🌟61. Brokenhearted

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Elle avait franchi la barrière à peine quelques secondes avant moi.
Pourtant, il avait fallu que je confirme mon identité après être descendu du taxi pour pouvoir entrer.
Jamais, ces mesures de sécurité ne m'avaient paru aussi agaçantes.
Tout ça, parce qu'un jour, un groupe de fans avait cru que ce serait fun de me rendre une petite visite. Ils avaient défoncé ma barrière, avant d'envahir la cour et le jardin. Ç'aurait pu être cool, s'ils n'avaient pas été plus d'une cinquantaine. Malheureusement, ça avait plus eu l'air d'une émeute que d'une visite de courtoisie. Et depuis, ma maison était aussi sécurisée qu'une forteresse.
Sara était encore dans le vaste garage au plafond entièrement dallé de lumière LED, lorsque j'entrai à mon tour. Je m'appuyai contre la Mercedes sans un mot et croisai les bras sur mon torse en tapant du pied en signe d'impatience.
Il était neuf heures du matin, et elle rentrait à peine. Génial ! Je n'avais pas dormi de toute la nuit. J'avais embarqué dans le premier vol Chicago - L.A. que j'avais trouvé, car le jet privé du label n'aurait pas décollé pour mes problèmes personnels.
Durant tout le trajet, j'avais réfléchi à ce que je lui dirais lorsqu'on aurait une discussion. Désormais, elle était là, devant moi et je ne savais pas par quoi commencer.
— Je sais ce que tu as vu sur internet, débuta-t-elle en se mordant nerveusement la lèvre inférieure.
— Normalement, je crois que c'est la victime qui parle d'abord, rétorquai-je froidement alors que je bouillais intérieurement.
— Il y a une explication. Ce n'est vraiment pas ce que tu crois.
— Ah non, Sara, pas ça ! Pas toi ! C'est l'excuse que toutes les petites putes sortent quand on les prend sur le fait. Trouve autre chose ! Je mérite mieux. Je méritais mieux que tout ça, putain ! explosai-je à la fin.
Cette discussion ne pourrait pas se dérouler dans le calme. J'aurais beau lutter, mais je n'arriverais pas à contenir toute la haine que j'avais en moi.
Sara, elle, avait l'air de plus en plus angoissée. Elle fit quelques pas hésitants dans ma direction et tenta de se justifier d'une voix implorante :
— J'étais seule et...
— Tu ne le serais pas si tu étais foutue de répondre à ton putain de téléphone, crachai-je, avec hargne. Mais comme toujours, fallait que tu fasses ta diva et que tu décroches pas.
— Je... je... ne voulais pas te parler, admit-elle la mine contrite. Rick, tu m'as avoué m'avoir épousée pour cacher le fait que t'aimais les hommes. Je voulais... j'avais besoin de temps, ânonna-t-elle en bougeant les mains.
— Pour moi, mais pas pour Shawn, soulignai-je d'un air dégoûté. J'ai passé chaque putain de seconde de ces deux derniers jours à penser à toi. Et pendant que j'étais sur scène à crier au monde comme je t'aimais, tu te tapais Shawn et me faisais passer pour un gros con.
— Je ne...
— Je t'avais ordonné de ne plus lui parler, criai-je.
— Tu n'es pas mon propriétaire, Rick ! protesta-t-elle.
— C'est très vache de te part, Sara ! Super vache. Je ne méritais pas ça, bon sang ! soupirai-je, le cœur en miette.
— Il n'y a rien eu de plus que ce baiser, prétendit-elle d'un ton larmoyant. Et c'est parce que j'étais perdue...
— Ah ! T'étais perdue ? partis-je d'un rire sans joie.
— Il ne s'est rien passé, Rick. Crois-moi !
— Il ne s'est rien passé, Sara ? repris-je d'un air menaçant.
Elle me prenait vraiment pour un con ?
Je me redressai, les poings et la mâchoire contractés à l'extrême en me rapprochant d'elle pour la dominer de toute ma hauteur. Elle recula en tentant vainement de cacher sa frayeur, mais je savais qu'elle avait peur.
J'étais certain qu'à ce moment-là, mes yeux brillaient d'une lueur démente. Justement, je me sentais capable de tout. Je voulais que le monde autour de moi brûle. J'avais envie de tout casser... J'avais mal !
