25. Lilia

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– Dans deux minutes c'est ton tour !

Lorsque l'assistante aux castings disparaît derrière le rideau de la scène, Lilia sent son stress grimper en flèche. 

– C'est ta première audition ? lui demande Dorothy qui sort tout juste de la sienne.

– Oui, répond-elle.

– Ça va aller, c'est toujours moins impressionnant qu'on ne le pense. Imagine que c'est ta mère, ou ton père qui te regarde.

– Je ne pense pas que ça va m'aider, répond Lilia.

Son anxiété semble même grandir. 

– Chanter devant mes proches... Non, ce serait même pire, précise-t-elle. 

L'assistante revient dans les coulisses.

– Candidat numéro quatre-vingt-neuf, quatre-vingt-cinq, c'est à vous !

Lilia serre son violon contre elle puis s'engage dans l'arène. Elle a tout juste le temps d'entendre Dorothy lui souffler :

– Casse-toi une jambe, comme disent les British !

Sur les planches de ce théâtre suranné, ses talons claquent de moins en moins fort à mesure qu'elle s'approche des jurés. 

– Alors, Lilia, candidat « 89.85 », pour ce passage, nous aimerions que vous lâchiez votre violon.

Un technicien la débarrasse. Elle a l'impression qu'on le lui arrache, plutôt. 

Elle sait que c'est un moyen de la déstabiliser. Dommage qu'elle ne puisse pas s'asseoir, elle pense qu'ils peuvent tous entendre le claquement de ses genoux. 

– Dès que vous êtes prête, commencez ! 

Lilia inspire profondément. Finalement, elle choisit une chanson anglaise, moyen de ne pas se mettre totalement à nue. Le français, c'est casse-gueule comme elle l'a souligné à Maureen pendant qu'elles répétaient.

Elle se surprend, dès la fin du premier couplet, à sentir une euphorie s'emparer d'elle, et alors le nœud dans son ventre se dénoue. Cette chanson de Birdy lui fait toujours cet effet-là. 

Lorsqu'elle récupère son précieux instrument de musique en coulisses, c'est Maureen qui attend son tour.

– J'ai entendu la fin, c'était super, Lilia ! Dis-moi, c'est quoi ton astuce pour le trac ?

Lilia lui sortirait bien le coup du « imagine-les tous nus », mais dans sa franchise, elle lui avoue :

– Écoute, moi je me dis qu'une seule chose lorsque je suis confrontée à des gens qui m'impressionnent.

– Vas-y, balance !

– On finit tous au cimetière.

LE MAESTROOù les histoires vivent. Découvrez maintenant