31. Expertise

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Alec

Nouvelle journée. Le retentissement de la sonnerie me réveilla et c'était comme si elle actionnait une zone dans le cerveau qui poussait à l'obéissance et au conditionnement. Je rangeais, me douchais, m'habillais puis partis à la cantine. Après avoir bu un café, je rejoignis l'entrée de la base militaire.

Un taxi fut appelé pour venir me chercher à l'entrée de la base afin de me transporter jusqu'à l'hôpital et me ramener. Je n'eus donc pas à réfléchir.

J'attendis près d'une heure que le taxi arrive, mais je n'en avais rien à faire. Mes pensées étaient creuses, mon cerveau mis en stand-by.

Tout se déroula ainsi, dans un état hermétique. Je subis radio, scanner et IRM ainsi qu'une prise de sang. Malgré mon statut prioritaire, les urgences l'étaient davantage et je dus patienter durant des heures entre chaque examen. Cela dura toute la journée, si bien que lorsque je sortis de l'hôpital, le soleil déclinait dans le ciel. Le taxi me ramena à la base dans un silence total et je retrouvais ma couchette dans ce même silence qui fut extérieur, mais interne également. Je m'effondrais progressivement, mon état mental chutant considérablement. Néanmoins, je continuais, priant pour que l'anxiété ne me dévore pas d'ici la fin de mon séjour ici.

Le lendemain, évaluation physique. Je traversai le dédale de couloirs jusqu'au gymnase du bâtiment ouest. Un instructeur et un préparateur physique vinrent vers moi. Je les reconnus aisément et sus ce qui m'attendait. Aujourd'hui, j'allais devoir faire plusieurs tests physiques pour montrer mes capacités et déterminer mes limites ; une série d'exercices que je connaissais pour les avoir faits pendant mes formations ou mes entraînements. L'enchaînement fut simple au départ, puis les heures défilèrent et je dus passer aux parcours extérieurs. L'endurance se révéla mon point faible. L'appui sur ma jambe, genou partiellement plié, provoquait une douleur handicapante qui m'obligea à interrompre plusieurs fois les exercices.

J'aurais aimé tomber, chuter ou échouer, mais j'étais bloqué dans un état d'esprit très particulier qui m'obligeait à me dépasser, à obéir aux instructions et c'est pourquoi je n'arrêtais jamais. J'enchainais sans me soucier de la douleur. Je serrais les dents, ignorant l'élancement dans ma jambe, ignorant les pensées dans ma tête, ignorant même mon corps. Je bougeais en mode automatique, occultant ce qui m'entourait jusqu'à ce que le formateur m'interrompe. À la fin de la journée, j'étais exténué. Tout mon être m'élança et lorsque l'instructeur siffla l'arrêt, je soufflai tout l'air de mes poumons.

Ma tête tourna et ma jambe me brûla comme jamais auparavant. Ce fut à cet instant que je réalisais que la rééducation n'avait pas porté ses fruits. Physiquement j'étais remis, mais pas suffisamment pour envisager me retrouver en mission, à marcher pendant des heures avec plus de trente kilos sur le dos. Encore moins si je me retrouvais en zone hostile à devoir courir pour sauver ma vie, ou engagé dans un combat armé ou au corps à corps. Ma jambe ne le supporterait pas.

Je ruminais cette phrase le reste de ma soirée et toute la nuit.

Le sommeil ne vint pas et mon angoisse m'étouffait. Mes résultats physiques seraient transmis à mes supérieurs dès demain. Peut-être recevrions-nous les résultats de mes examens également. J'avais l'intuition que les conclusions feraient écho avec celles du Dr Olligan.

Et si ce n'était pas le cas, il ne me restait que les conclusions du Dr Martin qui pourraient mettre en avant mon état psychologique.

Les jours étaient passés et j'avais cru mourir à petit feu. De retour dans un univers militaire, mon être s'était comme recroquevillé sur lui-même, s'échappant dans un état d'esprit robotisé et déshumanisé.

Alter EgoWhere stories live. Discover now