Chapitre 14 L'ombre se révèle (2ème partie)

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          Ce qui me sembla durer quelques secondes pour atteindre Undĕwial nous avait pris toute la nuit en réalité. Quand l'arbre s'ouvrit pour nous laisser sortir, la lumière du jour m'éblouit.

— Leur temps de vie est différent du nôtre, expliqua le magicien. Ce qui représente quelques secondes pour nous est pour lui des heures. Un arbre grandit lentement. Dis-toi que des arbres s'avèrent bien plus anciens que le plus vieux vampire d'Entre-Monde. Apprendre ça doit te rajeunir de plusieurs années, voir des siècles dans notre cas.

           Nous sortîmes de l'arbre. Undĕwial n'avait pas changé. Le ciel toujours bleu et le soleil resplendissant amenait avec lui une température ni trop chaude, ni trop froide. Un endroit idyllique penserait les Entre-Mondiens. Mais beaucoup trop parfait à mon goût.

           Moi seule savais que la perfection était la source des mensonges. Plus tout était parfait, plus le secret qui se cachait sous tous ces artifices était important, voire monstrueux. Et Undĕwial, par son climat irréprochable, l'architecture, les personnes, symbolisait le digne portrait du lieu qui renfermait le plus de mystères.

— Je vais rejoindre le Conseil de Lumière. Est-ce que pendant ce temps, tu peux éviter de te faire remarquer ? me demanda Githrandiar, sans grande conviction.

— Tu n'as qu'à m'emmener, susurrais-je, parfaitement consciente qu'il ne me permettra pas de m'y rendre avec lui.

— Oui, une vampire qui accompagne Githrandiar au Conseil... Je n'ai déjà pas d'estime là-bas. Alors, dispensons-nous d'empirer les choses, répondit le magicien en commençant à monter les marches du château blanc.

— Aucun homme ne peut échapper aux classes sociales, mais peut-être parce que vous aimez être rangés dans des boîtes et étiquetés. Mais je suis une femme, et Entre-Monde vit depuis trop longtemps dans des pensées renfermées. Les convictions doivent changer dans ce monde qui crève petit à petit.

Githrandiar ne répondit pas, mais je le sentais en accord avec moi. Enfin, il prenait part à mon avis, tout en restant retranché dans les opinions qu'on lui avait transmises.

          Je le vis refermer derrière lui la grande porte en bois qui protégeait l'entrée du château. Nul n'y pénétrait ou n'en sortait, sans la permission du Magicien de Lumière. Peu de personnes étaient donc reçues dans le palais du Conseil. C'était surtout les sujets importants, examinés par les membres permanents, qui étaient les privilégiés. En effet, Githrandiar ne siégeait à Undĕwial que par son titre de magicien, alors que son rôle de missionnaire ne consistait qu'à soigner des blessures plus ou moins conséquentes. Il utilisait rarement son art. Mais il est une partie de la clé qu'il me faut pour entrer au cœur de l'Entre-Monde.


          — J'ai beaucoup aimé ce que tu as dit à l'homme Sans-Visage.

Je me retournais, déçue que le réel me tire hors de mes pensées. Une femme aux beaux cheveux mi-courts me dévisageait de ses yeux bleus océan.

— Normal que tu ais apprécié mes paroles. Ta féminité ne pouvait répondre le contraire, affirmais-je en me renfermant sur moi-même.

— Pas seulement, roucoula-t-elle.

Je la regardais en fronçant les sourcils. Elle mit ses mains dans sa crinière presque blanche, et la fit légèrement voler dans la brise matinale.

— Si tu me fais la cour, tu perds ton temps, petite sirène, ricanais-je.

— Plus tard alors, concéda-t-elle, tout en ne se laissant pas démonter.

Elle continuait à me contempler, comme si elle espérait obtenir quelque chose de moi.

Entre-Monde - L'envolée des Ténèbres [En Correction]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant