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Ana

— Je vais me casser la gueule ! hurlé-je en fonçant droit dans un arbre.

— Je te tiens, me prévient Elies en me rattrapant de justesse.

Grâce à son appui, je reprends peu à peu l'équilibre.

— Qu'est-ce que je ne ferais pas sans toi, rigolé-je en fixant un point devant moi.

Il s'esclaffe en secouant la tête. Me voilà sur son skate depuis une bonne vingtaine de minutes, tout juste après le départ de Gabriel. Il est resté avec nous plus longtemps que prévu. Lui et Elies ont bien discuté. J'écoutais brièvement leur conversation, plutôt concentré sur les regards intenses que me lançait Gabriel. Il n'est pas mal, dans son genre. Du même âge que mon cousin, il pratique ce sport depuis sept ans. Ils n'ont fait que parler des figures qui existaient, des sauts et de je ne sais quoi, jusqu'à ce que la discussion ne dévie au mot « fête ». Mes oreilles ont directement intercepté cette bribe, ce qui m'a tout de suite fait relever la tête vers eux. Gabriel nous a invités avec trois de ses amis à boire un coup dans un bar plutôt sympa, paraît-il, demain soir. Je n'aurai jamais pensé qu'une telle proposition émane d'un inconnu. Malgré tout, j'apprécie l'invitation - bon, j'adore aussi faire la fête - et Elies aussi étant donné qu'il a accepté. Rendez-vous à 21h au Bar Nine. Pile a une dizaine de minutes à pied de notre hôtel. Elies a vraiment dégoté le meilleur de New York. Même si je me demande tous les jours avec quel argent il a pu nous le payer, je ferme ma bouche, comme promis.

— J'arrête, je n'en peux plus, soupiré-je.

J'entends Elies ricaner dans mon dos.

— Watson est déjà épuisé ? se moque-t-il en ramassant le skate.

Sous sa remarque, je lève les yeux au ciel et sors mon polaroïd du sac.

— Une photo s'impose, le lourdingue.

Elies capitule non sans avoir râlé. Il vient se placer à côté de moi, le skateboard en main. Je tends alors mon bras pour prendre la photo, mais il s'avère qu'il est trop court pour nous encadrer tous les deux.

— Donne, je vais la prendre, t'as l'air de galérer.

Je ne proteste pas. À présent prête pour la photo, je tire la langue en même temps qu'Elies. Clic ! Dans la boîte !

***

De retour à l'hôtel, je me rue dans la chambre pour enfiler un short et un débardeur noir. Je suis plus à l'aise en jogging ou en short, même dans un hôtel cinq étoiles. Je ne réalise toujours pas. Moi, dans un cinq étoiles. La seule fois où je suis allée à l'hôtel remonte à belle lurette. Je partageais une chambre avec Cassie et Jonathan, autrement dit une chambre où la poussière, le grincement du parquet et un lit tout miteux, régnaient. Une horreur. Qui plus est, ça empestait la mort aux rats.

Détestant être pieds nus, je mets une paire de soquette noire lorsqu'un Elies tout souriant pointe le bout de son nez.

— Un souci ? demandé-je en équilibre sur une jambe, ignorant la douleur de mes muscles.

J'ai l'impression d'avoir couru le marathon.

— Non, j'examine juste le grand singe que tu es.

J'interromps le mouvement que j'allais entreprendre, soit enfiler la deuxième chaussette, et relève vivement le menton vers sa crinière blonde.

— Moi, un singe ? fais-je en arquant un sourcil interrogateur.

— Ouais, toi. Tu escalades encore mon dos pour récupérer les coussins sur le canapé.

Le prix à payerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant