65. Le reflet dans le miroir

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Le titre du journal avait fait l'effet d'une bombe chez Remus. Le jeune garçon avait vu le visage de son père défiler devant ses yeux. Ses amis virent son état, mais n'en parlèrent pas, ils connaissaient l'enfance de leur ami. Cependant, ce jour-là, ils firent en sorte que le loup-garou se sente bien. Toutefois, le soir venu, Remus alla se coucher tôt.

Remus éteignit les lumières et s'allongea sur son lit, les yeux grands ouverts. La lumière, qui filtrait du bas de sa porte et derrière les lourds rideaux de la fenêtre était suffisante pour éclairer la pièce. Assourdit par la moquette, les paroles de ses trois amis étaient intelligibles.

Le loup-garou soupira et changea de position roulant sur le côté, se mettant en boule. Il pressa ses paupières, férocement, avec l'intention de s'endormir. Cependant, il n'était pas fatigué. Il avait sorti cette excuse pour s'éloigner, s'isoler.

Si Lily ne disait rien, il sentait son inquiétude et tous ses gestes cherchaient à l'apaiser. La jeune fille ne comprenait pas les sentiments qui habitaient le loup-garou. Elle était certes partie de chez elle, mais de son plein gré, le posant comme un défi au monde. Et quand elle aurait prouvé ce qu'elle souhaitait, elle pourrait rentrer. La porte lui serait ouverte. Lui, il ne pouvait pas, comme James, personne ne serait là pour l'accueillir.

A l'opposé de Lily, James faisait comme si tout allait bien. Il cherchait, presque désespérément, à faire oublier la part sombre du monde, quitte à devenir aveugle à la réalité. Le jeune Potter ne voulait pas vivre dans le passé, il tentait toujours d'aller de l'avant, de se passer, sans jamais se retourner. Pour lui, le passé est le passé, l'abandonner permet d'avancer.

Et ceci, Remus ne pouvait le concevoir. Lui, il ne pouvait oublier ce qu'il était, l'échange revenait chaque mois, immuable. Il se devait de se souvenir de chaque lieu, de chaque visage, pour ne pas se faire démasquer. Il lui fallait penser à tous ses gestes, à toutes ses paroles, pour ne pas se trahir. Le passé était le lourd prix à payer. Le seul qui pouvait le comprendre était Sirius en réalité. Le Black était lié à sa famille, par son nom, par son apparence, par son don. Il cherchait à tout prix à briser l'image que le reste de la terre avait de lui et cela lui revenait toujours en pleine figure. Combien de temps encore avant que Sirius ne se fasse accuser à tort ? Et surtout, combien resteraient et le soutiendraient, au lieu de lui tourner le dos ?

Remus ouvrit les yeux et grogna. Il n'arriverait jamais à dormir ainsi. Rejetant sur le côté le fin drap qui le recouvrait, il se leva d'un bond, enfilant la paire de basquet qui trainait. Prenant garde à ne pas faire de bruit, il descendit les marches, arrivant au salon. Avec soulagement, il vit que ses trois amis étaient partis se coucher, il n'avait pas envie de se confronter à eux.

Se rendant dans la cuisine, il prit un verre qui attendait sur l'évier et ouvrit le robinet. L'eau fraiche coula dans sa gorge, apaisant sa soif. Avec plus de force qu'il ne l'aurait voulu, il reposa le verre, créant un bruit sourd. Le loup-garou se figea, attendant une réponse qui ne venait pas. Après plusieurs minutes, une fois certain que Lily ne descendrait pas, remus reprit son périple, se rendant dans le salon. Ne pouvant dormir, il avait décidé de continuer son roman.

Il passa devant le grand miroir et lui jeta un coup d'œil. Habituellement, il évitait au maximum de voir son reflet, qui l'horrifiait. Mais là, seul, uniquement éclairé par les rayons de la lune, le miroir était attrayant. Posant ses yeux sur le garçon qui apparaissait, il le détailla.

Le jeune individu devait avoir une dizaine d'années, ou un peu plus, à la vue des cicatrices blanchâtres qui parsemaient ses bras. Passes ses mains sur son corps, Remus suivit doucement celle qui descendait le long de sa clavicule. Elle était ancienne, très ancienne, la première qu'il n'ait jamais eue. Passant ses mains sur ses bras, remus frissonna. A ses yeux, les fines lignes étaient l'une des choses qui se démarquaient le plus chez lui. Ce détournant un instant de son reflet, il attrapa un vieux pull, à James ou à Sirius, qui trainait sur une chaise. Le loup-garou l'enfila et le ferma jusqu'en haut, cachant sa honte, son secret. Il put enfin s'attaquer à son visage.

Il portait des cheveux châtains, fins et raides, qui lui tombaient devant les yeux, masquant son regard. Bien que propre, ses cheveux n'avaient pas de style défini, préférant tomber le plus rapidement vers le sol. Le loup-garou ne faisait rien pour les discipliner, les rendre attrayant, car ils cachaient à la perfection son visage émacié. Pour l'occasion, il attrapa ses mèches, les callant sous sa main contre son crâne, dévoilant un inconnu. Celui-ci avait les joues creuses, même après un an passé à Poudlard, avec un accès constant aux cuisines. Il faisait partie de ces gens qui ne grossissaient pas.

S'il n'y avait que ça... Sa peau était blanchâtre, tirant sur le gris. Pas comme Lily, avec sa peau de rousse, lui était plus teint maladif. Ensuite, il y avait son nez, grec, comme on disait. C'était, à ses yeux, la seule et unique partie correcte de son visage ? Même sa bouche, aux lèvres étroites et craquelés, dégoutaient plus qu'elles suscitaient d'admiration. Il tenta d'y faire apparaitre un sourire, retroussant les coins. Aussitôt, une grimace déforma ses traits, faisant apparaître des dents trop blanches et trop pointues, trop animal, trop loups. Faisant immédiatement disparaitre l'mage. Garder une expression neutre et un visage impassible, voilà qui le garderait en vie.

Pendant un long moment, Remus garda son regard braqué sur le bas de son visage, n'osant se regarder dans les yeux. Puis, soupirant, tentant de trouver en lui le courage que le Choixpeau avait cru déceler en lui, il chercha ses yeux. Ses pupilles s'accrochèrent à leur reflet, totalement immobile. Outre les cernes qui les cerclaient et ses cils, plutôt long, qui les encadraient, ses yeux auraient pu être normaux, sans cette couleur maudite. Indéfinissable, elle était, selon lui, la faille de son secret. « Il a les yeux de son père ! » lui avait-on dit. C'était vrai, il avait les yeux de son père, de celui qui lui avait transmis sa malédiction.

Inspirant profondément, ne se rappelant plus quand il avait commencé à retenir sa respiration, Remus lâcha ses cheveux, qui revinrent automatiquement cacher ses yeux. Effrayé, il s'éloigna de son reflet. Cela était une mauvaise idée, très mauvaise.

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Me voilà de retour, parlant du passé de Remus, comme prévu !

Je commence par un petit amuse gueule, avec le reflet de Remus !

Je sais que la manière dont il se voit est horrible, mais depuis sa naissance, on lui répète qu'il est un monstre, alors ça laisse des cicatrices...

Prochain chapitre, on entre dans les véritables souvenirs ! Au lieu de faire un cauchemar, je le replonge simplement dans son passé et cela se fera durant trois chapitres !

Les maraudeurs à Poudlard, 1ère année [Terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant