Les sentiers de l'espérance {...

由 Aelnen

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En septembre 1938, à 18 ans, Adam Kowalski rejoint les rangs de la Wehrmacht sur ordre de son beau-père, memb... 更多

Charte de bonne conduite
Contrat d'édition
Avertissement - Droits d'auteur
Prologue
Chapitre 1
Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Chapitre 8
Chapitre 10
Chapitre 11
Chapitre 12
Chapitre 13
Chapitre 14
Chapitre 15
Chapitre 16
Chapitre 17
Chapitre 18
Chapitre 19
Chapitre 20
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Chapitre 9

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由 Aelnen


16 février 1939

Au lieu des 7 jours annoncés par le médecin, je suis resté à l'infirmerie 15 jours de plus : j'ai reçu aujourd'hui la permission de regagner mon poste de travail et j'avoue que je regrette le confort de ma chambre aseptisée. Mais je n'ai plus rien à y faire puisque je suis guéri.

Dans les couloirs, je surprends une conversation entre deux infirmiers : les frictions entre Hermann Baranovski et les autres responsables du camp deviennent plus nombreuses chaque jour.
Je m'appuie contre un mur qui me cache à la vue des soldats car je ne veux pas participer à la discussion mais si je veux sortir je dois impérativement passer devant eux : je suis donc contraint d'attendre la fin de leur échange.

J'apprends ainsi que Baranovski, Standartenführer dans une division près de Hambourg, avait été nommé à la tête du camp de Lichtenburg en raison d'un conflit personnel. Là encore, l'entente n'avait pas été au beau fixe entre le commandant et les autres dirigeants : c'est ainsi qu'il s'était retrouvé à Dachau puis ici à Sachsenhausen.

Tout en patientant, je réfléchis rapidement : ces informations peuvent peut-être aider les quelques prisonniers qui envisageaient de s'évader du camp. Je ne sais pas vraiment comment mais autant que je les communique au détenu que j'avais mené en cellule avant d'être transporté à l'infirmerie.

Enfin, le couloir se libère et je marche d'un pas rapide vers la sortie du bâtiment. Je dois passer dans les quartiers administratifs pour signer un document attestant mon retour sur le terrain mais je décide de faire un détour par la prison.

En y pénétrant, j'explique à l'un des gardiens que je sors de l'infirmerie et que je voulais voir un détenu que j'avais moi-même enfermé et qui avait été condamné à 42 jours d'arrêt. Lorsque je désigne la cellule de loin le soldat à qui je me suis adressé secoue la tête :

- Il a été fusillé il y a deux jours.

Je le regarde stupéfait et je mets un temps à assimiler ce que je viens d'entendre. D'un pas lent je quitte les cachots et, après un rapide passage dans les quartiers SS, je regagne mon poste de travail terriblement accablé.

Lorsque Georg me tend mon fusil, il se penche vers moi et d'un ton menaçant me dit que si je laisse encore un seul prisonnier un peu trop libre de ses mouvements, il se fera un plaisir de déverser le contenu de son chargeur sur moi. Il précise également qu'il a demandé aux autres SS de ne pas tirer si l'un des hommes que nous devons surveiller tente de s'échapper car Georg attend toujours que je fasse « mes preuves ».

Sans dire un mot je prends mon arme en tremblant et je me positionne lentement au coin du terrain que doivent défricher la cinquantaine d'hommes que j'ai face à moi.

Je me sens vraiment mal en les dévisageant : il fait de plus en plus froid dehors, ils n'ont toujours que leur vieil uniforme râpé sur le dos et sont toujours soumis aux mêmes cadences infernales.

J'en vois certains hésiter longtemps au moment de soulever leur lourde bêche remplie de terre et je tressaille : je sais parfaitement que si l'un de ces pauvres malheureux décident de déposer son outil de travail, Georg exigera que je l'abatte sans cérémonie.

Mon attention se porte sur l'un des prisonniers qui semble plus jeune et plus frêle que ses compagnons : il grelotte et ne cesse de tousser. Je suis presque certain qu'il est malade.

Je remarque que les autres SS le fixent également avec insistance tandis que Georg se concentre exclusivement sur moi.

