Chapitre 33 (1/2)

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Le noir. Le froid. L'odeur entêtante de l'encens. Ce bruit, sourd et régulier. Et cet autre, plus sifflant.

Celui de sa propre respiration, réalisa Edénar. Sa tête bourdonnait. Son corps lui paraissait collé au sol.

La panique le saisit un instant. Il avait retrouvé la conscience de son corps, mais était-il toujours enfermé à l'intérieur ? Incapable d'agir ?

Il s'assit.

Enfin, il essaya.

Frustré, le jeune homme grinça des dents, s'obligea à fermer les yeux, à visualiser le mouvement comme s'il était naturel... et se retrouva assis sur son lit, fébrile.

Edénar déglutit, s'émerveilla de ce simple mouvement. Les mains posées sur les genoux, il plia les doigts, un par un.

Quelque chose d'humide glissa sur ses joues. Des larmes, qu'il essuya d'une main tremblante.

Son corps lui appartenait enfin, et la joie qui l'étreignait était trop forte pour être contenue.

Edénar prit une grande inspiration. Orssanc et Eraïm avaient donc eu raison. La présence qui contrôlait ses mouvements avait disparu.

Maintenant, il devait retrouver Surielle. La souffrance et la terreur de la jeune ailée lui avaient été intolérables. Elle était peut-être torturée, en ce moment même. Quant à Alistair... ses sentiments étaient mitigés. Une part de lui reconnaissait qu'il souffrait également, l'autre n'aimait pas sa proximité avec Surielle. C'était curieux, ça.

Edénar se reconcentra. Ce n'était pas le moment. Il devait profiter du calme pour s'entrainer aux mouvements de base. Puis sauver Surielle. Elle l'avait libéré, lui avait appris tant de choses...

Quand il fut certain que ses mains et ses bras répondaient correctement à sa volonté, Edénar se leva doucement, se stabilisa en s'appuyant sur le mur tout proche. Par Orssanc ! Son corps lui paraissait si lourd, si malhabile !

Edénar serra les dents. Il n'allait pas renoncer maintenant. Il avait lutté si longtemps contre l'emprise d'Orhim sur son corps, avant de se résoudre à se réfugier dans son sanctuaire spirituel. Les choses auraient-elles été différentes, s'il avait lutté jusqu'au bout ? S'il n'avait pas abandonné ? Il fit quelques pas hésitants qui le rapprochèrent du miroir, sursauta devant son reflet. Ses yeux... étaient bleus, et non verts. Un bleu foncé, lumineux.

Un sourire gagna ses lèvres. C'était bien la dernière preuve qu'Orhim avait quitté son corps.

Il s'immobilisa près de la porte, se retourna. Cette pièce spartiate avait été sa chambre pour si longtemps... sa chambre mais surtout celle d'Ohrim. Aujourd'hui il était maitre de son destin.

Il n'avait jamais été conscient dans son corps, et cela faisait des années qu'il s'était réfugié dans le monde spirituel qu'il avait imaginé. De temps en temps, il essayait de voir si la présence en lui avait cédé le contrôle. Chaque fois, il avait essuyé une déception. Ill comprenait mieux pourquoi il s'était senti impuissant. Comment lutter contre un dieu, après tout ? Malgré toute sa volonté, il n'avait été qu'un insecte face à cette présence imposante.

Sauf que la donne avait changé. Orssanc réveillée, Edénar était désormais libre d'agir. Et Orhim allait regretter de lui avoir volé toutes ces années.

Edénar ouvrit doucement la porte, s'avança dans le couloir. Personne. Où aller ? Sa chambre était toute proche des appartements d'Elurio. Le Prêtre d'Orhim s'occupait de lui depuis son enfance ; il remarquerait immédiatement que quelque chose avait changé en lui, qu'il n'était plus sous son emprise. Il devait l'éviter à tout prix.

L'héritage des phénixOù les histoires vivent. Découvrez maintenant