon. Mes mains serraient le volant et je sentais mon corps se crisper à l'approche de ce lieu que je n'avais pas vu depuis longtemps et qui me semblait pourtant si familier.

Je jetais un œil sur le siège passager et esquissait un sourire.

- Arrête de te dandiner comme ça, on arrive.

Rose me regardait de ses grands yeux bleus pour me sourire à son tour.

- Laisse moi me dandiner, ça me calme.

Mon sourire se faisait plus large encore et je secouais la tête. Elle me faisait tant penser à une personne que j'avais bien connue et cela me faisait un bien fou de la retrouver au travers d'elle. 

La voiture filait sur le bitume et il régnait désormais un silence de plomb dans l'habitacle. Mon cœur battait à cent mille à l'heure en voyant l'océan se détacher à l'horizon. Je regardais l'heure qui affichait 10h32 et grognait.

- Merde, il va nous attendre. 

Sans me regarder, Rose rigolait doucement.

- Je pense qu'il a l'habitude t'attendre après toi.

En guise de réponse, je lui donnais un coup sur la cuisse.

- Aïe ! Dis donc ! Il y a que la vérité qui blesse ! 

Je pouffais de rire.

- On dirait une réflexion que je pouvais faire quand j'avais 10 ans. 

Rose marmonnait dans son coin :

- Ouais, bah c'est pas d'hier...

Sans pouvoir se contenir d'avantage, on rirait aux éclats et de bon cœur. J'avais toujours aimé cette relation particulière que nous avions toutes les deux. Malgré le passé, malgré la situation, je n'avais jamais autant été soudée à quelqu'un. 

Je regardais Rose et repensais à toutes ces dernières années. Si on m'avait dit, il y a 15 ans, que je serais là aujourd'hui, à ses côtés et que je m'apprêtais à revenir ici, je pense que je n'y aurais jamais cru. J'aurais même fait interner la personne qui avait prononcé ces mots.

Mais c'est ainsi et c'était nécessaire. Je devais lui montrer, lui expliquer. Elle était prête. 

Je me garais aux abords du port et regardais ma montre. 10h47. Merde. 

- Je t'ai dit 10h30 parce que je pensais justement à 11h00, Alice.

Je me retournais vivement pour tomber nez à nez avec Karim. Il arborait un immense sourire et me tendait les bras que j'accueillais avec plaisir. Son étreinte m'apportait un réconfort dont lui seul connaissais le secret. Après notre épreuve sur l'île, nous avions gardé contact pour nous voir régulièrement. Et j'étais heureuse de constater qu'après quelques années, nous avions toujours réussi à le faire. 

Karim s'éloignait de moi avant de prendre Rose dans ses bras et récupérer nos valises. 

- Ça été la route? 

Je lui lançais un regard de détresse qu'il comprenait sans un mot supplémentaire.

- Hey, heureusement que je ne suis pas jalouse ! 

Marie sortait de leur local avec un air grave. Je lui souriais largement et elle me rendait aussitôt mon sourire. Je la serrais de toutes mes forces contre moi.

- Hop! Attention ! 

- Pardon ! 

Je me reculais vivement avant de m'accroupir et parler à son ventre.

Reviens NousWhere stories live. Discover now