29. Au revoir

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Alec

J'avais imaginé avoir plus de temps, peut-être repousser un peu mon départ en prétextant un problème de vol. Ce n'était qu'un espoir vain, on n'échappe pas à l'armée. Ils m'avaient envoyé un billet et je n'avais pas eu mon mot à dire. Je partais.

Par chance, j'avais eu le temps d'être là pour ma propre fête de départ que Devon m'avait organisée. La soirée m'avait touché et j'appréciais l'attention de mon ami, même si la tristesse rendait tout amer. J'avais pu dire au revoir à mes nouveaux amis, leur promettant que je reviendrais pour surfer sous ce beau soleil californien.

Killian affichait un visage morne et perdu en permanence et je n'arrivais pas à le consoler ou à le rassurer. Comment l'aurais-je pu alors que je sombrais moi-même ? J'aurais aimé que le sexe suffise, mais c'était pire. Se servir du plaisir et des orgasmes pour chasser la douleur rendait la situation encore plus cruelle. Je n'avais pas envie de passer tous ces moments avec lui en sachant que c'était parce que je partais, parce que je voulais le rassurer. Mes expériences devaient être saines et guidées par l'amour plutôt que le désespoir.

— Tu es prêt ?

Je me tournai vers Adrien sur le pas de la porte de ma chambre. Ancienne chambre. Mon sac était prêt. Moi en revanche, j'en étais loin.

— Oui.

Je balayai du regard la pièce une dernière fois puis ensemble nous descendîmes au salon, mon grand sac de toile sur l'épaule. Mira et Killian étaient près de l'entrée, attendant, les yeux mouillés. Killian n'arrivait plus à retenir ses larmes depuis ce matin. Elles coulaient simplement sur ses joues et il s'évertuait à les essuyer avec une certaine rage.

Pour ma part, je m'étais conditionné peu à peu dès que j'avais appris que je rentrais. Mon esprit s'enfermait dans un mode combat qui avait des allures de robot. Mes émotions étaient toujours là, mais si enfouies que je ne laissais rien paraitre. Seule ma voix trahissait ma douleur.

Bientôt, je couperais absolument toutes mes émotions, me rendant totalement hermétique. Mais pas encore. Pas alors que Killian était toujours près de moi.

Sur la route vers l'aéroport, le silence fut trop lourd, trop douloureux.

— Allez, les gars, c'est bon. J'ai adoré être ici, mais nous savions que ça aurait une fin.

Personne ne me répondit. Mira étouffa un sanglot, Adrien me lança un regard triste et Killian serra si fort sa mâchoire que je crus entendre ses dents grincer.

— Ce n'est qu'un au revoir, pas un adieu.

— J'espère bien, répliqua Mira en pleurant doucement.

Killian frotta son visage une nouvelle fois avec rage et tourna la tête vers la vitre. J'attrapai son bras pour qu'il revienne vers moi et lorsqu'il céda, je pris son beau visage d'ange en coupe dans mes mains. Nous nous regardâmes en silence, ne sachant plus quoi dire. À défaut de faire des promesses, je l'embrassai parce que c'était la seule chose qui avait encore un sens. Sentir ses lèvres sur les miennes me semblait être la meilleure chose au monde. J'en avais été privé toute ma vie, niant cet amour qui existait au fond de moi, mais aujourd'hui j'en étais conscient. Peu importe ce que cela faisait de moi, quelle étiquette je devrais porter, j'aimais cet homme et c'est ce qui faisait mon bonheur.

Les doigts de Killian agrippèrent ma veste comme si sa vie en dépendait. Il se noyait et voulait s'accrocher à quelque chose. Mon cœur se serra en réalisant que je ne serais pas sa bouée de sauvetage. Je deviendrais plutôt le poids à sa cheville qui l'entraînerait inévitablement vers le fond.

Alter EgoWhere stories live. Discover now