Chapitre 13

338 31 6
                                    

Face à ses dernières paroles, je sentis mon corps ainsi que tous mes organes se serrer sur eux-mêmes. Moi, danseuse ? Bien que je l'avais toujours rêvé, mais je n'arrivais pas à l'envisager. Il me manquait le professionnalisme et la silhouette également. J'avais perdu toute ma souplesse et Dieu sait combien c'est difficile de la récupérer entièrement. Je me détachai de l'emprise de Loïc et secoua doucement la tête, de gauche à droite, pour désapprouver ce qu'il venait de dire. J'étais capable de chercher de multiples prétextes qui allaient à l'encontre de sa proposition, parce que je ne me sentais pas à la hauteur d'un tel défi. Beaucoup trop de travail pour une fille aussi frêle que moi. 

« Je ne peux pas Loïc. Avais-je dit, évitant de croiser son regard. » 

.. 

Deux jours plus tard, je me trouvais derrière les rideaux des coulisses, m'accrochant péniblement au poteau qui les soutenait. Loïc m'avait baratiné durant ces dernières quarante-huit heures que j'avais fini par accepter de subir ce challenge. Intérieurement, il était évident que je voulais me faire une place dans ce monde si sélectif. Mais d'un côté, je ne trouvais pas le courage, la force nécessaire d'y arriver. La danse était pour moi, et l'est pour sûr toujours, un échappatoire, une antithèse à la réalité. Elle me redonnait l'oxygène manquant pour respirer, comme elle me couchait par terre, dépourvue de toute énergie. 

Le souffle court, je fixais mes pieds cachés dans des chaussons noirs. La répétition allait bientôt commencer, mais j'étais la première déjà en position. Disons que j'avais besoin de me familiariser avec les lieux, le domaine pour quelques courts instants. Je portais un simple justaucorps, les jambes recouvertes d'un fin collant opaque. Cet accoutrement révélait l'inexistence de mes courbes et de mes muscles. 

Deux mains sur ma taille me sortirent de ma rêverie. Je tournai la tête et c'était sans surprise que je remarquai le jeune Belge. Il me souriait, d'un sourire protecteur incontrôlé. Je ne pus m'empêcher de lui rendre, même si le mien était plutôt mécanique qu'autre chose. Il se mit devant moi, ne bougeant pas ses mains de place. 

« Ma belle, je suis persuadé que tu vas y arriver. Je crois en toi, d'accord ? Déclara-t-il, d'une voix basse. »

Je sentis mon cœur se réchauffer quelques peu, tandis que les douces lèvres du jeune homme embrassaient mon front. 

« Lâche-toi. Dit-il dans un souffle. » 

J'hochai la tête une fois, puis une deuxième avec un peu plus de conviction. Avant que les coulisses ne soient envahies par la meute de danseurs, je glissai mes mains sur le visage de Loïc et l'embrassai directement. C'était le moyen le plus radical de me donner du courage mais aussi la plus belle sensation qui existait en ce monde. Il embrassa ma main, un sourire béa sur le visage, avant que je ne m'engage sur la scène sous le rythme de la musique. J'attrapai une nouvelle main, celle de l'ancien partenaire de la blessée. A ce que j'avais compris, il dansait pour Loïc depuis un bon moment déjà. Il était brun, avec deux yeux bleus perçants plantés sur son visage en parfaite symétrie. Il paraissait sympathique, ce qui réussissait à augmenter un peu ma confiance. Et, du coin de l'œil, je pouvais apercevoir le regard bienveillant du chorégraphe, de mon chorégraphe. 

Je me mis à exécuter les pas, un sourire naissant sur le coin de mes lèvres. Je m'abandonnais totalement dans la mélodie, laissant mes membres boire chaque note de celle-ci. Le professionnel me portait et me faisait tourner sans difficultés, et je me laissais aller, oubliant même le tournis qui me prenait parfois. Je me retrouvais comme dans les rêves de ballerine que je faisais étant plus jeune. 

Au dernier accent, je me retrouvai allongée sur les coudes, une jambe repliée et la tête relevée en direction du plafond. Une joie inconnue me parcourue toute entière, ce qui me fit me relever en un quart de seconde. Tout le monde m'applaudissait, certains lançaient des petits cris de félicitations. Je joignis mes mains ensemble pour les remercier, avant de concentrer mon attention sur Loïc. En voyant ses yeux brillants d'émotion et son sourire gigantesque, je descendis rapidement de la scène et me jetai dans ses bras. Il sembla perdre l'équilibre mais réussit à se stabiliser, m'ayant rattrapé au vol. 

« J'ai réussi Lo', j'ai réussi..? Demandais-je toute essoufflée. 

-C'était génial, putain Alyssa, c'était parfait ! »

Je le serrais fort, sentant des larmes dévaler mes joues et des sanglots s'échapper de ma bouche sans que je n'y puisse quelque chose. 

« Pourquoi tu pleures princesse ? »

Je reposai pieds à terre et planta mon regard brouillé par les larmes dans le sien. Ma poitrine se soulevait à l'allure de ma respiration irrégulière, celle-ci dû aux bouleversements que je ressentais. La force de cette danse, l'amour de Loïc : toutes ces choses me renversaient que ce soit mentalement, intérieurement ou physiquement. 

« J'en sais rien.. Ma main glissa sur le creux de son cou. J'ai l'impression d'avoir explosé, d'avoir sauté dans le vide et de ne plus savoir où j'en suis. Mais ce n'est pas un mauvais ressenti, c'est juste incroyable et magique. Je veux te remercier Loïc, c'est grâce à toi tout ça. Si tu avais lâché l'affaire, je.. je n'ose même pas imaginer où j'en serais. Je t'aime tellement, je ne veux pas que tu me laisses, je veux que tu restes pour toujours auprès de moi. J'ai besoin de toi. Terminais-je, m'accrochant à lui comme on s'accrocherait à une bouée de sauvetage. » 

Il ne bougeait pas d'un pouce, soulevé par cette déclaration soudaine. D'ailleurs, elle n'avait échappé à personne. Plusieurs se retenaient de réagir, attendant la réponse du brun. 

Cependant, il mit plusieurs secondes à revenir sur Terre, laissant mon organe vital tambouriner à m'en détruire la cage thoracique. Il cligna lentement des yeux, comme pour se remettre les idées en place et scella ses lèvres aux miennes. Une réponse silencieuse qui voulait pourtant tout dire. Je prolongeai, en me cramponnant toujours à lui, serrant en même temps son t-shirt dans mes paumes. 

Nos lèvres se séparèrent véritablement après plusieurs minutes. Les danseurs nous regardaient toujours, mais étonnement, je n'y prêtais pas vraiment attention. Il n'y avait que lui et moi. 

« Jamais je ne partirais sans t'avoir à mes côtés, tu m'es indispensable et je ne me vois plus sans toi Aly'. Tu.. Je t'aime jusqu'aux étoiles. »

Sa tête s'enfouit dans mon cou, alors que je fermais les yeux pour imprimer ses derniers mots dans mon esprit. Mais quand je les rouvris, une silhouette se présenta devant mes yeux. Elle m'était imposante et effrayamment familière à la fois. Mon souffle se coupa brutalement et mon corps fondit entre les bras de celui que j'aimais, m'écrasant à genoux contre le sol froid et rigide. Je fixais l'individu présent à l'autre bout de la salle, sentant mon organisme pris de convulsions anormales..

Ethan. 


 

HomelessWhere stories live. Discover now