Elle se retrouva vite coincée contre l'une des portières de sa voiture et ferma les yeux, comme si elle n'avait pas le cœur à voir la suite.
— Il ne s'est rien passé ? sifflai-je tout près de son visage. Où as-tu dormi ?
— Je...
— Où t'as dormi, bordel ? hurlai-je en frappant violemment la vitre derrière elle.
Elle sursauta et fondit en larmes. Comme si ça allait arranger quoi que ce soit. Comme si j'allais avoir pitié d'elle ! Comme si ça changeait le fait qu'une photo d'elle et Shawn en train de s'embrasser faisait le tour des réseaux. Comme si j'allais avoir moins mal !
Mes yeux me brûlaient. J'étais sur le point de m'étouffer. Ma poitrine menaçait d'exploser. Des images d'elle et d'Adams tournoyaient dans mon esprit et me poignardaient le cœur à chaque nouveau battement.
J'avais envie de couper les doigts de ce connard l'un après l'autre.
Personne d'autre n'avait le droit de la toucher ! Personne ne devait la faire sourire comme je savais le faire. Elle était censée être à moi... à moi seul.
— Pourquoi tu m'as fait ça ? sanglotai-je lamentablement. Pourquoi ?
Ses joues aussi étaient inondées de larmes. Son expression suppliante ne l'avait toujours pas quittée, et elle déposa délicatement ses mains sur mon torse comme pour m'amadouer. Cependant, en me souvenant de qui elles avaient touché quelques heures plus tôt, je reculai brusquement, comme si son contact m'avait brûlé.
Elle laissa retomber ses bras contre son corps dans un geste abattu et renifla :
— Tu m'as dit que tu voyais un mec. Ça m'a fait remettre en question toute notre relation. Et après un moment, lorsque je décide de passer l'éponge, je te vois pleurer devant les messages de quelqu'un qui n'est censé rien représenter pour toi. Mets-toi à ma place. Tu te serais senti comment ?
— Oh, c'est vrai ! Changer de bite était la meilleure solution, cinglai-je avec sarcasme.
— Il ne s'est rien passé Rick, crois-moi, me supplia-t-elle.
C'était impossible ! Je ne pouvais pas la croire. Je connaissais Shawn, et si elle m'avait menti pour continuer à lui parler, c'était qu'il lui plaisait... ou plus.
— Tu as dormi où ? répétai-je en sachant pertinemment que la réponse allait me briser.
— Chez lui, mais...
— Tais-toi, la priai-je en me prenant la tête entre les mains.
Mon crâne allait exploser.
— Rick... tenta-t-elle.
— La ferme ! vociférai-je et elle s'immobilisa.
Quelle fille embrassait Shawn Adams et dormait chez lui juste pour regarder un film ? Zéro ! Ça n'existait pas et n'existerait jamais. Shawn était beau, tatoué, parfait... Il avait fallu qu'on se fâche pour qu'elle se jette dans ses bras. J'étais donc si facilement remplaçable ? J'avais mal à chaque recoin de mon âme, putain !
— Il t'a prise comment ? T'as aimé ? Tu as crié son nom ? débitai-je comme un cinglé. Réponds ! braillai-je en la secouant par les épaules. T'as pas pensé à moi ? Pourquoi, Sara ? pleurai-je. Pourquoi ? reculai-je en titubant.
Je me sentais pitoyable, mais ne pouvais rien y faire. J'avais le cœur en mille morceaux. Je me demandais comment il faisait pour continuer à battre d'ailleurs. Je voulais mourir. C'était trop dur.
— Je t'aimais de toute mon âme, articulai-je dans un souffle, à bout de forces.
— Tu m'aimais, répéta-t-elle d'un air désespéré, comme si je lui avais annoncé qu'elle souffrait d'une maladie mortelle.
Pourtant, cette fois, la tristesse de ses grands yeux verts ne m'atteignait pas. Ces yeux où j'avais l'habitude de déceler de l'admiration quand j'avais fait ou dit quelque chose qui lui plaisait. Ces émeraudes où je savais lire « je t'aime » quand on faisait l'amour. Je me demandais si elle avait regardé Shawn de la même façon.
Cette pensée me comprimait la gorge, et m'écorchait de l'intérieur. Elle n'avait pas le droit de me faire ça, au moment où j'étais entièrement à elle ; au moment même où elle était la seule étoile au centre de ma galaxie...