Je vois le jeune homme laisser finalement tomber son outil et s'assoir par terre sous le regard terrifié de tout le kommando : certains tentent de le remettre sur pied mais en vain, leur compagnon est exténué. Personne ne dit mot mais tous savent qu'il vient de signer son arrêt de mort et je comprends en voyant Georg se diriger lentement vers moi, la main posée nonchalamment sur son revolver, que je vais devoir choisir entre sa vie et la mienne.

Pour avoir été forcé d'apprendre le règlement du camp par cœur, je sais que j'ai obligation de viser avant tout la tête des prisonniers mais je sais que je n'en serais absolument pas capable.

Mes possibilités sont extrêmement limitées : un instant j'envisage, non pas de tirer sur le pauvre garçon comme je suis sensé le faire mais sur Georg pour tenter de faire diversion.

Je renonce presque immédiatement en pensant aux cinq autres SS qui montent la garde autour du groupe de détenus car je sais que si j'ai le malheur de tirer sur notre supérieur, je serais étendu raide mort sur le sol moins de 10 secondes plus tard.

Je regarde alors une nouvelle fois en direction du fossé : le jeune homme n'a pas bougé, il est même désormais étendu complètement dans le fossé.

J'ai beau réfléchir à toute vitesse, je ne trouve aucune alternative à la macabre tâche qui m'attend et quand je vois du coin de l'œil Georg prêt à me descendre, je panique complètement. Je n'ai pas d'autre choix que de lever mon arme et de la diriger vers ma cible : une larme coule le long de ma joue tandis que mon doigt tremblant presse sur la détente.

Le bruit de la détonation résonne pendant une éternité à mon oreille : bien que je n'ai pas visé la tête, je sais que j'ai touché le malheureux prisonnier mais je ne veux pas regarder, je n'ose pas regarder le résultat de mon crime.

Georg se précipite vers moi et me frappe violemment l'épaule tout en m'apostrophant d'une voix courroucée :

- Espèce d'imbécile, tu ne pouvais pas viser la tête comme on te l'a appris ?

Je me tourne alors lentement vers le fossé et je remarque sur l'uniforme usé du détenu une importante tâche rouge vif : non seulement je ne l'avais pas tué sur le coup mais je l'avais condamné à une agonie aussi lente qu'atroce car j'avais visé inconsciemment son abdomen.

Georg semble deviner mes pensées car tout à coup il éclate de rire :

- Ce n'est peut-être pas une mauvaise chose après tout : au moins il s'agira d'une belle leçon pour cette bande de moins que rien !

Choqué par l'acte répugnant et abject que je viens de commettre, je reste planté au milieu du chemin, les yeux fixés sur le garçon qui se vide lentement de son sang en hurlant à la mort et en se tordant de douleur : il a plaqué ses mains sur son ventre comme s'il essayait d'arrêter l'hémorragie. Mais c'est inutile, je le sais bien : j'ai eu quelques cours durant ma formation à Berlin sur la manière de blesser un ennemi et ce que j'avais infligé à ce jeune homme était l'une des plus horribles façons de mourir. Il allait sentir la vie quitter son corps petit à petit, il allait avoir de plus en plus de mal à respirer, il allait avoir l'impression d'étouffer et lentement, très lentement il allait perdre conscience pour finalement ne plus jamais se réveiller.

Ses camarades se sont arrêtés de travailler et le dévisage sans dire un mot. Les cris stridents des sentinelles qui les houspillent et leur demandent de se remettre à l'ouvrage les ramènent brusquement à la réalité.

Lorsque la journée de travail s'achève enfin, des dizaines de paires d'yeux me fixent avec dégoût mais aussi avec colère et haine. Je ne peux pas leur en vouloir, j'ai tué un des leurs, le plus jeune de tout le groupe et tout à coup je prends peur : je sais par Ludwig que de temps en temps, un détenu tente de s'attaquer directement à un soldat SS et je redoute d'être le prochain visé.

N'ayant pas trouvé d'excuse valable, je ne peux échapper à l'appel du soir et je suis contraint de surveiller les milliers de prisonniers qui s'alignent sur la grande place du camp.

Curieusement ce soir, les dirigeants ne semblent pas avoir envie de faire durer longtemps le supplice des malheureux détenus : j'avoue être soulagé, je vais pouvoir regagner ma chambre assez rapidement. Mais avant cela, je dois m'acquitter d'une dernière tâche : raccompagner le kommando que je surveille jusqu'à leur baraquement.

