13 - Portes closes

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    L'hiver était enfin arrivé, ainsi que les vacances de Noël. Ornella et Tristan avaient continué de se voir régulièrement, surtout sous l'impulsion du jeune homme. Il espérait que leurs rendez-vous parviendraient à changer les idées de son amie, qui se ne confiait d'ailleurs plus au sujet de son harcèlement.

    Lors des jours de leurs rencontres, Tristan venait chercher Ornella chez elle, puis ils se promenaient dans la ville, généralement sur les bords du fleuve ou en centre-ville, au marché de Noël. Avant de rentrer, ils s'asseyaient à la table d'un café pour se réchauffer autour d'une boisson chaude.

    Le premier jour des vacances n'échappa pas à cette ritournelle. L'adolescent sonna chez Ornella vers quatorze heures et ils se dirigèrent vers le centre-ville. Comme à leur habitude, ils restaient silencieux, préférant profiter de la tranquillité du moment.

    Les deux amis trainaient encore dans une des petites rues historiques qui avoisinaient la grande place, quand ils entendirent un pouffement derrière eux. Tristan n'y fit pas attention dans un premier temps, pensant qu'il ne leur était pas adressé.

    Il remarqua qu'Ornella ne marchait plus à son niveau. Il se retourna, s'aperçut qu'elle s'était pétrifiée. Derrière elle, son regard fut attiré par une autre adolescente, qui semblait avoir le même âge que son amie.

    « Alors comme ça Ornella, tu traines avec d'autres gars que ceux du lycée ? »

    Tristan comprit alors. Cette fille devait faire partie du groupe qui harcelait son amie.

    « Il est vachement plus vieux, en plus. Mais après ça m'étonne pas. Ça ressemble bien à une pute comme toi. »

    Cette injure atteignit le jeune homme, comme si elle lui avait été aussi destinée. Elle eut un effet singulier sur lui, lui qui était d'habitude si placide et désireux de rester discret, fuyant les duels.

    « Arrête de l'insulter. Ornella ne t'a pas fait de mal, même si tu t'acharnes contre elle. Il faut vraiment être une gamine pour agir comme ça.

    — Tristan... » marmonna Ornella entre les dents.

    Confus, son ami reporta son attention sur la jeune fille. Il croisa son regard où l'on pouvait apercevoir une supplication muette. Un instant, il eut l'intuition de la raison de cette demande. Il ferma les yeux et les poings. Il inspira. Il se rangea à son souhait.

    Mais son affection pour elle le tiraillait. Cette injustice le révoltait, il désirait à tout prix la défendre ; pourtant ce n'était pas le souhait de la concernée et la fidélité de son cœur l'obligeait à s'y fier.

    Les deux amis baissèrent les yeux, évitant de se regarder. La lycéenne qui les avait dérangés ricana une dernière fois avant de se détourner d'eux.

    Ornella et Tristan restèrent ainsi, si proches et si éloignés, au milieu de la foule qui se pressait dans les rues commerçantes à quelques jours de Noël. Puis ils finirent par reprendre leur chemin en direction de la grande place. Le reste de l'après-midi se déroula étrangement, les deux amis ne souhaitant pas se parler tout en essayant de rester prévenant l'un envers l'autre. Ce fut l'heure de la séparation qui apporta la sentence de cette incertitude.

    Comme à leur habitude, Tristan raccompagna son amie jusqu'à chez elle. Aucun des deux adolescents n'osait dire quoique ce soit avant de se quitter, ne sachant toujours pas sur quel pied danser.

    « J'espère que cette fille a compris...

    — Je ne voulais pas que... »

    Ils se regardèrent, interdits, méfiants.

    « Quoi ? Qu'est-ce que tu voulais que je fasse ? Je pouvais pas te laisser te faire insulter comme ça, devant moi...

    — Mais t'as empiré la situation, idiot ! Déjà que Melany m'a vu avec toi, et toi en plus t'en as rajouté une couche ! T'imagines pas ce qu'elle va vouloir faire pour se venger. »

    Tristan put entendre la voix d'Ornella se casser légèrement ; elle devait déjà s'inquiéter des représailles de cette fameuse Melany.

    « Ornella..., commença-t-il.

    — Rooh, arrête un peu avec ce ton ! On dirait qu'on est proche et que tu te soucies vraiment de moi.

    — Hein ? Qu'est-ce que tu racontes ? Je me soucie de toi !

    — T'as même pas été capable de me dire un truc quand je t'ai confié pourquoi je pleurais, au café. Tu m'as laissé pleurer, tu t'en foutais ! J'ai pas oublié !

    — J'ai peut-être rien dit sur le moment, mais après j'ai essayé de te remonter le moral... Si tu te prenais pas pour le centre du monde tu t'en serais aperçue !

    — Quoi ? Moi, le centre du monde ?

    — Oui ! T'arrêtes pas de monopoliser les conversati...

    — Il faut bien, tu parles jamais, tu parles jamais de toi, je connais rien de toi ! Tu m'énerves, tu m'énerves ! Depuis qu'on se parle tu me fais toujours pitié. »

    Tristan esquissa un geste vers elle, pour peut-être la calmer.

    « Non ! rétorqua vivement Ornella en se reculant. Va-t'en ! Je ne veux plus jamais te revoir ! »

    La porte claqua.


    Nos cœurs éclatent et nos remords échangés


Ses oreilles bourdonnaient encore de ce claquement de porte lorsqu'il arriva chez lui. En partant de chez Ornella, il avait d'abord marché, chancelant, éperdu. Puis il s'était mis à courir, pour fuir, pour se fuir, pour fuir tous ses mots.

    Tristan referma la porte. Il s'y appuya, rejeta la tête en arrière. Il ne réalisait pas encore ; il ne le désirait pas. Mais déjà les ténèbres de sa maison le dévoraient à nouveau.

Je tenais à remercier Margot pour ses conseils lors de l'écriture de ce chapitre, qu'elle a vécue en temps réel, à mes côtés (de même que le précédent)

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Je tenais à remercier Margot pour ses conseils lors de l'écriture de ce chapitre, qu'elle a vécue en temps réel, à mes côtés (de même que le précédent). Par ailleurs, lLs chapitres que je trouve mieux écrits, plus soignés, un peu plus introspectifs (par contre ?), arrivent enfin ! J'espère que vous allez les apprécier.
Je réponds à vos messages d'hier dès que possible :)

(CC2018) Chaque année le printemps revient [TERMINÉE]Where stories live. Discover now