Amours & cupidités

11 - Le cœur de Louise

Ils font le trajet en silence, appréciant tous les deux d'être en compagnie l'un de l'autre, sans pour autant oser parler, de peur de gâcher ce moment par des propos qu'ils pourraient ensuite regretter. En arrivant devant le portail de la magnifique propriété, ils s'arrêtent. Nicolas se penche un peu sur sa monture pour distinguer la demeure au fond de l'allée.

– Nicolas, pourriez-vous m'aider à descendre, s'il-vous-plaît ?

Il se fustige de n'y avoir pas pensé de lui-même.

– Oui, bien sûr, pardonnez-moi.

Il met pied à terre et vient près du cheval de Louise. Il la prend par la taille alors qu'elle prend appui sur ses épaules. Ils se retrouvent dans les bras l'un de l'autre sans pouvoir s'empêcher d'être gênés. Nicolas s'écarte, il n'a plus droit à aucune prétention. Louise s'approche de la grille, et glisse une clef dans le cadenas qui la ferme.

– Voulez-vous visiter ?

Il prend leurs deux chevaux par la bride et la suit dans l'allée principale.

– Avec plaisir.

Elle lui montre les arbres les plus beaux, dans lesquels elle est montée, petite, les chemins forestiers qui s'ouvrent sur le parc depuis l'allée. Elle lui raconte les souvenirs qu'elle a ... Elle crée un nouveau souvenir en inscrivant Nicolas dans le paysage qu'elle chérit le plus.

Sur la route pour venir elle a longuement réfléchi : elle a donné sa parole à Thomas. Son honneur lui interdit de la reprendre. Si elle est tombée sous son charme, la visite du jeune homme qui est à présent à ses côtés, lui a fait comprendre que l'affection qu'elle a pour son fiancé n'est rien en comparaison de celle qu'elle porte à Nicolas. Cette prise de conscience lui coûtera son bonheur, elle en est persuadée. Mais elle ne peut pas imaginer un seul instant trahir la parole donnée, alors la seule chose qu'il lui reste c'est ce moment avec Nicolas, cette promenade à cheval finalement accordée, alors que Thomas est reparti à Paris pour affaires. Elle fait entrer l'homme qu'elle aimera toujours sur des terres où vivra l'homme qu'elle épousera pour toujours.

Ils ne peuvent pas entrer dans la demeure, Louise n'a pas pris les clefs. Ils se contentent donc d'en faire le tour. Nicolas est admiratif de ce qu'il découvre.

– C'est un lieu enchanteur, Louise, je comprends pourquoi vous vous y sentez si bien. Je ne vous pas seulement de la beauté des lieux, il y a une atmosphère ... ah ! j'aurais aimé ...

Ses yeux croisent ceux de Louise. Il s'interrompt et lâche un soupir qui s'élève dans l'air froid, laissant sa phrase en suspension à jamais. Il y a des choses qui n'ont pas besoin d'être exprimées. Ou qui ne doivent pas l'être dans certaines circonstances. Si Nicolas ne s'était pas arrêté, Louise l'aurait empêché de continuer. La jeune femme vient reprendre la bride de son cheval.

– J'ai un endroit en particulier à vous montrer Nicolas.

Il l'aide à se remettre en selle avant de remonter lui-même à cheval et de la suivre sous la frondaison des arbres qui entourent la demeure. Ils suivent un chemin forestier assez large pour laisser passer leurs deux montures côte à côte et s'enfoncent de plus en plus loin dans le parc. Au départ, Louise se tait, mais elle prend finalement la parole pour expliquer :

– Quand j'ai eu quatre ans, mon père m'a mise sur un cheval. Il avait l'habitude de souvent partir en balade avec ma mère et ils voulaient m'emmener avec eux. J'ai rapidement compris le principe et j'ai pu me joindre à leurs expéditions. C'est à cette époque que mon père a commencé à passer plus de temps à Paris pour ses affaires, il avait des problèmes apparemment. Maman et moi sortions régulièrement dans la campagne, et c'est devenu une habitude presque journalière.