Chapitre 22

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– Je pense que Charly est en pleine dépression, là, lance Betty, à moitié en riant, essayant probablement de faire de l'humour.

– Elle déprime. Ce n'est pas pareil.

Plusieurs têtes se tournent dans la direction de Chloé qui déjeune seule à une table du réfectoire, un peu en retrait.

– Comment ça ? demande Samy.

– La dépression est une maladie. Charly va juste mal.

– Et alors, ce n'est pas moins important ! rétorque Sandie.

J'adore quand on parle de moi comme si je n'étais pas là.

– Je n'ai pas dit que ça l'était. C'est une question de vocabulaire qui ne veut pas dire la même chose.

Ils vont vraiment détailler mon état mental alors que je suis à un mètre d'eux ?

– Ben, l'idée c'est qu'elle broie du noir, quoi.

– Eh bien, quelles observations ! Je ne m'en porte que mieux. Merci à tous pour votre diagnostic, sifflé-je entre mes dents en me levant.

Je m'éloigne en entendant leur gêne s'exprimer. Ils n'avaient pas vu que j'étais là. Ce qui veut dire qu'en plus d'être ou ne pas être dépressive, je suis clairement transparente. Un pur bonheur de travailler avec ces gens-là.

Je marmonne dans ma barbe jusqu'à planter mes fesses dans mon fauteuil de bureau. J'essaie de me raccrocher au fait que dans quelques heures, je serais en week-end et je pourrais me terrer au fond de mon lit sans que personne ne vienne m'emmerder.

Je soupire et m'efforce d'évincer tous les souvenirs de ma grand-mère qui me hantent depuis plus de vingt-quatre heures, la tentative de communication de ma mère et les appels incessants d'Alex. À lui seul, il a inondé ma messagerie vocale pour que je vienne assister à l'enterrement de mon grand-père.

Non, mais vraiment ? À quel moment le courant a stoppé son parcours d'un hémisphère à l'autre de son cerveau ? Parfois, je me demande s'il ne prend pas autant de plaisir que le reste de ma famille à me torturer. L'anniversaire de grand-père a été une telle réussite que je doute qu'une seule des têtes présentes souhaite me voir apparaître pour dire au revoir à l'homme que je méprisais le plus. Quoique... Personne n'est encore arrivé au niveau de mon père en fait, mais ils concouraient vraiment dans la même catégorie. Cela dit, Ghislain Sanders vient d'être battu par forfait.

– Charly, on peut se voir deux minutes, s'il te plaît ?

Chloé est de retour de sa pause. Son bureau est rempli de pochettes que je ne reconnais pas, de couleur rouge, avec de gros triangles encadrant des points d'exclamation, tel un panneau "attention".

– Tu as eu le temps de préparer la présentation pour le salon des métiers ?

– Quelle présentation ? demandé-je, cherchant dans mon esprit, en vain, ce à quoi elle pouvait se référer.

– La pochette que je t'ai donnée lundi quand tu es rentrée chez toi.

– J'ai parcouru les papiers qu'elle contenait, mais c'était des flyers de l'agence et des documents sur ce qu'on y fait. Je me suis dit que c'était à titre informatif.

Chloé se redresse en même temps que son sourcil. Je sens que la moutarde lui monte tranquillement au nez.

– Et tu ne tu n'es pas dit par hasard que ce que contenait la pochette était probablement lié aux indications que je t'ai fait parvenir par texto le soir même ?

Mes paupières s'abaissent alors que les souvenirs me reviennent en mémoire. Ces fameux textos... que j'ai totalement zappés. Je me racle la gorge en faisant une grimace.

Hating, Craving, FallingOù les histoires vivent. Découvrez maintenant