Ravagé par l'amertume, je pris alors une décision : elle aussi allait avoir mal. Elle allait souffrir pour m'avoir brisé le cœur. Ce qu'on avait était trop précieux, trop pur. Sara Hood allait payer pour avoir tout gâché.
— Oui, je t'aimais, jetai-je en me composant un masque impénétrable. Au passé ! Tu ne penses quand même pas que j'allais t'accueillir à bras ouverts, après ça ? Je me suis trompé sur ton compte. T'es une salope, Sara ! Dire que j'avais tellement hâte de te voir ; alors que toi et ton mec, vous allez au restau, vous vous embrassez dans la rue, et vous passez la nuit ensemble. Tu m'as bien eu. Chapeau !
Des larmes s'échappaient à grosses gouttes de ses yeux. J'avais moi aussi réussi à la blesser. Ça m'apporta une succincte satisfaction, sans pour autant atténuer l'immense douleur localisée entre mes deux côtes.
— Je regrette de ne pas être allé à ce rendez-vous, renchéris-je avec méchanceté. Dire que je te respectais assez pour ne pas te tromper ! Tu ne méritais rien de tout ça, Sara. On ne fait pas de sacrifices pour les petites putes dans ton genre. Elles ne peuvent jamais le comprendre. J'aurais dû savoir que tout ce qui t'intéressait, c'était de remplir tes poches. J'aurais dû me douter que tu irais chercher une plus grosse...
Je n'avais pas pu continuer, car elle m'avait infligé une claque monumentale qui me laissa éberlué et la joue en feu. Ça aussi, je me fis la promesse de le lui faire payer.
— Tu n'as pas le droit de me parler comme ça ! clama-t-elle avec des sanglots dans la voix.
— Tu as perdu le privilège de me dire quoi faire à la minute où t'as décidé de coucher avec lui, répliquai-je, les dents serrées et les narines frémissantes.
Il fallait que toute cette rage sorte. Je devais au plus vite évacuer toute cette douleur qui menaçait de me bouffer de l'intérieur. Je voulais hurler, casser des objets, me servir de mes poings... Mais je n'oserais jamais lever la main sur elle, peu importait ce qu'elle avait fait. Cependant, il me devenait de plus en plus difficile de garder mon calme. Alors je décidai de partir. De toute façon, je n'avais plus rien à lui dire.
J'avais presque atteint la porte lorsqu'elle honnit en criant presque :
— C'est parce que ça tourne viral que tu as mal. Ce baiser aurait eu lieu, tu serais au courant ; s'il n'y avait pas eu de photos, ça ne t'aurait pas fait si mal que ça. De toute façon, tu allais revoir M.S. tôt ou tard. Notre amour était juste une illusion. Je ne t'ai pas brisé le cœur, Rick ; ton image l'a fait. Cette image à laquelle tu tiens tant. Bad boy !
— Tu vas souffrir Sara, fut la seule chose que j'ajoutai avant de reprendre ma route, une couche de glace, remplissant les fissures de mon cœur brisé.
Elle avait tout faux. Les réseaux sociaux et les magazines à potins étaient les cadets de mes soucis.
J'avais mal, parce que quelqu'un d'autre l'avait touché. Elle. Ma Sara. Celle avec qui j'avais partagé tous ces fous rires. Celle qui m'avait appris à skier et avec qui j'avais voulu passer ma vie... Imaginer les mains de Shawn sur elle me tuait... Rien que pour cela, je voulais qu'elle souffre.
Alors, lorsque les rrivers s'étaient mis à lui pourrir la vie ; je n'avais pas le moins du monde réagi.
Tout internet attendait ma réaction. Twitter était déchaîné. D'un côté, il y avait ceux qui me témoignaient leur soutien. D'un autre, ceux, comme Michael qui étaient trop contents et qui parlaient de Karma.
Les mèmes et les publications m'avaient vite lassé et j'avais désactivé tous mes comptes. Maryse avait d'abord été horrifiée parce que ça portait préjudice à la tournée, puis ensuite s'était écriée :
— T'es un génie. Ça ne fera qu'inciter les gens à parler de toi. Et quand ils se seront calmés, tu reviendras et ça recommencera. De plus, s'il n'y a aucun extrait de ta tournée en ligne, les gens ne seront que plus intéressés à venir te voir jouer. Il n'y a pas de mauvaise publicité. Vraiment, t'es un génie !
