33 - Mère tueuse

522 59 66
                                    

« J'avais neuf ans. Nous étions le 31 aout, je devais retourner à l'école dans deux jours, et ma maman avait disparus. Ça faisait trois jours qu'elle était pas revenue. Il était dix-neuf heures, je mangeais avec mon papa. Il paraissait inquiet. Pas moi. Quand maman étais pas là, ça faisait du bien. Personne ne criait, personne ne me tapais. C'était mieux. Et mon papa me cuisinait des choses que maman aimait pas, mais que moi j'adorais.

J'avais presque la tête dans mon plat de pâtes à la carbonara quand la porte s'ouvrit avec violence. Je sursautais et me redressai, pour apercevoir maman, debout à l'entrée du porche. Ses mains étaient pleines de sang, ses cheveux roux comme moi étaient poussiéreux, et elle boitait. Mon père se précipita pour aller l'aider, et je me levai aussi, mais restai à distance. J'avais peur qu'elle me vois...

Ils allèrent dans la cuisine, et je les entendis chuchoter :

- Sandie ! Mais qu'est-ce qui est arrivé ? T'étais passée où bon sang ?!

- Patrick, Patrick... tu ne comprends jamais rien. Aide-moi à me débarrasser de ce sang. Et dis à ta malade de fille d'arrêter d'épier nos conversations !

J'écarquillai les yeux tandis qu'elle se tournait vers moi pour me foudroyer du regard. Ses yeux semblaient fous. Je gémis en faisant un pas en arrière. Ma mère avait du sang jusque sur le visage, et elle semblait furieuse. Mon papa recula d'un pas :

- C'est aussi ta fille que tu le veuille ou non.

- Dis-lui de dégager ou j'hésiterais pas à refaire un deuxième meurtre ! hurla ma maman.

Je tremblai. J'avais peur. Mon papa m'attrapa et me porta en courant jusque dans ma chambre. Il me posa dans mon lit alors que je pleurais :

- Papa... Qu'est-ce qu'il se passe ... ?

- Rien Morgane, tout va bien se passer. Ne sors surtout pas de ta chambre, compris ?

J'hochai la tête en reniflant et me blottis dans mon lit, les yeux grands ouverts. Il y eut du silence, puis des cris. Ils se disputaient encore... Des bruits de vaisselle...

Puis ce fut du bruit dehors qui me fit me redresser. Des sirènes de polices, des voitures qui se garaient... De nombreuses voix... La porte d'entrée s'ouvrit avec fracas et je me précipitai sur le rebord de la fenêtre.

Le jardin était plein de gens, de bruits, des hommes habillés en bleu sortaient de voiture pour entrer dans notre maison. J'entendis ma mère hurler, puis je la vis sortir avec les policiers. Ils la tirèrent vers la voiture la plus proche.

Avant de rentrer, je vis ma maman se tourner, et ses yeux se braquèrent sur moi à travers la vitre. Je me figeai et je la vis pointer un doigt vers moi. Sa voix me parvint distinctement :

- Tout est de sa faute !

Je pleurai, tout mon corps tremblant, tandis qu'elle se fit pousser dans la voiture, et emmener loin de moi. Qu'est-ce qu'il venait de se passer... ? »

- Alors ...? Me relança James devant mon silence prolongé.

Je secouai la tête et clignai plusieurs fois des yeux en retournant dans le présent. Je regardai tour à tour les deux bandits, quelque peu troublée. Depuis que j'étais avec eux, mes souvenirs s'étaient calmés. Certes, j'avais des brides de souvenirs à chaque odeur, chaque son, chaque phrase prononcée, chaque élément vu. Mais ces souvenirs qui me transportaient, me faisaient oublier la réalité, me ramenaient dans le passé se faisaient de plus en plus rare. Je finis par reporter mon attention sur James :

Mémoire en CavaleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant