Chapitre 18 L'atout de la différence (1ère partie)

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          — Je peux jouer à l'écureuil avec vous ?

Des petits enfants se pourchassaient entre les arbres. Ils riaient et criaient pour ne pas se faire attraper par un de leur ami. Les rongeurs devaient se percher afin de ne pas devenir le renard. Un enfant s'était approché timidement et regardait les espiègleries avec envie.

— Non. Tu es trop bizarre, Ness.

— Ce n'est pas contre toi. Mais pense un peu à nos familles. On ne doit pas ternir leur réputation.

— Pourquoi est-ce mal de vouloir partir de Blimane ? De désirer voyager ? De découvrir le monde ? demanda-t-il.

— Tu es un aïdem. Tu ne peux pas quitter Blimane.

— Mais pourquoi lui parlez-vous ? Un gland a germé à la place de sa tête et il est aussi bête que ses pieds. Laissez-le s'en aller s'il le souhaite. Blimane connaîtra de nouveau la normalité sans lui. Nous n'avons pas besoin d'une vermine. Pourquoi s'intéressait à lui ? Il nous fait perdre notre temps avec ses idées absurdes. Qu'il parte, ainsi, la paix reviendra. La différence, c'est mal.

La pauvre tête blonde sentit ses yeux lui piquer. Il s'en alla avant que quelqu'un le remarque.

           Il se mit à courir et grimpa à une échelle, clouée à un arbre qui montait vers une cabane. Il s'arrêta à mi-parcours pour effacer les larmes qui coulaient le long de ses joues rebondies. Il s'adossa contre un mur à l'extérieur et glissa sur le sol. D'où il était, personne ne le voyait. Il était trop haut et aucun arbre n'accueillait de nouvelles maisons. Il posa son front sur ses genoux et laissa la tristesse s'emparer de lui.

Le soir commençait à tomber quand la porte d'entrée s'entrebâilla. Une tête aux cheveux noirs émergea pour profiter du paysage que le soleil couchant avait tracé derrière lui. Il se retourna et sursauta en remarquant le petit.

— Mais depuis combien de temps es-tu ici ? Tu devrais te trouver avec maman, s'exclama l'homme.

— Je ne veux plus retourner à l'école. Je ne veux plus sortir, sanglota l'enfant.

— Qu'est-ce qui s'est encore passé ? soupira l'adulte, en allant s'installer à côté de Ness.

— Je ne suis pas un aïdem, articula-t-il.

— Tu as une paire d'oreilles triangulaires et quatre doigts à chaque main et pied. Ce sont nos caractéristiques propres. Si tu penses toujours le contraire alors, qu'est-ce que tu es ?

— Une malformation.

— Je ne laisserais pas mon fils se manquer de respect ainsi, tonna le père.

— Regarde-les, cria-t-il en montrant ses mains. Tous les enfants n'osent pas me toucher, car ils ont peur d'attraper ce que j'ai.

Ses petites menottes étaient toutes ridées, où des morceaux de peau sèche dépassaient de l'épiderme à vif.

— Elles me font mal, Papa. Elles me brûlent et me piquent. Les enfants en sont dégoûtés.

— Nous n'y pouvons rien. Elles resteront malheureusement ainsi. Mais nous savons tous les deux que ce n'est pas la seule raison de ces larmes.

— Non.

— Que se passe-t-il, Ness ?

— Je veux voyager. Découvrir Entre-Monde autrement que par des livres. Mais tout le monde dit que ce n'est pas un comportement normal d'aïdems. Je devrais travailler, me trouver une femme, avoir des enfants et adhérer à l'idéologie aïdemienne.

Entre-Monde - L'envolée des Ténèbres [En Correction]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant