Chapitre 16 (1/2)

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Ils étaient partis tôt le matin, après un solide petit déjeuner. Taka avait accepté de les guider jusqu'à Lapiz et Surielle était réjouie de passer encore un peu de temps avec sa cousine. Rayad et Shaniel étaient inquiets pour Alistair ; le jeune ailé n'avait toujours pas repris conscience quand ils s'étaient levés.

Elycia leur avait assuré qu'elle veillerait sur lui quand elle avait perçu leur hésitation. Rayad était tiraillé entre son envie de trouver des réponses à Lapiz pour rentrer chez lui au plus tôt, et la culpabilité qu'Alistair ait été blessé par sa décision de se rendre sur Massilia. Payait-il le prix de son impatience ?

En dépit des paroles rassurantes de Surielle et Elésyne, Rayad n'appréciait pas de laisser Alistair seul au milieu des Massiliens. Il craignait des représailles sur son ami, malgré la paix. L'attaque à laquelle ils avaient été confrontés avait douché son optimisme sur la situation. Lui-même ne s'était que peu intéressé à la Fédération des Douze Royaumes, jusque-là, les affaires de l'Empire requérant la plupart de son temps. C'était uniquement par curiosité sur le peuple d'origine d'Alistair qu'il avait épluché quelques livres regroupant leurs connaissances sur le sujet. Depuis qu'il était en terre étrangère, cependant, il avait du revoir son opinion sur l'état de leurs relations diplomatiques.

Il se souvenait pourtant d'avoir rencontré la Souveraine par le passé, ainsi que son époux. Leur escorte était chaque fois peu nombreuse et leurs visites restaient annuelles. Son père, l'Empereur Dvorking, Orssanc garde son âme, avait un emploi du temps chargé. Rayad espérait changer les choses à son retour, sans se bercer d'illusions : il doutait que la paix l'attende et craignait que la guerre civile déchire la fragile harmonie entre les Familles.

— Vous êtes prêts ?

Rayad caressa une dernière fois le bec lisse et froid de Zéphyr, puis acquiesça. Le regard du griffon pétillait d'intelligence et le prince se demanda quelles étaient ses pensées. Il considérait l'animal comme un ami, n'oubliait pourtant pas que son espèce avait été créée pour l'amusement de son peuple. Comment se sentait-il, sur cette planète inconnue ? Rayad avait veillé à ce qu'il soit nourri de viande fraiche et s'était occupé de sa toilette, savait que Grenat, le griffon de sa sœur, lui était d'un réconfort, mais parfois, il se demandait si c'était suffisant.

Comme s'il avait perçu ses pensées, Zéphyr s'ébroua, claqua du bec comme pour l'inciter à se dépêcher. Rayad rougit en réalisant que tous l'attendaient et se hissa sur le dos du griffon. Sa confiance en Zéphyr était totale ; jamais il ne le laisserait tomber.

Taka et Surielle décollèrent avec quelques pas d'élan, suivies par Shaniel, et Rayad se hâta de les imiter. Alors qu'ils gagnaient en altitude, il se retourna. La demeure du Djicam rapetissait à vue d'œil. Il eut un pincement au cœur en songeant à Alistair, toujours inconscient. Le jeune ailé serait furieux qu'ils soient partis sans lui, arguant de sa sécurité. Rayad avait déjà préparé sa défense : l'Émissaire Taka - il avait toujours du mal à l'appeler par son véritable prénom - était une combattante de valeur, et puisqu'ils étaient ses invités, ils étaient sous sa protection. La Seycam bénéficiait quand même d'une certaine aura.

Rayad n'aurait jamais du songer à se justifier auprès d'Alistair. Qu'il soit son ami était une chose, mais Rayad était le futur Empereur, et Alistair un subalterne. Rayad espérait que son prochain titre n'entacherait pas leur relation : il aurait besoin des avis francs de son ami.

Et pour le moment il devait se concentrer sur leur mission. Trois heures de vol, avait estimé Taka. Ce serait long. Zéphyr semblait n'avoir aucune difficulté à tenir le rythme qu'imposaient les deux Massiliennes. Elles se relayaient à la tête de la formation, échangeant quelques gestes qu'il supposait être une forme de communication. Avec leur vitesse, se parler était impossible. Même en hurlant, il doutait de comprendre une simple phrase.

L'héritage des phénixOù les histoires vivent. Découvrez maintenant