Conformément aux règles en vigueur, tous les hommes marchent au pas vers leur logement de fortune et je les suis d'un pas trainant tout en songeant au jeune garçon dont le corps git au fond du fossé en lisière du bois.

Le cri d'un soldat me fait lever la tête juste à temps pour voir un détenu se précipiter sur moi, un petit couteau artisanal à la main : sans réfléchir et par réflexe, comme je l'avais appris à la caserne en cas d'agression par un tiers, je lève mon arme et tire trois balles l'une à la suite de l'autre : mon agresseur s'écroule sur le sol tel un pantin désarticulé.

J'entends alors d'autres détonations et je comprends que les autres soldats ont, à leur tour, tiré sur les prisonniers. Je m'écarte lentement de toute cette agitation, je regarde mon fusil avec dégoût et je lutte contre la nausée qui m'envahit peu à peu. Quelques minutes plus tard, les survivants sont contraints d'évacuer les cadavres de leurs compagnons à l'extérieur du camp : je suis choqué de constater qu'il y en a une bonne trentaine.

Enfin, plus d'une heure après la fin de l'appel, je regagne la pièce qui me sert désormais de maison : je m'apprête à y entrer quand l'un des soldats qui gèrent le courrier du camp déboule dans le couloir et m'interpelle à plusieurs reprises :

- Il y a une lettre qui est arrivé pour vous ce matin. Je suis désolé j'ai oublié de vous l'apporter.

Je ne le remercie même pas et ferme la porte de ma chambre d'un geste brusque : n'ayant aucun ami, cette missive ne peut provenir que de l'une des deux personnes que je hais par-dessus tout.

Les mains tremblantes je découvre dans l'enveloppe un unique petit feuillet couvert d'une écriture élégante :

Je suis fort déçu des échos qui me sont parvenus jusqu'à présent. Tu as intégré mon foyer uniquement parce que j'ai de l'affection pour ta mère et que je ne souhaitais pas la contrarier. Sans quoi, je peux te garantir que je t'aurai immédiatement fait arrêter car ta place est en prison ou dans un kommando de Sachsenhausen.

Tu n'es pas mon fils et tu ne le seras jamais à moins que tu me prouves que tu apportes un soutien total et exclusif au Reich mais j'en doute.

Karl m'a fait lire ton carnet de notes : tu m'as littéralement humilié en essayant d'assassiner le fils de l'un de mes plus proches amis. J'ai cru mourir de honte lorsqu'il s'est lui-même déplacé à la maison pour me faire part de tes exploits.

J'ai exigé que tu sois soumis à des règles bien précises afin que tu comprennes une bonne fois pour toute quelles sont tes obligations.

Je te rappelle que tu as prêté serment : un vrai allemand accomplit ses missions sans faiblesse, un authentique partisan du Reich a le devoir d'éliminer quiconque tente de s'opposer à la grande Allemagne. Si j'apprends encore une fois que tu as essayé d'attenter à la vie d'un honnête et loyal allemand au lieu de mater les opposants à notre Führer je te promets que toutes les punitions que tu as reçues jusqu'à présent te sembleront fort légères en regard de ce qu'il t'attend.

Mes relations sont nombreuses : tous tes gestes me seront désormais rapportés dans les moindres détails et je n'hésiterai pas à employer tous les moyens nécessaires pour te soumettre.

Cette missive vaut pour dernier avertissement : je regrette presque de ne pas t'avoir laissé crever dans ce cachot.

De rage, je déchire le papier jusqu'à en faire des miettes et je m'écroule sur mon lit en sanglotant.

Je suis incapable de trouver le sommeil car je ne cesse de voir encore et toujours les mêmes choses dans mes cauchemars : les visages de ceux que j'avais moi-même exécutés, les visages de ceux que je n'avais pas réussi à sauver et puis surtout les visages de tous les hommes du kommando marqué par le mépris et la rancœur à mon égard.


Je n'ai pas de famille mais eux doivent avoir une épouse, des enfants, des frères, des amis qui attendent désespérément des nouvelles de leur part. Je pense tout à coup à ce jeune garçon qui ne devait pas être plus âgé que moi, qui ne retrouvera jamais son foyer, qui ne fondera jamais une famille, qui n'aura jamais un travail par ma faute...

Ernst m'avait tout pris : ma liberté, ma dignité, mon honneur et il avait aussi fait de moi un meurtrier, un criminel, un monstre.

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