Chapitre LXVIII: Coup de Chance Sacré

1 0 0
                                    

Le dé toucha par l'une de ses arrêtes le bois de la table, avant de s'élever à nouveau. Ses faces, que ce soit l'unique et insignifiant point marque de la malchance, ou la généreuse demi douzaine ne montrant ses atouts qu'aux plus fortunés et pas seulement d'argent, tournoyaient comme le Soleil et la Lune en obéissant à un axe désinhibé. Il descendit, puis remonta après avoir à nouveau touché le sol, avant de redescendre et répéter le cycle encore et encore, malgré l'intensité déclinante des mouvements. Pour finir, le dé devint immobile, un quatre fixé vers le plafond.

-Eh, je m'attendais à plus, commenta Guillaume.

-Tu as déjà de la chance d'avoir plus eu que trois! Plaisanta Bachir. On est en train de te rattraper là, il n'y a que Ahmet qui est à la traîne!

-Que les démons vous emportent tous! Admit le sus-nommé. D'ailleurs, c'est à mon tour, pourrais-je avoir le dé, votre Majesté?

-Ta pas besoin de dire «votre majesté» ou «vous» pour parler de moi.

-Si c'est que tu veux... Mais n'est-ce pas comme cela que l'on doit s'adresser à un roi?

-C'est vrai, mais c'est une question d'habitude.

-Mais il a raison, appuya Bachir. Lorsque tu sera maître du royaume, le premier clochard venu ne pourra pas te parler comme si il était ton copain. Tu en prendrais un sérieux coup à ta crédibilité sinon, et puis même, c'est comme avec tes parents, il doit y avoir un certain respect.

-Moui, mais bon, j'ai les arcanes pour prouver ma crédibilité.

On entendit le dé ricocher sur la table, et Ahmet se féliciter de son score maximal de six.

-Les arcanes ne font pas tout, reprit Bachir. Je ne sais pas toi, mais moi je ne m'imagine pas un roi comme étant la personne la plus forte du royaume. C'est quelqu'un qui à un certain héritage, une certaine grandeur. Un peu comme si tout le pays était une seule personne.

-A part moi, tu as déjà vu un roi? Lança le jeune roi en prenant une gorgée de vin de Rélice.

-J'ai vu Ibn, mais seulement de loin, si il compte. Et toi?

-On va dire qu'Ibn compte. Et à part lui, j'ai vu le roi de Tauvente quelques fois. Aucun des deux n'avaient l'air «royaux» si ce n'était pour leur vêtements.

Un autre, l'un des hommes recrutés par Nakam, lança à son tour le dé, qui semblait maintenant vidé de sa chance, comme l'en témoignait son misérable deux.

-Ibn est un bâtard, donc rien de bien surprenant, et ce roi de Tauvente doit sûrement être méprisé.

-Pas tant que ça, les gens le traitent quand même avec respect, rapporta Guillaume après un court soupir.

-Et donc d'après toi, c'est dû à quoi?

-Je sais pas honnêtement, ils sont peut-être juste stupides. Et toi?

-Je pense, expliqua le déjà vieil homme, que même si ils ne respectent pas l'homme qui porte la couronne, ils respectent quand même ceux dont le sang coule dans ses veines. C'est en tout cas l'une de mes raison pour respecter les rois.

-Et c'est quoi les autres?

-Je dirais que c'est de bien savoir diriger bien sûr, mais aussi de sincèrement aimer son royaume.

-Car il y a des rois qui n'aiment pas leur royaume? Si c'est le cas, ils ne peuvent pas juste refuser la couronne?

-Tu serais surpris du nombre de rois qui voient leur royaume soit comme un moyen de parvenir à leur fins, soit comme un boulet. D'ailleurs, je pense qu'Ibn appartient au premier type, et Raffeid au second.

Quintessence-Grains de Sable PrismatiquesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant