— Notaire et psy ? Et vos parents dans tout ça ? Docteurs ? PDG ?

— Vous n'y êtes pas. Ma mère est une auteure célèbre et mon père était un honnête artisan.

— Il est donc décédé ?

— Je venais d'avoir quinze ans. Tué d'une balle dans la tête.

Oh.

— C'est pour ça que vous avez voulu faire psy ? Pour comprendre les gens ? Même les tueurs ?

Il se rencogna dans le canapé et croisa ses jambes. Il n'y avait aucune trace de tristesse ou de regret sur son visage. Il avait fait son deuil.

Mais était-il passé à autre chose pour autant ?

— J'ai l'impression que cet échange ne va que dans un sens, Mazakeen.

— Ça me va.

— Votre famille est-elle au courant de ce qui vous ait arrivé ?

Je haussai les épaules :

— J'ai omis des détails. Ils savent ce que j'ai jugé nécessaire.

Inutile d'inquiéter tout le monde et de rameuter toute la famille Fairfax pour des broutilles. Même si j'avais bien failli y rester.

— Bon.

Le doc referma son carnet avec un soupir et me fixa. Ses yeux me sondèrent et je me fis violence pour ne pas me tortiller sous son regard scrutateur.

— J'ai accepté que vous quittiez l'hôpital plus tôt à une seule condition, Maze ; que parlions. Et il n'est pas question de parler de la pluie ou du beau temps. Vous avez eu un accident. Si un lycan n'avait pas été là, vous seriez sûrement morte dans votre voiture.

Dit comme ça. Je me frottai la nuque.

— Vous voulez que je vous dise quoi au juste ?

— Vous préférez commencer par quoi ? Abel Kickett ou Warren Archeon ?

J'aurais voulu sceller ma bouche pour toujours. J'aurais voulu anesthésier mon cœur. Stupide organe.

— Et quoi que vous fassiez, nous en viendrons à Ashika aussi.

Un couteau qu'on enfonçait. Encore.

— Pourquoi ? soufflai-je. Parler apaise-t-il ?

— Et l'alcool ? Le déni ? répliqua mon psy, dur.

— Ça aide, avouai-je. Sur un court terme.

Je laissai mon regard glisser vers la baie que j'avais ouverte, histoire de faire entrer un peu d'air. J'inspirai.

— J'ai connu Abel en même temps que le Krig et que tous les loups composant le Fief.

Je fronçai les sourcils.

— En fait, non. Je l'ai rencontré la veille de ma présentation officielle. J'étais dans un bar et lui aussi. Sa technique de drague était un peu lourde, mais on a fini par cuver tous les deux ; parfaits étrangers que nous étions.

Ouais, je m'en souvenais. Et le lendemain, il m'avait copieusement ignorée. Petit con.

— Abel est sûrement la plus grande tête de mule que je connaisse, mais il pensera toujours aux autres avant lui-même. Hachi... Hachi était comme sa gamine. C'était le cas pour tout le monde. Abel est un trou du cul, mais ici, c'est ce qui se rapproche le plus de mon meilleur ami.

Même si ces derniers temps, nous avions été incapables de nous comprendre lui et moi. Pour autant, je savais ce que je lui devais.

Je savais que lui et moi, on pouvait compter l'un sur l'autre.

OUR ANCHOR T1 Broken [Terminée]Where stories live. Discover now