Errances (partie 1)

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Entendant Hanji s'approcher de moi, j'essuyai discrètement mes larmes d'un revers de manche. Mon amie m'aida à me remettre sur mes pieds, ce qui ne fut pas une mince affaire vu l'état pitoyable dans lequel j'étais.

- Allez ma grande, on rentre, annonça-t-elle d'une voix qui se voulait enjouée.

En réalité, elle me semblait elle-même encore sonnée par la scène qui venait de se dérouler sous nos yeux. Livaï n'avait évidemment pas la réputation d'être un tendre, et il n'y allait jamais avec le dos de la cuillère. Mais il était certain, aussi, que depuis son arrivée à la surface personne n'avait jamais du le voir égorger quelqu'un de sang froid, sans ciller un seul instant, comme il venait de le faire. En fait, je n'étais même pas sûre qu'il l'ait déjà fait dans les bas-fonds.

A bout de force et complètement groggy, je me laissai conduire par Hanji. Je me sentais plus pommée que jamais : j'avais consenti à mourir, et j'étais en vie ; je m'étais résignée à ne jamais les revoir, et ils étaient là. Je tentais encore d'intégrer ces vérités dans ma tête qui souffrait déjà d'une migraine terrible, quand je réalisai que nous étions en train de passer devant de la bâtisse qui m'avait retenu prisonnière ces derniers jours. Je retrouvai subitement les idées claires et m'arrêtai.

- Attends, Hanji. Je dois remonter au labo.

Mon amie me regarda avec des yeux ronds.

- Tu n'es pas franchement en état de ...

- Il y a encore des choses là-haut dont il faut absolument se débarrasser, la coupai-je d'un ton fébrile. On ne peut pas laisser ...

- Ah ! T'inquiète pas pour ça, me coupa-t-elle à son tour. On enverra quelqu'un pour s'en occuper.

- Non, tu ne comprends pas ! , dis-je fermement. Je dois le faire. Et je dois le faire maintenant , insistai-je.

Hanji me dévisagea quelques instants puis jeta un coup d'œil par dessus mon épaule, là où Livaï devait très certainement se trouver. Puis, elle poussa un soupir.

- Ok, je comprends. Attends-moi là, je vais prévenir le grincheux.

- Je prends de l'avance, lançai-je en me dirigeant vers la porte.

Je n'avais aucune envie de rester plantée là à l'attendre. C'était prendre le risque de croiser à nouveau le regard du caporal or je ne m'en sentais pas le courage. Je pénétrai dans la demeure et, épuisée, je montai les escaliers en prenant appui sur la rambarde. Arrivée sur le pallier du dernier étage, j'ouvris la porte qui grinça sur ses gonds. Je me tins immobile sur le seuil, m'assurant que le laboratoire était bien désert, comme si Walsh risquait de réapparaître d'une minute à l'autre. Mon esprit avait encore du mal à croire à sa mort et à la fin d'un calvaire long de sept ans. Mon regard s'attarda quelques instants sur la seule fenêtre au carreau cassé et sur les bris de verre au sol. Finalement, prenant mon courage à deux mains, je pénétrai dans la pièce et me dirigeai vers l'unique bureau où m'attendaient les dernières paperasses à détruire.

Tout à coup, une présence sur ma gauche me fit sursauter et pousser un cri de surprise. Mon cœur refusa de se calmer même lorsque je compris qu'il s'agissait juste de mon reflet dans le miroir suspendu au mur. J'en profitai pour détailler la sale gueule qu'était devenue la mienne. J'étais plus pâle que jamais, avec de superbes cernes qui ornaient deux yeux rougis. J'étais amaigrie, le visage légèrement plus creusé qu'à l'ordinaire, et ma pommette gauche arborait toujours une ecchymose qui avait maintenant viré au jaune. Mais mon regard fut surtout attiré par la marque toute fraîche et violacée qui cerclait ma gorge. Je repensai alors à la moue écœurée de Livaï.

Monstre / Livai x readerHikayelerin yaşadığı yer. Şimdi keşfedin