Je m'en foutais d'être un génie. Je voulais juste qu'on me foute la paix. Partout, on ne parlait que de ça, et j'en avais plus que marre.
En moins de temps qu'il n'avait fallu pour le dire, Sara était devenue une célébrité. C'était normal ! D'habitude, j'étais celui qui faisait ce genre de coup, pas l'inverse. Tout le monde voulait savoir mon ressenti sur la situation, mais je ne disais rien. Je ne parlais même presque plus. Ça nécessitait une force que je n'avais pas.
Sara avait peut-être raison en fin de compte. Le fait que ça ait tourné viral avait aggravé la situation. Que j'en entende parler à tout bout de champ avait fait naître une colère et une haine noire en moi. Et à mon avis, celles-là n'étaient pas prêtes de partir.
Pour couronner le tout, cette chieuse de Monica avait embarqué dans l'un des tour bus à la dernière minute. J'avais réalisé que ça ne servait à rien de la repousser. Elle était trop obstinée. J'avais donc abandonné et supporté sa présence en silence.
Mais là, elle me tapait sur les nerfs à me dévisager, alors que je ne faisais rien d'autre que jouer distraitement avec une balle de tennis. Je simulais de l'ignorer, installé à l'autre bout du sofa en arc de cercle du bus, mais j'étais à deux doigts de péter un câble.
Je savais qu'elle allait parler d'un moment à l'autre, et je n'avais nullement besoin de mentionner que je n'en avais rien à foutre de ses conseils.
— À mon avis, tu devrais faire quelque chose pour cette fille, déclara-t-elle.
Je disais... Attendez : à son avis ? À quel moment lui avais-je proposé de m'en faire part ? Je feignis la surdité et continuai à envoyer et attraper la balle.
— C'est vrai, ajouta-t-elle, persévérante... et chiante. Elle t'a peut-être fait du mal, mais tes fans lui font vivre un enfer. J'ai vu une vidéo où une fille la bousculait et jetait le contenu de son sac, tandis que tous les gens autour rigolaient. Personne ne mérite de vivre ça. Maryse, dis-lui !
La manager me scruta un long moment, avant de serrer les lèvres et de détourner le regard sans rien commenter. Elle, au moins, savait qu'il était inutile d'insister quand j'étais dans ces états-là.
— Ces gens te vénèrent, Rick, reprit ma sœur, casse-couille. Tu dis un mot et tout est fini. Ils t'écouteront. Si tu veux rompre avec cette fille, fais-le bien. Tu te sers de tes fans pour te venger d'elle. Ce comportement est vraiment puéril.
Le label avait mis comme d'habitude, deux bus de tournée à notre disposition. Un pour moi et les musiciens, et l'autre pour l'équipe technique. Contrairement à mon habitude, j'étais dans le deuxième parce que les regards en biais des gars me tapaient sur les nerfs. Mais finalement, je décidai que c'était plus supportable que les babillages de Monica.
J'appelai d'abord Jason pour lui demander qu'on fasse arrêter l'autre bus. Ensuite, je pris ma valise et descendis après avoir ordonné que le chauffeur se range sur le côté de la route.
J'entendis quand même Monica pester après mon départ :
— Non, mais il n'écoute jamais personne ? Pourquoi on l'a gâté comme ça ? Lui non plus n'est pas un saint, à ce que je sache. Je ne connais pas cette fille, mais...
Le reste de la phrase s'était perdue dans le vent, car j'étais déjà loin.
Je montai dans l'autre bus sans daigner saluer quiconque, mais j'eus quand même le temps de surprendre quelques regards compatissants avant de m'affaler dans un fauteuil relax à côté de la verrière. Je ne m'y attardai pas et vissai mes écouteurs dans mes oreilles en fermant les yeux.
Tout ce qu'il me restait, c'était la musique... Celle qui ne me tromperait jamais.
L'album avait en une semaine atteint des milliers de téléchargements. L'une des plus grosses ventes de l'année, d'après mon équipe. Mais contrairement à eux, ça ne m'avait fait ni chaud ni froid.
Au contraire, cette chanson qui devenait de plus en plus populaire commençait à me fatiguer. C'était vraiment le son du moment ! Le public réclamait Exception à chaque concert. Moi, j'enfilais un masque et je chantais comme si de rien n'était... Alors que ça ne faisait que retourner un couteau dans la plaie béante qu'était mon cœur.
C'était con, mais je continuais de la chercher dans la foule à chaque fois que montais sur scène. Et comme toujours, c'était la même déception. Elle n'était pas là, et je savais qu'elle ne viendrait pas...
Elle passe sûrement du bon temps avec Shawn... C'était ce genre de réflexion qui m'empêchait d'être aussi content que les autres après les shows... Comme ce soir-là à Seattle.
Je venais d'essuyer une larme en regardant ma face de zombi dans le miroir de ma loge, lorsque la porte de celle-ci s'ouvrit sur Jason.
— Allons faire la fête, m'invita-t-il avec un sourire enthousiaste.
Avant, c'était une tradition. Après chaque concert, on se réunissait quelque part pour l'After comme on l'appelait. Depuis le début de la tournée, Jason insistait pour que je les rejoigne, mais à chaque fois, il essuyait un refus de ma part.
Malgré tout, il revenait encore et encore. Je lui avais pourtant répété que je n'avais pas la tête à faire la fête où à baiser des putes... Je n'avais la tête à rien, d'ailleurs. Je n'étais plus qu'une loque. Les seuls moments où je me sentais vivant étaient ceux où j'étais sur scène. Mais ça ne durait jamais. Tout comme le bonheur...
Lucas était resté en retrait, il se dandinait d'un pied à l'autre, en attente de ma réaction. Je le comprenais. Je n'étais pas vraiment fréquentable ces derniers temps. Presque tout le monde m'évitait le plus possible... Sauf Jason et Monica.
— C'est où ? me surpris-je à demander de cette voix éteinte qu'était devenue la mienne.
Il parut étonné que je n'aie pas refusé du premier coup. Cependant, il s'empressa de répondre comme s'il redoutait que je ne change rapidement d'avis :
— Dans notre suite. On a invité des filles et quelques potes. Ça va être cool !
On séjournait toujours dans des hôtels lorsqu'on devait jouer plus d'une fois dans la même ville. Parce que rester coincé dans le même bus avec des mecs qui s'envoyaient en l'air autant que Jason et Lucas n'était même pas envisageable... Ne parlons même pas de Sam et Lara.
Mais cette fois, au lieu de partager une suite avec eux comme d'habitude, j'avais demandé une chambre à part, pour pouvoir être tranquille.
Pour fumer, te bourrer la gueule et pleurer, surtout.
— Peut-être qu'il préfère se reposer, suggéra Lucas devant mon silence qui devenait trop long.
Un coup d'œil en direction du pianiste me fit remarquer que ma sœur était derrière lui, appuyée au mur en face de la porte. Que voulait-elle encore ? Cette chieuse me suivait presque partout.
— Allez mec ! m'encouragea Jason. T'as pas à te morfondre pour une nana, alors que tu peux toutes les avoir.
Monica, plus loin, faisait semblant d'être accaparée par quelque chose sur son téléphone. Mais je savais qu'elle ne ratait pas une miette de notre conversation. Elle se prenait vraiment pour ma maman, celle-là !
Si je laissais les gars filer, elle allait me les casser avec l'un de ses speechs interminables, comme quoi, je devais me comporter comme un adulte. Qu'il fallait faire quelque chose contre l'acharnement de mes fans envers Sara. Que l'alcool n'allait pas résoudre mes problèmes... blablabla.
À mon avis, elle devait bien avoir une idée de ce qu'il y avait à ce genre de soirée : encore plus d'alcool... entre autres.
Juste parce que je savais que ça n'allait pas lui plaire, j'acceptai :
— Allons-y !
— Voilà le Rick que je connais ! s'écria Jason, tandis que Monica, elle, faisait la moue.
Je l'avais eu ! Un sourire triomphant s'étira sur mon visage – l'un des rares depuis des semaines. Peut-être que je commençais à bien la connaître finalement... et à m'attacher à elle d'une façon ou d'une autre.
Mais elle n'avait pas à s'inquiéter. Je n'allais pas vraiment faire des folies à cette soirée. Non ?

Rock Hard, Love HarderOù les histoires vivent. Découvrez maintenant