Chapitre 38 - Les mots du cœur

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L'heure du rendez-vous était déjà dépassée depuis seize minutes, lorsque la silhouette de Suna s'était finalement illustrée dans le champ de vision commun des trois adolescents qui l'attendaient plus ou moins patiemment. Simplement vêtu d'un jean noir et d'une veste suffisamment chaude pour affronter le froid de janvier, il avança en leur direction les mains dans les poches, sans presser le rythme. Et les bras croisés d'agacement, Akemi en tapota du pied à plusieurs reprises – elle le suspecta de s'amuser de la situation, au vu du sourire qu'elle distinguait étiré sur ses lèvres.

— On avait dit dix heures, tu sais ?

— Ma sœur était collante ce matin, répondit simplement le lycéen en se plantant devant eux. On y va ou quoi ?

Une œillade à l'attention de Ritsuka et de Kita, qui restaient tous deux silencieux, et la jeune fille capitula. Les bras ballants le long du corps, elle fit volte-face pour s'avancer en direction de l'entrée, et concéda à leur tendre leurs tickets pour les enjoindre à la suivre.

En dépit de la période encore hivernale, il semblait y avoir du monde de réuni en ce dimanche ensoleillé. Les visiteurs affluaient, tant devant l'entrée à côté d'eux qu'à hauteur des guichets, et Akemi s'estima heureuse d'être arrivée plus tôt pour prendre les tickets. Un sourire aux lèvres, elle tourna à plusieurs reprises sur elle-même, comme pour considérer à la fois la foule devant elle et ses trois amis. L'adolescente ne prit toutefois conscience de la proximité de Suna, qui avait visiblement accéléré le pas, que lorsque la main de celui-ci claqua contre son épaule pour la rapprocher de son torse.

— Qu'est-ce que–

— Fais gaffe où tu marches, tu vas encore te cogner la tête quelque part, soupira-t-il avant de relâcher son étreinte pour rendre à la jeune fille son espace vital.

Les pommettes rosies et la bouche entrouverte de surprise, Akemi considéra le volleyeur à ses côtés, et la quadragénaire qu'elle avait manqué de bousculer. Désormais calmée dans son enthousiasme et après s'être confondue en excuses, elle s'immobilisa pour laisser à Kita et Ritsuka le temps de les rejoindre. Prunelles ainsi vrillées sur cette dernière, elle prit la peine d'analyser la crispation de son visage. De ses lèvres pincées et tremblotantes aux plis de son front. Du rouge qui lui colorait les joues aux fossettes qui prenaient naissance au coin de ses yeux brillants. L'intégralité de ses traits hurlait la nervosité qui coulait dans ses veines, qui tendait ses muscles.

Au cours des quelques minutes passées à leurs côtés en attendant Suna, ils n'avaient pas réellement échangé. Seules des brides de sujets avaient volé dans l'air, éteintes en majorité par le malaise dont Ritsuka ne paraissait pas réussir à se défaire.

— T'es déjà venu ici, Kita-senpai ? s'enquit Akemi alors qu'ils pénétraient à l'intérieur, dans l'espoir de détendre l'atmosphère et étouffer le silence.

— Jamais, réfléchit-il de son sérieux caractéristique. Vous êtes déjà venus ?

— Oui, on venait souvent au collège parce que Ricchan adore ça ! Là, ça commençait à dater un peu.

Si le regard de Ritsuka avait pu lancer des éclairs, nulle doute qu'Akemi serait morte sur place sans avoir eu le temps de voir un premier poisson. Car dans la seconde qui suivit, le visage intrigué que Kita tourna en direction de la volleyeuse n'eut pour effet que d'enflammer le sien. Et si Suna sembla s'en amuser, seul dans son coin, la situation ne parut pas perturber la plus jeune, qui ne se formalisa que très peu du résultat décevant qu'elle avait obtenu.

Pourtant, après une partie de la matinée et à force de voir sa meilleure amie converser aussi naturellement avec le lycéen de terminale, la volleyeuse finit par serrer le poing. La situation était d'un ridicule sans nom, et les coups d'œil qu'elle sentait de la part de son camarade de classe le lui confirmaient désagréablement. Leurs pupilles se heurtèrent, et si l'apathie caractéristique du garçon glissait dans son regard, ce contact visuel ne laissa pas le doute quant à ses plans pour la suite.

À l'encre indélébile | HaikyuuWhere stories live. Discover now