66 || Maze

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Je cherchai mes clopes. Je refermai le tiroir un peu trop fort et je m'arrêtai, histoire de reprendre mon souffle. J'étais épuisée. Pas seulement physiquement – ce qu'on était en droit d'attendre après un accident pareil –, mais aussi moralement.

Est-ce que j'étais au bout du rouleau ? C'était donc ça, cette impression qui me collait à la peau et qui me compressait jusque mes organes ? Probablement. J'avais envie de rester allongée, toute la journée, voir la lumière de jour décroître progressivement et fermer les yeux au moment où la nuit était la plus profonde.

Mais pour l'heure, j'avais juste envie d'une cigarette et d'un grand verre d'alcool. Le plus fort que j'avais sous la main.

Anesthésié mon cerveau.

Endiguer le flot de souvenirs et la voix d'Ashika.

J'étais comme une merde. Je n'étais plus... moi et ça me bouffait. Ça me grignotait. Ce n'était pas lent ; c'était mortel.

Est-ce qu'on pouvait mourir de malheur ? Est-ce qu'on pouvait finir écraser par le poids de son passé ? De ses regrets ?

— Vous comptez revenir par ici, Mazakeen ?

La voix du Docteur Pratt me fit grincer des dents. Avoir son psy chez soi n'avait rien d'un putain de plaisir. Au contraire. Pourtant, il l'était bel et bien, assis dans mon canapé, avec son flegme habituel et sa patience exacerbée.

J'avais envie de le frapper. Je serrai les poings.

— Pourquoi faire ? grommelai-je, d'une mauvaise foi légendaire.

Son rire emplit l'appartement et j'eus envie de me boucher les oreilles. Je n'avais plus envie de côtoyer le bonheur de près ou de loin. Je voulais ériger une porte entre lui et moi ; une montagne. Je ne voulais plus jamais l'effleurer.

J'étais trop cassée.

Pourquoi les gens avaient-ils une telle emprise ? Un tel pouvoir ? POURQUOI ?!

— Nous savons tous les deux que vous êtes une femme de parole.

Vraiment ? J'avais un sacré doute. Je finis par retourner dans le salon et m'affalai dans mon fauteuil, juste en face de Nate.

Nate.

Mon psy n'avait définitivement pas une tronche à porter ce prénom. Comme quoi. Les Nate faisaient du surf. Les Nate brisaient des cœurs.

Les Nate étaient des tombeurs aux yeux doux. Mon psy ? C'était un dragon sous des airs d'homme parfait.

Nate Pratt. Vraiment ?

— Rappelez-moi ce que fait votre frère, doc, dis-je.

— Pourquoi ce soudain intérêt pour lui ?

Je fis la moue et ramenai une jambe contre moi. Je fis tourner mon bracelet autour de mon poignet, perdu dans sa contemplation quelques secondes.

— Je me demandais comment il s'appelait. Qu'est-ce qui pourrait bien aller avec Nate, vous voyez ? Gideon ? Arthur ? Oh ! Christian ? Non, non. Peut-être Greg ? C'est tendance, juste Greg.

Ça le fit sourire et il posa son stylo à côté de sa cuisse. Comme toujours, il était très bien habillé. Une chemise claire avec un gilet sans manche. Ça faisait très Mentalist. Nate avait un petit air de Patrick Jane c'était sans dire.

— James Pratt, répondit-il. Mon petit frère de quelques années. Il est notaire à Adélaïde, à quelques heures d'ici.

Je hochai la tête parce que je savais où c'était ; Achilles y avait passé un certain temps.

OUR ANCHOR T1 Broken [Terminée]Donde viven las historias. Descúbrelo ahora