– Euh... On avait prévu quelque chose ?

Je sens mon sourire me déserter et ma gorge se nouer. Il a l'air sonné – et pas particulièrement content de me voir. Peut-être que j'ai fait une grosse gaffe en venant ici.

– Non... Je voulais te faire une surprise, mais si le moment est mal choisi...

– Pas du tout ! s'écrie Lodovica. Au contraire ! Le moment n'aurait pas pu mieux tomber ! Et pourquoi je crie comme ça, moi, d'abord ?

– Du calme, Lodovica, dit Ruggero en posant une main sur son épaule. Tu ne veux pas aller prévenir papa qu'on a une invitée ?

– OK ! lance-t-elle sans bouger d'un pouce.

– Alors vas-y !

Il la pousse gentiment vers le salon avant de me faire entrer.

– Il ne faut pas lui en vouloir, murmure-t-il quand je passe près de lui. Je pourrais te raconter qu'elle n'est pas dans son état normal mais, en fait, si. C'est ça, son état normal.

Je souris et prends soin de ne pas écouter la conversation chuchotée dans le salon. Quelqu'un éteint la télé, et des bruits de pas s'approchent.

– C'est parti... souffle Ruggero, comme pour se donner du courage.

Lodovica revient en tirant par la main un homme en t-shirt noir et pantalon de flanelle. Je croirais voir Ruggero en plus âgé et plus buriné. Ils ont les mêmes yeux clairs, la même mâchoire décidée et le même sourire chaleureux.

Bonsoir. Ma fille m'a interdit de vous parler. Je m'appelle Fred.

– Alfredo, intervient Lodovica. En vrai, il s'appelle Alfredo.

– Bonsoir, Fred, dis-je en serrant la main qu'il me tend. Je m'appelle Valentina.

– Ah ! C'est un plaisir de vous rencontrez autrement que sur les murs de la chambre de ma fille, vous êtes ravissante, commente Fred.

– Papa ! Arrête ! râle Lodovica en se plaquant les mains sur les oreilles. Beurk ! Ce n'est pas pour rien que je t'ai interdit de parler ! On est obligés de le laisser dîner avec nous ? plaide-t-elle en se tournant vers Ruggero.

– Oui, on est obligés. Voilà ce que je vous propose : vous allez regarder la fin du match et, pendant ce temps, Valentina et moi on prépare le repas. Ça vous va ?

– Impeccable, répond Fred en souriant gentiment avant de retourner dans le salon. Viens, Lodovica. Tu n'as qu'à t'asseoir dans le gros fauteuil. De là, tu pourras mieux les espionner.

– Je n'allais pas les espionner ! proteste-t-elle en traînant les pieds.

Ruggero pose une main au creux de mon dos et me fait entrer dans la cuisine. Il y a une pile de vaisselle sale dans l'évier et plusieurs bols alignés sur le plan de travail. À côté des plaques de cuisson, j'aperçois un gros filet de poisson blanc dans une assiette, ainsi qu'un paquet de crackers.

– Ne fais pas attention au désordre. Je ne sais pas cuisiner sans en mettre partout.

– Qu'est-ce que tu prépares ? dis-je avant d'ajouter dans un chuchotement : Tu es sûr que je ne vous dérange pas ?

Ruggero me prend le menton le temps d'un rapide baiser.

– Oui, je suis sûr. Si j'avais su, j'aurais pu les avertir et amortir le choc – pour toi aussi, d'ailleurs.

Sing! [ADAPTATION] - TERMINÉE Where stories live. Discover now