Chapitre 12 Hasard épineux (1ère partie)

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— Arrête tout de suite cette rafale ! gronda le Roi d'Elfira.

— Et si je n'en avais pas envie ? annonça-t-elle, un sourire en coin, en appuyant bien sur les mots.

Elle plissa ses yeux avec un air de pure rébellion.

— Mais je dois tout de même t'avouer que, pour une fois, ce climat tumultueux ne dépend pas de moi.

— Je ne tolère pas le mensonge à Elfira ! Cesse cette tempête qui arrive et tu seras récompensée.

— Et quelle compensation recevrais-je ? répondit-elle en tapant dans ses mains et en sautillant sur place, comme un enfant devant un cadeau. Le bonheur de ne pas retourner dans mon cachot ce soir pour y dormir et me réveiller, le corps gelé ?

Sa voix était montée dans les aigus, donnant l'impression de bonheur et de hâte.

— Je pourrais aussi prévenir Undĕwial que tu es là, devant moi, à Elfira, susurra-t-il. Depuis plus de deux ans qu'ils continuent à te chercher... espèce de bâtarde, rétorqua Quvhalion en s'approchant dangereusement de la jeune femme.

Il tenait dans sa main le poignard qu'elle avait lancé.

— Est-ce que ça serait si grave si je te tuais ? À quoi pourrait servir une... chose comme toi en Entre-Monde ?

— Tu peux me traiter autant que tu le veux de bâtarde, ce n'est pas de ma faute si j'existe. Tu n'arrêtes pas de répéter que je dois tout à Elfira, mais on ne m'a pas demandé si je souhaitais naître. Faire un enfant est l'acte le plus égoïste au monde, cracha la femme.

Le visage venimeux de Quvhalion était pétrifié, face au cynisme de la vampire.

— De toute façon, tu commettrais la plus grosse erreur de ton règne si tu me tuais maintenant. Ton Royaume ne tient plus qu'à un fil et je suis celle qui le retient de se casser.

Le regard de Quvhalion se perdit dans le ciel noir, où l'orage enrageait dans la plaine.

Il partit furibond et monta les marches quatre à quatre. La jeune femme le toisa, et sourit de l'affolement naissant du roi et de son inaptitude de protéger son Royaume.

— Je remarque que tu me tiens à ta merci et que je suis obligé de passer un accord avec toi. Fais ce que tu veux, mais qu'Elfira n'en subisse pas les conséquences. Et moi, si l'on me pose des questions, je répondrai que je ne t'ai pas revu depuis le jour où je t'ai enfermé dans ce cachot, déclara solennellement Quvhalion, avant de disparaître à l'intérieur du château.

— Tu crois toujours pouvoir avoir le dernier mot avec moi on dirait, pourtant mon tableau de victoire pour clouer ton sale bec augmente, chaque fois que tu t'attaques à moi, lui cria-t-elle en ricanant.

Elle se détourna du palais, et constata que l'ombre avait gagné l'étendue du paysage.

— Pauvre seigneur d'Elfira. Tu es bien miséreux face à ce qui arrive par l'Est. Tous les souverains devront faire face à leurs petitesses devant la noirceur des ères à venir, déclara-t-elle en exultant avec mépris.

           Le ciel avait viré au noir sans âme. Des éclairs striaient les nuages, d'abord, évanescents, puis de plus en plus nets et épais. La lumière du jour avait totalement disparu, laissant une ombre étrange s'étendre à l'horizon.

           Les cheveux roux flamboyant de la jeune femme avaient pris la couleur du sang. Ils volaient dans l'air en glissant sur son visage.

           Les odeurs se mêlaient dans le vent. Le lilas avec le miel. Les fruits avec la cannelle. Les sapins avec le pain chaud. La lavande ou l'iris avec l'effluve du poil des chevaux. La plaine versait des parfums enivrants, s'harmonisant les uns aux autres. Soudain, un éclair jaillit de la pénombre installée. L'eau avait pris un reflet blanc éclatant, puis retrouva sa tonalité clair-obscur.

Entre-Monde - L'envolée des Ténèbres [En Correction]Where stories live. Discover now