Chapitre II: Un Dernier Obstacle Avant le Départ

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«Aucun d'entre eux n'a voulu vous rejoindre?»

Non pas que Guillaume s'en préoccupait réellement, mais en ce début de voyage en bateau, tout était bon pour être distrait. «Quand Gurvand leur a demandé si ils voulaient me rejoindre, ces chevaliers, qui étaient soit-disant les plus braves du royaume, devinrent tous plus pleutres les uns que les autres! La preuve que je suis meilleur qu'eux!»

Le silence revint. Et avec lui, la quête d'occupation de l'écuyer, qui projeta son regard vers l'horizon. A l'ouest, le continent défilait paisiblement entre la peu colorée mer clapotante et le ciel azur, où les nuages formaient de longues et majestueuses ailes blanches. Une barque rendue presque invisible par la distance essayait de récolter les poissons aux écailles argentées, tandis que le bruit commençait peu à peu à revenir sous la forme de cris de mouettes en nuée. Sur la lointaine plage, on pouvait voir les quelques maisons qui formaient un village de pécheurs... Cette contemplation lassa rapidement Guillaume, ce qui le força à revenir à la conversation.

-Et pourquoi on doit aller en Jasarique?

-Tu sais très bien qu'il n'y a que moi qui ai le droit de le savoir, je te l'ai déjà dit.

-Je suppose que c'est au nom de ce secret qu'il n'y a pas non plus de soldats avec nous.

-Exact.

Le vent se leva, portant l'embrun jusqu'à la joue de l'écuyer et gonflant les voiles pour porter doucement le navire vers le sud...

Deux semaines plus tard, Rauvain et Guillaume arrivèrent à l'île d'Assila, qui se trouvait à la pointe sud du continent lossericain d'où ils étaient partis.

Pour profiter de leur dernière escale, le chevalier et l'écuyer se mirent à la recherche d'une auberge où se sustenter. Les rues dans lesquelles ils s'aventurèrent étaient jonchées de déchets que le proche océan aurait très bien pu laisser derrière lui après une formidable avancée. Peut-être que ce raz de marée était également la cause de ces marins aux apparences exotiques parmi les passants, qui étaient peut-être des naufragés. Peut-être que ces habitations délabrées ou de fortune devaient leur état à l'océan, qui lors de sa retraite aurait laissé le Soleil, maître de l'autre immensité bleue, taper jusqu'à ce que l'humidité disparaisse. Ou peut être qu'il n'y a pas eu besoin de catastrophe pour que tout cela soit présent. Après avoir fait presque le tour de la ville à cheval, ils entrèrent dans l'auberge qui avait l'apparence la moins miteuse, se trouvant là où la ville se dissipait dans l'intérieur des terres.

Lorsque la serveuse vint vers eux avec les plats qu'ils désiraient, Guillaume en la voyant ne put que difficilement s'enlever de l'esprit le souvenir insupportable de sa mère, dont le visage avait des traits similaires à la femme qui les servait en ce moment. A cause de cela, il ne put manger sans avoir en tête les images trop nombreuses des pleurnicheries de sa génitrice, qui continuaient à l'énerver des années plus tard. De son côté, Rauvain remarqua que parmi les matelots bruyants qui constituaient la clientèle se trouvait un jeune chevalier, reconnaissable même sans armure grâce à son écu représentant un faucon s'aventurant sur un ciel encore vide. En tendant l'oreille, on pouvait l'entendre exiger plus de nourriture en langue liriéenne accentuée à la manière elardienne. Les raisons pour qu'un chevalier d'Elardie s'aventure sur cette île étant fort peu nombreuses, Rauvain laissa Guillaume pour aller se diriger vers le chevalier à l'autre bout de la salle et l'interroger. En voyant Rauvain, ce dernier et le chevalier se reconnurent mutuellement.

-Ça alors, si ce n'est pas une surprise! Sire Rauvain! Quel bon vent vous amène sur cette île?

-Malheureusement, Sire Merault, je crains que je ne puisse vous le révéler. Mais qu'en est-il de vous?

Quintessence-Grains de Sable PrismatiquesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant