Q/R: Dois-je En Parler À Mon Entourage ?

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La question de ce qu'on appelle communément le « coming out » est importante. Loin d'être une manière d'afficher sa différence ou d'être une revendication, l'annonce de son homosexualité à ses proches constitue pour beaucoup une étape essentielle dans un travail de vérité avec soi. Parce qu'on aime ceux qui nous entourent, on a naturellement envie de leur partager ce qui est le plus intime de soi-même – mais ce n'est jamais une obligation.
Pour autant, cette annonce est loin d'être simple et elle suscite un certain nombre de questions. En premier lieu, on doit se demander ce qui nous pousse à vouloir être en vérité avec son entourage : est-ce pour soi ou pour les autres ? Car il y a bien deux « parties » en jeu dans cette révélation délicate.

Si c'est pour soi : est-ce pour être plus libre dans sa vie ? parce qu'on n'arrive plus à avancer tant qu'on n'a pas partagé ce qu'on vit avec ses proches ? pour pouvoir être en vérité avec les autres et ne plus avoir l'impression de mentir à ses amis, à ses parents ? est-ce pour se soulager d'un poids, quitte à le faire au dépens de son entourage, ou est-ce dans un réel esprit de partage ? Si c'est pour les autres : est-ce pour qu'ils puissent mieux comprendre ? pour leur manifester sa confiance et son affection ? pour ne pas leur manquer de respect ?

Il faut encore prendre en compte les conséquences pour soi et pour les autres d'une telle révélation. La confidence sera-t-elle accueillie favorablement et permettra-t-elle de nouer des relations plus vraies et plus profondes ? Risque-t-elle à l'inverse de compliquer encore plus la situation, d'être incompris et rejeté ? Tout dépend ici du contexte familial, amical, professionnel et de la nature de ses relations avec les autres, de l'ouverture d'esprit et de cœur de chacun, des a priori et préjugés possibles vis-à-vis de l'homosexualité... Il faut encore rappeler qu'un « coming out » trop précipité peut entraîner des situations graves : nombreux sont les cas de jeunes mis à la porte de chez eux par des parents incapables de comprendre. Il est parfois bon d'attendre que sa propre situation soit stabilisée, pour ne pas se retrouver dans une fragilité encore plus grande, voire dans la précarité. Si le dire aux autres risque d'entraîner de leur part incompréhension, jugement, rejet ou de créer des tensions importantes, il peut être alors préférable de ne pas parler. Dans ce cas, ce n'est pas mentir que de ne pas révéler son homosexualité.
Car pour les autres non plus, l'acceptation n'est pas simple. Si soi-même on a eu beaucoup de mal à s'accueillir, si on a été tenté de nier ou de fuir son homosexualité, il se peut qu'il en soit de même pour son entourage, qui, bien souvent, n'est pas préparé à une telle nouvelle. Il peut être important, avant de « se lancer », de se demander si l'autre est prêt à entendre cette annonce. Sinon, ce serait violer son espace intérieur. Il est encore possible de parler à certains qui sont prêts à entendre, mais pas à d'autres, qui ne sont pas encore capables de comprendre : cela est particulièrement vrai en famille. Dans certaines situations, il faut savoir accueillir le fait que son entourage ne sera peut-être jamais prêt à vivre avec une telle réalité et comprendre que c'est un bien que de ne pas leur en parler. En revanche, si cela permet de clarifier la situation, il peut alors être souhaitable de dire les choses. Et les réactions de l'entourage peuvent être tout aussi surprenantes dans l'autre sens : quoi de plus beau que d'entendre des parents dire à leur enfant qu'il reste le même pour eux, quoi qu'il en soit ? Le fait de parler à ses proches peut engendrer un approfondissement et un enrichissement dans les relations, être une source de dialogue, de partage et de confiance mutuelle.

De manière concrète, si l'on souhaite annoncer son homosexualité à ses proches, il convient d'abord de se demander comment soi-même on l'accueille, comment on l'intègre dans sa vie. Il s'agit de se connaître, de s'accepter, d'être en paix. Il faut ensuite trouver le bon moment, où l'autre est disponible pour écouter ce qu'on a à lui dire. Parfois, ce sont des circonstances qui vont nous amener à « passer à l'action » : parce que tout va bien et qu'on a trouvé enfin un certain équilibre dans sa vie, ou bien au contraire parce qu'on va mal et qu'on a besoin de se sentir compris et soutenu. Quoi qu'il en soit, la bonne attitude est certainement celle de l'humilité : en révélant son homosexualité, on n'a rien à prouver à l'autre, on n'a rien à lui imposer, on parle de son intimité, on lui confie quelque chose de soi. Parfois encore, la meilleure façon de vivre son homosexualité vis-à-vis de son entourage est de pouvoir être soi-même. Il y a des situations qui vont parler d'elles-mêmes sans qu'il y ait besoin d'une formulation explicite : lorsque deux amis sont continuellement ensemble depuis des années, l'entourage se rend bien compte de quelque chose, même si les choses ne sont pas dites. Il n'est pas toujours nécessaire de tout dire pour être compris.

Il peut enfin être bon de trouver une aide, pour ne pas affronter cette étape seul. Comme pour l'acceptation de soi, il est d'abord nécessaire d'avancer dans la prière et le discernement, aidé d'un accompagnateur si besoin. Commencer à échanger non pas d'abord avec un proche mais avec une personne extérieure peut aussi être une étape. Un groupe de parole peut également être un lieu qui permet de se dire et d'apprendre à accepter le regard des autres sur soi. Souvent encore, il est plus facile de parler de certains sujets avec les amis ou les frères et sœurs plutôt qu'avec ses parents : les enjeux ne sont pas les mêmes.
En fin de compte, que l'on dévoile ou non son homosexualité à ses proches, l'essentiel, c'est d'être en paix avec soi-même. Et quand bien même il en coûterait de ne pas pouvoir être en vérité avec les siens, il faut du moins l'être avec soi et devant Dieu.

Un fardeau d'être Gay ?Where stories live. Discover now